: Reportage Positiv Festival d'Orange : Will Smith remonte sur scène pour un concert hommage à lui-même
Avant d'incarner à l'écran le légendaire Prince de Bel-Air, Will Smith fut dans la vie The Fresh Prince, icône de la scène rap US des 90's. Après 20 ans d'absence, il fait son come-back avec un nouvel album et une tournée "Based On A True Story".
Ce que Will Smith veut, il l'obtient. Une pugnacité gravée dans le patronyme de l'acteur, si ce n'est directement dans son ADN. En anglais, will pour volonté.
Une volonté qui se veut résiliente depuis cette fameuse soirée des Oscars en 2022, où la gifle qu'il inflige à Chris Rock lui vaut une interdiction de cérémonie pendant 10 ans. Un revers que l'acteur, adepte du storytelling, transforme en renaissance artistique.
C'est sur la scène musicale et non l'écran qu'il signe son grand retour auprès du public. Nouvelle lubie de la star hollywoodienne ? Plutôt retour aux sources pour celui qui fût aux Etats-Unis dans les années 1990, une icône de la scène rap avec son groupe DJ Jazzy Jeff & The Fresh Prince, couronné de quatre Grammys. En juillet, le label Slang sous la direction d'Influence Media signe l'artiste qui se retrouve à nouveau sous les projecteurs.
Avec une tournée en Europe qui se veut introspective et nostalgique, son come-back musical regarde vers le passé. Pour sa première représentation annoncée en France, le chanteur de Miami marque le coup et s'offre la scène du théâtre antique d'Orange, monument romain classé au patrimoine mondial de l'Unesco, lors de deux dates inédites, le 31 juillet et le 1er août, dans le cadre du Positiv Festival, crée en 2019.
"Je viens voir cette énergie très américaine"
C'est au MaMA Festival, le festival des festivals organisé en octobre à Paris que la magie a opéré. Le directeur du Positiv Festival entend que Will Smith souhaite tourner en Europe. Ni une ni deux, Julien Gaona saisit l'opportunité de signer "la tête d'affiche qui fera connaître et reconnaître le Positiv Festival à Orange", confie-t-il à franceinfo Culture.
En décembre, le festival de musique électronique est le premier à annoncer un concert avec l'acteur, une première depuis 20 ans et du jamais vu dans l'Hexagone. Face à l'engouement du public, une nouvelle date est programmée, prévue le lendemain du concert initial."Ça s'est fait très vite, par téléphone dans un bistrot parisien explique le Vauclusien, Will Smith avait vraiment envie de tourner en Europe et d'entrer en contact avec le public".
Pourquoi le théâtre antique d'Orange pour ce retour à la scène ? Julien Gaona se l'explique simplement :"Ils ont directement flashé sur le lieu, les Américains sont friands de ce genre d'endroit spectaculaire qui raconte l'histoire européenne et la romanité." En plus d'offrir un cadre unique, la disposition du théâtre romain permet "d'emmagasiner une énergie folle", selon le directeur pour qui les gradins abrupts créent un mur de spectateurs capable d'"orchestrer une certaine alchimie avec le public et transcender l'artiste".
C'est justement cette sensation de partage que viennent chercher Cédric et Nathan, le père et le fils ont fait le voyage depuis Toulon pour assister au concert de leur idole. Dès 17h, ils patientent devant l'entrée de la fosse 2 : "J'ai vu des vidéos de ses précédents shows sur Instagram, on voit qu'il danse beaucoup et communie avec son public, je viens voir cette énergie très américaine qu'on ne retrouve pas beaucoup en France", analyse le quadragénaire. Quelques heures plus tard, collés aux barricades, le père et le fils sont aux premières loges de cet événement exceptionnel.
En plus des familles, le public est composé de nombreux couples et de groupes d'amis de tout âge. Programmé en première partie, le DJ Bens procède à un sondage approximatif à la criée. C'est la tranche 40-50 ans qui répond le plus à l'appel, au sein de ce public hétéroclite composé de petits, de grands et même de très grands, pour ne pas dire vieux.
Cette dimension intergénérationnelle se retrouve dans la musique commerciale de DJ Jazzy Jeff & the Fresh Prince, sorte de rap familial. Avec des titres comme Summertime qui leur vaut un deuxième Grammy ou Ring My Bell issu du même album Homebase (1991), le duo échappe à la censure puritaine des radios américaines grâce à des paroles consensuelles et légères.
"C'est un concert pour un public familial qui va toucher toutes les générations, les plus jeunes qui le connaissent en tant qu'acteur et les moins jeunes comme musicien aux albums vendus à des millions d'exemplaires", estime Julien Gaona qui souhaite retrouver cette ambiance familiale expérimentée lors du concert de David Guetta, programmé en 2021.
Qu'ils soient fans de l'artiste ou pures néophytes, les spectateurs du public connaissent tous Will Smith qui peut compter sur sa renommée internationale pour remplir les salles. Tous s'attendent, comme Christophe, à un spectacle dans la démesure."J'imagine un show à l'américaine, il va nous faire surkiffer et réviser ses classiques avec nous", projette le concessionnaire automobile, fan de la première heure du Prince de Bel-Air.
Un show à l'américaine
Will Smith n'est pas le genre d'artiste à se faire attendre. Annoncé sur scène par une vidéo digne d'une bande-annonce de film d'action."The man, the legend" fait son entrée sur le plateau à 21h30 et n'en ressortira qu'une heure et demie plus tard, au terme d'un concert hommage à sa carrière. Le premier tableau donne le ton d'un show à l'américaine où toutes les franges des Etats-Unis sont représentées, des cheerleaders au cow-girls, avec jets de flammes en supplément.
Attention, il n'est plus question de Will Smith explique l'artiste, mais bien du Fresh Prince. Après cette déclaration, suivent les succès des premières années, tirés de sa carrière solo. Habillé d'une veste floquée "Philly", en hommage à sa ville natale Philadelphie, l'acteur reprend ses plus gros hits : Gettin' Jiggy wit It et Miami issus de son album Big Willie Style, son succès sorti en 1997, neuf fois disque de platine et vendu à 6 millions d'exemplaires. Un retour au hip-hop oldschool pour commencer le show en beauté.
C'est ensuite que ça se corse. Changement de décor pour le deuxième tableau, le rappeur entame une longue séquence émotion. D'abord lors d'un hommage à son ami et co-star de la série le Prince de Bel-Air, James Avery. Une transition vers un hommage à sa propre carrière d'acteur à la télévision et au cinéma, témoignant de ses talents de showman adepte de la mise en scène calculée. C'est peut-être the Fresh Prince qui se produit ce soir, mais Will Smith ne traîne jamais très loin.
La plateforme de streaming Netflix devient Willflix, à l'occasion d'un montage vidéo projeté sur le mur de la scène. Le chanteur entame alors une rétrospective des musiques de film mythiques de sa carrière. D'abord, Its not Unuasual avec la fameuse Carlton Dance pour rappeler ses débuts, puis la chanson Wild Wild West du film éponyme réalisé en 1999 et intégrée à Willennium, son deuxième album studio. Enfin, le fameux Men in Black, lors d'un flash mob d'une cinquantaine de danseurs amateurs d'écoles locales, âgés de 15 à 54 ans.
Prévenues par le Positiv Festival en juin, les écoles l'Asser de Sorgues, Arts de rue 84 d'Orange et GG Style Dance school de Morières-lès-Avignon n'ont eu qu'un mois pour répéter. "Il y a une chorégraphie imposée et un dress-code, chemise blanche, cravate et pantalon noir et l'équipe du concert nous a fourni des lunettes", raconte Lili Husson, professeure de danse à l'Asser et excitée de s'être vue offrir avec sa troupe, "l'expérience d'une vie".
Derrière chaque musique, il y a une histoire. C'est la vision défendue par Will Smith durant tout son show. L'acteur présente chaque titre de sa carrière comme un épisode de sa vie. Un discours qu'il tenait sur internet en février dernier au streamer xQc. Sorti en mai, son album Based On A True Story s'écoute comme on regarderait un show, au compte-goutte. Sur Instagram, l'acteur publie une vidéo par titre pour parler du sens de chaque nouvelle musique.
Un monologue confus
Will Smith regarde vers le passé dans cette tournée qui s'apparente à une croisade vers la rédemption. Assisté sur scène d'une interprète hésitante, l'acteur se lance dans de longs monologues mi-gourou mi-showman, enchaînant les poncifs tandis que des photos d'archives défilent derrière lui. Au cours de ses prises de parole, il lui arrive de prononcer des phrases comme "La mort est quelque chose qu'on expérimente tous", ou "Tout le monde traverse des épisodes difficiles", soit.
La star hollywoodienne semble marquée par ces derrières années d'ostracisme. Depuis les Oscars, il est parvenu à sortir le film Emancipation dont il est aussi le producteur, mais n'a tourné que dans un long-métrage, le quatrième volet de la saga Bad Boys, sorti en 2024. Une traversée du désert qui semble peser sur celui qui reconnaît ouvertement "avoir passé trois années difficiles marquée par la culpabilité et la honte". Une référence ostensible à la gifle, suivie de près d'une démonstration de coriacité. L'acteur brandit son Oscar qu'il fait ensuite circuler parmi la foule "bénissant" presque le reliquat de cette nuit agitée.
Il est là le véritable sujet de cette tournée européenne. En quête de reconnaissance et d'amour, le chanteur n'hésite pas à communier avec son public lors de nombreux bains de foule et séances de selfies. Reconnaissant du soutien apporté par ses fans, il les incite à célébrer l'amour lors de séances de câlins collectifs, rythmées par le titre You can make it, issu de son dernier album. "Merci de ne pas m'avoir abandonné", martèle-t-il à son public brandissant l'amour comme rempart face aux "problèmes du monde", sans donner plus de précisions.
À 56 ans, la star donne l'image d'un homme excédé par le comportement de Will qui pense que redevenir the Fresh Prince et reconnecter avec son premier amour, la musique, va l'absoudre. L'homme cherche désormais le pardon des autres, peut-être pour pouvoir se pardonner lui-même. Mais, Will Smith ne peut s'empêcher de refaire surface dans ce show à l'image de l'acteur et de son amour du storytelling. Un véritable prédicateur d'ondes positives et d'amour, toujours apolitique. En tout cas, la promesse donnée d'un show énergique et positif est respectée.
Après une deuxième date dans l'amphithéâtre, ce soir, le chanteur posera ses valises à Monte Carlo. Dans l'Hexagone, le festival Cabaret Vert à Charleville Mézières sera la dernière occasion de voir le Men in Black sur scène, son Zénith prévu le 2 septembre à Paris ayant été annulé.
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