"Comment j'ai retrouvé Xavier Dupont de Ligonnès" : une autofiction loufoque où Romain Puértolas "résout" l'enquête sur l'homme le plus recherché de France
Romain Puértolas, ancien capitaine de police devenu écrivain, reprend l'enquête sur la disparition de Xavier Dupont de Ligonnès. Un roman documenté, drôle et inventif, qui s'autorise toutes les pistes en s'éloignant volontairement de la réalité.
On reconnaît facilement ses romans à leur titre à rallonge : L'extraordinaire voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea (2013), best-seller publié aux éditions Le Dilettante et adapté au cinéma par le Canadien Ken Scott, ou encore La petite fille qui avait avalé un nuage grand comme la tour Eiffel (2015) paru chez le même éditeur en 2015.
Romain Puértolas récidive dans son dixième roman publié en janvier 2024 chez Albin Michel. Comment j'ai retrouvé Xavier Dupont de Ligonnès s'inspire du drame qui a bouleversé la France entière en juin 2011. Les corps d'une mère de famille et de ses quatre enfants, découverts sous la terrasse de la demeure familiale à Nantes, et le père de famille volatilisé. Le titre d'emblée annonce la couleur : l'énigme autour de cette disparition mystérieuse est enfin résolue.
Enquête rigoureuse et récit fictionnel
Celui qui fut l'un des hommes le plus recherché de France, que l'on a imaginé mort dans la forêt de Roquebrune ou en fuite à l'autre bout du monde, se trouvait tout simplement dans un coin reculé de l'Ariège, dans la maison voisine du narrateur, Romain Puértolas en personne. Ce double de papier de l'auteur, ancien capitaine de police devenu écrivain, se retrouve devant les Assises pour avoir tué le fugitif de 94 coups de couteau à beurre.
Mêlant enquête rigoureuse et récit fictionnel, Romain Puértolas marche dans les pas de Xavier Dupont de Ligonnès. Il cherche par tous les moyens à se mettre dans la peau du fugitif, assassin présumé de cinq membres de sa famille. Il tente de partager ses sensations, son raisonnement pour, qui sait peut-être, retrouver un indice. Toutes les pistes sont explorées et quand l'enquête patine, le narrateur laisse libre cours à son imagination.
Un ton drôle malgré le tragique de la situation
En s'emparant d'un fait divers, qui a longtemps fait la une des journaux, Romain Puértolas s'est fixé un objectif ambitieux. Le magazine Society avait déjà publié à l'été 2020 une enquête remarquable. Ce travail minutieux de plusieurs années mené par quatre journalistes a connu un succès retentissant dans les kiosques.
Si l'idée de se plonger à nouveau dans cette affaire est alléchante et le ton drôle, en dépit du tragique de la situation, le roman souffre de quelques longueurs. Les questionnements obsessionnels du narrateur manquent parfois de souffle. Toutefois, le retournement final inattendu vient rééquilibrer ce "roman-quête".
Extrait :
"– Et que penses-tu du fait que je bouche les trous de l’enquête avec mon imagination ?
Patricia eut ce hochement de tête qui chez elle voulait tout dire.
– Tu sais, à force d’imaginer, tu vas peut-être tomber sur la vérité.
J’adorais la formule. Pouvait-on trouver le vrai en imaginant le faux ? Dans ce cas-là, mon moi policier et mon moi écrivain n’étaient plus en concurrence. Ils devenaient complémentaires. Tout cela était fascinant.
"À force d’imaginer, tu vas peut-être tomber sur la vérité."
Encouragé, et au plus grand désarroi de ma femme, je passai la soirée devant l’ordinateur, plongé dans mon récit. Dans la journée, j’étais le lieutenant de police Romain Puértolas, bien sous tous rapports. Le soir, je me coulais dans la peau d’un fugitif, je m’évadais de mon quotidien. J’étais Xavier Dupont de Ligonnès, Michel Rétif et tous les autres."
"Comment j'ai retrouvé Xavier Dupont de Ligonnès", page 85
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