Le "Colisée" de la discorde : à Madagascar, l'immense arène en ciment voulue par le président Rajoelina, crée la polémique
Construit sur les hauteurs de la capitale Antanarivo, cette construction a des airs d'amphithéâtre romain. Dédié à l'histoire de Madagascar, le "Colisée" du président Andry Rajoelina sème la discorde.
Lorsque ce projet d'arène en béton largement inspirée de la Rome antique a été dévoilé il y a plus d'un an, personne n'y a vraiment prêté attention. Il s'agissait alors, en vue du 60e anniversaire de l'indépendance de l'ex-colonie française cette année, de bâtir une enceinte destinée à "accueillir un spectacle pour traiter l'histoire de notre pays de manière éducative, populaire et culturelle", selon la ministre de la Culture, Lalatiana Rakotondrazafy.
Mais au fur et à mesure qu'il sortait de terre, ce bâtiment nommé "Masoandro" (soleil en malgache) a fait froncer de nombreux sourcils. Et à la veille des célébrations du 26 juin, il est devenu l'objet de toutes les critiques.
Emotion chez les héritiers de la famille royale
A commencer par celles des descendants des souverains malgaches qui ont trôné sur le site historique du palais de la reine de Manjakamiadana, du XVIIe siècle jusqu'à l'annexion de la Grande île en 1896. "On pensait qu'il ne s'agirait que de simples décorations accessoires", note Christian Raoelina, un des petits-fils du frère de la reine Ranavalona III.
"Notre étonnement en voyant la hauteur de la construction n'en a été que plus grand", ajoute-t-il, "on n'avait pas compris que ces travaux allaient apporter de grands changements dans le paysage du palais". L'association des Amis du patrimoine de Madagascar (APM) s'est elle aussi émue de la forme du "Colisée".
"Il apparaît de façon évidente que, outre son incongruité, cette structure n'a rien à voir avec l'architecture initiale du site, ni avec l'histoire de Madagascar, encore moins avec sa culture", s'est-elle indignée. La construction est d'autant plus malvenue, a ajouté l'APM, qu'elle menace le classement de la haute-ville d'Antananarivo au patrimoine mondial de l'Unesco.
"Massacre" d'une "place sacrée"
Dans un courrier, l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco) s'était émue en février de l'impact du projet sur "la valeur universelle exceptionnelle" de la capitale. L'opposition elle aussi a tiré à boulets rouges contre l'arène présidentielle, en dénonçant le "massacre" d'une "place sacrée" et d'un "symbole historique" du pays.
Mis en cause de toutes parts, le président Rajoelina a riposté en accusant les détracteurs de son arène (il réfute le terme de "Colisée") d'être "de mauvaise foi". "L'appel d'offres a été lancé des mois d'août à septembre l'année dernière et est paru dans les journaux les plus lus du pays (...) pendant toute une semaine", a-t-il lancé fin mai à la télévision à tous les "surpris".
"Les descendants des monarques à Madagascar n'ont plus aucun pouvoir", lui a rétorqué aussi sec Christian Raoelina, "mais en tant qu'héritiers propriétaires des tombeaux royaux, nous méritions d'être consultés". D'autant plus, insiste-t-il, que le "Colisée" a été érigé "dans un emplacement sacré".
"Le rôle de l'Etat est de sauvegarder, de réhabiliter, d'entretenir le patrimoine du passé, mais non pas de le défigurer ou de le piétiner par de nouvelles constructions", a renchéri l'artiste plasticien Jean Andrianaivo Ravelona.
1,4 million d'euros
Président de l'Académie malgache, le Pr Raymond Ranjeva a proposé une concertation nationale sur le sujet. "On doit admettre que cette construction, en l'état actuel des choses, divise la nation", a-t-il regretté. Pas question, a répondu le chef de l'Etat, déterminé à imposer son projet quoi qu'il en coûte.
"Est-ce qu'on veut restaurer nos fiertés nationales oui ou non ?", a plaidé Andry Rajoelina, dont l'arène doit permettre d'offrir à tous les visiteurs du palais royal des spectacles retraçant l'histoire et le quotidien des anciens souverains de la Grande île. Son projet (d'un coût estimé à 1,4 million d'euros "financé par le seul budget de l'Etat", insiste le gouvernement) doit drainer 300.000 à 500 000 visiteurs vers le palais de la reine de Manjakamiadana, a-t-il assuré.
À regarder
-
Se faire recruter dans l’armée par tirage au sort ?
-
La détresse de Cécile Kohler et Jacques Paris, otages en Iran
-
Le fléau des courses-poursuites à Los Angeles
-
Bac sans calculette : les conseils de Lucas Maths
-
Menace des drones : la France déploie ses armes
-
Un couple sauvé des eaux au Mexique
-
Ces méthodes spectaculaires contre les courses-poursuites
-
Opération anti-drogue : 400 policiers mobilisés à Grenoble
-
En Turquie, une femme sauvée in extremis devant un tramway
-
14 milliards d'impôts en plus, qui va payer ?
-
Gaza : comment désarmer le Hamas ?
-
Menace sur les réseaux : 100 000 euros pour t*er un juge
-
Cédric Jubillar : 30 ans requis contre l'accusé
-
Impôts, retraites, que prévoit le budget 2026 ?
-
Rihanna, reine des streams sans rien faire
-
Que changera la suspension de la réforme des retraites si elle est votée ?
-
Salaire : êtes-vous prêts à jouer la transparence ?
-
Ici, des collégiens dorment à la rue
-
Nouvelle éruption d'un volcan dans l'est de l'Indonésie
-
Cœur artificiel : l'angoisse des greffés Carmat
-
Pourquoi le vote du budget peut te concerner
-
Le nouveau ministre du Travail rouvre les débats sur les retraites
-
Laurent Nuñez, nouveau ministère de l'Intérieur, se confie sur les attentats de 2015
-
Adèle Exarchopoulos : "Quand le monde se résigne à banaliser la violence... Ce qui reste, c'est le collectif"
-
Un mois après sa mort, le message de Charlie Kirk résonne encore
-
Le rappeur SCH déclare sa flamme à Marcel Pagnol dans un film d'animation consacré au célèbre cinéaste
-
Plan de paix pour Gaza : quatre nouveaux corps d'otages ont été remis à Israël
-
SFR bientôt racheté par ses concurrents ?
-
Musée Chirac : braqué puis cambriolé en 48 heures
-
Otages israéliens : révélations sur leur détention
Commentaires
Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.
Déjà un compte ? Se connecter