Les dix polars et thrillers à ne pas rater cet automne

Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 12min
Vitrine d'une librairie, à Paris, le 26 août 2025. (MOHAMED BERKANI / FRANCEINFO CULTURE)
Vitrine d'une librairie, à Paris, le 26 août 2025. (MOHAMED BERKANI / FRANCEINFO CULTURE)

De "L'étendard sanglant est levé" à "Baignades", en passant par "L'Affaire Balzac" ou encore "La Honte", voici la sélection de franceinfo Culture des dix romans noirs de cette rentrée automnale.

Le succès du polar et du thriller, genre littéraire à part entière, ne se dément pas. Qu'il soit social ou politique, "whodunit" (littéralement "qui l'a fait ?") ou cosy crime, le roman noir attire de plus en plus de lecteurs. Tour d'horizons des nouveautés de la rentrée, de Benjamin Dierstein à Arttu Tuominen en passant par Cécile Cabannac ou Andrée A. Michaud.

"L'étendard sanglant est levé" de Benjamin Dierstein : aux abris, citoyens !

Il a été comparé à James Ellroy à la parution du premier tome de sa trilogie sombre de la France de 1978 à 1984, Bleus, Blancs, Rouges. Benjamin Dierstein a certes le souffle, l'imagination et la transgression de l'auteur du Dahlia noir mais pas son cynisme ni son pessimisme savamment cultivé. Benjamin Dierstein est une voix à part dans l'univers du roman noir. Dans ce second volet, L'étendard sanglant est levé, qui se lit indépendamment du premier, l'écrivain breton s'intéresse à la période d'un Giscard finissant et d'un Mitterrand aux portes du pouvoir. Une période marquée par une récession économique et la résurgence de mouvements révolutionnaires violents. On retrouve certains personnages (réels et imaginaires) du premier volume, ainsi que les noms des personnes qui ont marqué cette époque. Benjamin Dierstein est un conteur formidable qui laisse éclater tout son talent dans cette satire politique. Monumental.

"L'étendard sanglant est levé", Benjamin Dierstein, éditions Flammarion, 914 pages, 24,50 euros

Couverture du livre "L'étendard sanglant est levé" de Benjamin Dierstein. (EDITIONS FLAMMARION)
Couverture du livre "L'étendard sanglant est levé" de Benjamin Dierstein. (EDITIONS FLAMMARION)

"Baignades" d'Andrée A. Michaud : le grand malentendu

Tout est parti de travers à cause d'un malentendu. Grâce à son écriture cinématographique, l'autrice québécoise nous plonge dans une histoire sanglante née d'un quiproquo, au départ anodin. Les vacances de Max, Laurence et leur fille Charlie tournent au cauchemar après une remarque déplacée du patron du camping. Les faits s'enchaînent jusqu'à l'irréparable. Andrée A. Michaud est une conteuse formidable qui, à travers ce livre original et totalement surprenant, prouve une nouvelle fois qu'elle est une autrice qui sait instaurer, dès les premières pages, un suspens à la limite du supportable. Baignades est un roman noir psychologique déroutant et addictif. On vibre pour les personnages, on suit leur évolution avec fascination. L'autrice de La Femme de Sath ou encore Bondrée sonde les âmes avec beaucoup de justesse et d'efficacité. Elle pénètre dans les interstices avec une facilité déconcertante. Baignades, un polar d'atmosphère saisissant. À quand le film ?

"Baignades", Andrée A. Michaud, Rivages Noir, 300 pages, 21 euros

Couverture du livre "Baignades" d'Andrée A. Michaud. (RIVAGES NOIR)
Couverture du livre "Baignades" d'Andrée A. Michaud. (RIVAGES NOIR)

"L'Affaire Balzac" d'Hervé Jubert : Honoré avant Balzac

Hervé Jubert nous entraîne dans un polar historique sur les traces de l'écrivain français aux multiples casquettes du XIXe siècle. Nous sommes en 1818 au Palais Royal, à Paris, quand le narrateur, qui va garder jusqu'au bout l'anonymat, rencontre Honoré de Balzac. Ce dernier n'est pas encore le monstre littéraire que l'on connaît. Entre les deux, le courant passe vite. Le narrateur est embauché comme serviteur, homme à tout faire, et accessoirement compagnon de route et d'aventures. À Albi, sur les terres de la famille de Balzac, un oncle du futur écrivain, accusé du meurtre d'une jeune femme, risque la guillotine. Les deux nouveaux amis mènent l'enquête. Au-delà de l'intrigue, Hervé Jubert décrit avec bonheur une époque, une ambiance, avec beaucoup d'humour et de précision. L'Affaire Balzac, un récit historique documenté et vitaminé porté par une langue délicieusement désuète. Pour les grands et les petits.

"L'Affaire Balzac", Hervé Jubert, La manufacture de livres, 224 pages, 19,90 euros

Couverture du livre "L'Affaire Balzac" d'Hervé Jubert. (LA MANUFACTURE DES LIVRES)
Couverture du livre "L'Affaire Balzac" d'Hervé Jubert. (LA MANUFACTURE DES LIVRES)

"La Poussière des morts" de Cécile Cabanac : âmes en peine

Ce roman (très) noir s'amuse à multiplier les fausses pistes et à égarer le lecteur dans les dédales d'une enquête hors normes. Grâce à une narration fragmentée et l'usage de différentes temporalités, Cécile Cabanac instaure dès le début du livre un suspens captivant et addictif. L'autrice de La Petite Ritournelle de l'horreur ou Le Chaos dans nos veines est une redoutable conteuse et observatrice. Un jeune adolescent fan d'Urbex fait une morbide découverte lors d'une exploration : le corps d'un homme décharné et ligoté. Deux policiers très attachants, Xavier Ducastaing et Nadia Vernois, cherchent à percer un mystère qui ne cesse de s'épaissir. Qui a tué la victime en le privant de nourriture ? Partant de cet assassinat macabre, Cécile Cabanac élargit la focale pour nous emmener vers des contrées sombres. Accrolivre.

"La Poussière des morts", Cécile Cabanac, Michel Lafon, 400 pages, 20,95 euros

Couverture du livre "La Poussière des morts" de Cécile Cabanac. (EDITIONS MICHEL LAFON)
Couverture du livre "La Poussière des morts" de Cécile Cabanac. (EDITIONS MICHEL LAFON)

"La Suédoise" de Giancarlo de Cataldo : l'irrésistible ascension

Dans un monde d'hommes où les femmes sont réduites à être exhibées comme des trophées, Sharon lutte pour (sur)vivre et s'imposer. La jeune blonde, d'où son surnom, doit faire face à plusieurs ennemis implacables : déterminisme social, patriarcat, mafia… Elle, la banlieusarde qui vit avec sa mère invalide. Elle, la jeune fille qui doit faire face aux désirs libidineux de ses patrons. Sa vie bascule lorsqu'elle effectue une livraison d'un produit illégal pour le compte de son petit ami. Sharon se rebelle. Et se bat contre le darwinisme social. Son ascension dans l'univers impitoyable de la drogue suscite haine, jalousies et respect. Sharon est désormais crainte. Magistrat à la cour de Rome, Giancarlo de Cataldo sait de quoi il parle. Le co-auteur de Suburra narre une société fermée dans laquelle les petits poissons sont censés être dévorés par les plus grands. La Suédoise, le destin d'une femme insoumise.

"La Suédoise", Giancarlo de Cataldo, traduit par Anne Echenoz, éditions Métailié, 240 pages, 23 euros

Couverture du livre "La Suédoise" de Giancorlo de Cataldo. (EDITIONS METAILIE)
Couverture du livre "La Suédoise" de Giancorlo de Cataldo. (EDITIONS METAILIE)

"De ma famille" de Marlène Charine : jamais sans elle

Peut-on disparaître par sa propre volonté en laissant homme et bébé de 5 mois derrière soi ? Yohan est convaincu que non. Il a dû arriver quelque chose à Claire, son épouse. Pour la police, il est suspect. Que s'est-il donc passé ? Connaît-on vraiment ses proches ? Qui est réellement Claire ? Que sait-il de son passé ? Yohan décide d'enquêter de son côté pour la mère de son fils. Une inconnue se présentant comme une amie de Claire affirme que la solution se trouve dans le passé trouble de la disparue. Marlène Charine tient en haleine le lecteur dès les premières pages pour ne jamais le lâcher dans ce roman polyphonique (Yohan, Claire et Mathilde). Elle installe une urgence qui va crescendo grâce à une narration originale. Captivant.

"De ma famille" de Marlène Charine, éditions Calmann-Lévy, 349 pages, 20,90 euros

Couverture du livre "De ma famille" de Marlène Charine. (EDITIONS CALMANN-LEVY)
Couverture du livre "De ma famille" de Marlène Charine. (EDITIONS CALMANN-LEVY)

"La Fin de l'homme" d'Antonio Mercero : mais qui a donc tué Jon Senovilla ?

Jon, fils d'un célèbre auteur de romans historiques, est tué d'un coup de poignard dans le ventre en face de la maison de sa fiancée. Pour enquêter, Sofia Luna, inspectrice de police madrilène jusqu'ici prénommée Carlos. C'était sa première journée de travail en tant que femme. La policière transgenre s'était imaginée autrement ce jour-là. Grâce à une écriture incisive, redoutablement efficace et non dénuée d'humour, Antonio Mercero offre aux lecteurs une enquête à plusieurs tiroirs : quête d'identité, de sens, une intrigue complexe… L'écrivain espagnol questionne le genre et livre une histoire avec de multiples rebondissements. Et c'est dans une atmosphère lourde, faite de pressions de toutes parts, que Sofia doit chercher la vérité. Tout en gérant les conséquences de sa transition.

"La Fin de l'homme", Antonio Mercero, traduit par Sophie Barthélémy, éditions de L'Aube noir, 511 pages, 20,90 euros

Couverture du livre "La Fin de l’homme" d’Antonio Mercero. (EDITIONS DE L'AUBE)
Couverture du livre "La Fin de l’homme" d’Antonio Mercero. (EDITIONS DE L'AUBE)

"La Cabane dans les arbres" de Vera Buck : derrière la carte postale

Dans ce thriller psychologique polyphonique, l'autrice allemande se joue des apparences. Dans un cadre féerique, un couple, accompagné de leur fils de 5 ans, s'installe dans une maison familiale isolée. Le Vasternorrland suédois est comme une carte postale avec son lac et ses paysages. Les vacances s'annoncent idylliques. Jusqu'à la disparition du petit. L'atmosphère devient oppressante, irrespirable. Une scientifique en herbe découvre non loin de là dans les bois le squelette d'un enfant vieux de plusieurs décennies. Les deux affaires sont-elles liées ? Qui est Marla, enfant kidnappée par un homme mystérieux et redevenue sauvage ? En multipliant les points de vue, Vera Buck tisse une toile impressionnante. La vérité a un prix.

"La Cabane dans les arbres", Vera Buck, traduction de Brice Germain, éditions Gallmeister, 454 pages, 24,90 euros

Couverture du livre "La Cabane dans les arbres" de Vera Buck. (EDITIONS GALLMEISTER)
Couverture du livre "La Cabane dans les arbres" de Vera Buck. (EDITIONS GALLMEISTER)

"L'Odeur de la sardine" de Serge Raffy : les fritures du passé

L'effet visuel est saisissant. Un vieil homme se promenait seul un soir sur les quais de Seine près du pont Alexandre III, à Paris, quand il est abattu d'une balle dans la nuque. Une exécution. Le promeneur était un ex-patron de la PJ, au passé trouble. Charles Bayard est un véritable coffre-fort vivant renfermant des secrets de la République et qui s'apprête à tout révéler de son passé sombre. Au-delà de l'enquête délicate menée par un commissaire attachant, L'Odeur de la sardine nous plonge dans un passé toujours vivace, comme si la guerre d'Algérie n'était jamais finie. L'actualité est souvent rattrapée par les démons du passé. L'ancien journaliste du Nouvel Observateur mêle faits historiques et fiction dans ce thriller politique. À l'oubli, Serge Raffy a choisi la mémoire.

"L'Odeur de la sardine", Serge Raffy, éditions Fayard, 256 pages, 22,90 euros

Couverture du livre "L'Odeur de la sardine" de Serge Raffy. (EDITIONS FAYARD)
Couverture du livre "L'Odeur de la sardine" de Serge Raffy. (EDITIONS FAYARD)

"La Honte" d'Arttu Tuominen : internet, cet ami qui vous veut du bien

L'écrivain finlandais est parti de plusieurs constats : les adolescents mal dans leur peau se réfugient sur les réseaux sociaux pour trouver une oreille, une épaule, pour s'épancher. Les parents, dépassés par un quotidien difficile, notamment quand ils sont divorcés, ne sont pas toujours derrière leurs enfants. Internet, une fenêtre ouverte sur le monde, permet donc aux ados d'accéder à une autre vie. Arttu Tuominen dissèque, dans La Honte, la société actuelle marquée par l'emprise du numérique. Derrière les profils des internautes se cachent parfois des prédateurs, des assassins comme ce Peter Pan qui cible des adolescentes pour les isoler ensuite. Avant de commettre l'irréparable. L'inspectrice Linda Toivonen enquête sur la disparition d'une élève de 13 ans. Ce qu'elle découvre au cours de ses recherches lui ouvre les portes de l'enfer. La Honte, une alerte et un avertissement sur les dérives mortifères d'un numérique hors de contrôle.

"La Honte", Arttu Tuominen, traduit par Claire Saint-Germain, La Martinière, 432 pages, 22 euros

Couverture du livre "La Honte" d'Arttu Tuominen. (EDITIONS DE LA MARTINIERE)
Couverture du livre "La Honte" d'Arttu Tuominen. (EDITIONS DE LA MARTINIERE)

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