"Trésors de la musique classique" : d'incroyables manuscrits de la BnF enfin édités en recueil
Une pépite pour les mélomanes : 34 parmi les plus belles partitions manuscrites que conserve la Bibliothèque nationale sont reproduites dans un splendide ouvrage. Ces "Trésors de la musique classique" (BnF-Textuel) nous dévoilent les secrets d'une œuvre et nous offrent les clefs du processus de création. Rencontre avec Mathias Auclair, qui en a dirigé la publication.
Trois pages manuscrites de "L'Appassionata", écriture volcanique de Beethoven, ratures nerveuses, et traces des gouttes de pluie qui ont endommagé la partition. Pattes de mouche à l'encre noire de Marc-Antoine Charpentier un siècle plus tôt, traits si rectilignes des notes sur la portée et menue rature du manuscrit du "Te Deum" du maître baroque français. Quel plaisir d'avoir ces reproductions historiques sous les yeux !
Pour la première fois en recueil
La Bibliothèque nationale de France publie, en coédition avec Textuel, sous le titre "Trésors de la musique classique", un livre regroupant parmi les plus beaux manuscrits musicaux conservés en son sein. Une première. Certes, il existait bien le facsimilé d'œuvres intégrales comme la même "Appassionata" de Beethoven ou "Le Carnaval des animaux" de Saint-Saëns, réservés à certaines bourses (190€ pour ce dernier). Mais jusqu'ici aucune compilation de ce type (vendue bien moins cher, 55€).On s'en réjouit. D'abord parce que le livre est d'une grande beauté, associant à chaque facsimilé de partition manuscrite (il y en 34, issus d'œuvres plutôt connues du grand public et alternant tout type de pièce musicale : lyrique, symphonique, etc.) un éclairage d'un spécialiste sur le compositeur et une analyse sur le document lui-même avec luxe d'illustrations. Ensuite, pour son contenu. On abordait la découverte de ce livre avec l'idée qu'une partition manuscrite offrait pour seul (et déjà immense) intérêt de nous éclairer sur l'œuvre. Or on s'aperçoit que l'histoire même de l'existence de ces documents est passionnante et leur progressive conservation illustre l'évolution du statut d'une œuvre musicale.
Les manuscrits étaient autrefois jetés après publication
A commencer par cette constatation : on ne s'est pas toujours intéressé à la partition manuscrite et on ne l'a donc pas toujours conservée. De fait, des compositeurs phare de l'époque baroque comme Lully n'ont laissé aucun document en dépit de leur position sociale, simplement parce que leur œuvre a été largement éditée. Nul besoin d'en conserver l'ébauche manuscrite. Tout l'inverse chez Charpentier ou Rameau, dont toute la musique n'a pas été publiée. "Aujourd'hui, on est captivé par l'existence d'un manuscrit, et on a du mal à penser que quelques siècles auparavant, les gens le mettaient à la poubelle une fois qu'il était édité", affirme Mathias Auclair, patron de la musique à la BnF, qui a dirigé le livre "Trésors de la musique classique".
Sacralisation
A la fin du XVIIIe siècle, les partitions autographes commencent à être collectionnées, signes d'un intérêt politique (volonté de créer des corpus à caractères nationaux) et de l'éclosion d'un marché. Le compositeur pivot de cette évolution est Beethoven. "A sa mort, on vend ses autographes, et on sait qu'il y a des collectionneurs qui viennent", raconte Mathias Auclair. Et avec Mozart, la collection frôle carrément la sacralisation : acquis en 1855 par la cantatrice star de l'époque Pauline Viardot, le manuscrit du "Don Giovanni" est placé dans un coffret-reliquaire à décor néogothique spécialement fabriqué pour lui ! Il est aujourd'hui la pièce maîtresse de la BnF… et du livre.
Que racontent les manuscrits ?
Les manuscrits conservés sont le témoignage de l'évolution du statut de l'œuvre et du musicien : mais que racontent vraiment ces documents ? "Certains manuscrits sont essentiels pour connaître non seulement l'œuvre – ils en sont parfois l'unique témoignage – mais aussi la manière dont le compositeur l'a composée", dit Mathias Auclair."Même le fameux manuscrit de 'Don Giovanni', considéré par beaucoup de musicologues comme un manuscrit qui ne sert à rien - on estime qu'on sait déjà tout de l'œuvre - en réalité raconte beaucoup de la manière dont Mozart procède", renchérit Auclair.
La probable manipulation de Stravinsky
Un autre manuscrit qui en apprend beaucoup sur la conception de l'œuvre est celui du "Sacre du Printemps". Pour le livre ont été sélectionnées les esquisses, d'une extraordinaire beauté graphique. "C'est un document captivant", avoue Mathias Auclair, "parce qu'on rentre dans la tête de Stravinsky, c'est un document de toute première main pour comprendre comment il a composé le 'Sacre'".
Politique
D'autres manuscrits disent peu sur l'œuvre. C'est par exemple le cas de la "Symphonie alpestre" de Richard Strauss, également sélectionnée dans le livre. Trois pages d'une netteté inédite. "C'est de la belle mise au propre du manuscrit. Mais il n'a pas servi à la direction", ajoute Auclair. C'est en revanche un document fascinant qui illustre la dimension politique que peut avoir un manuscrit. "C'est un cadeau de Strauss à la France, dans ce contexte incroyable où le compositeur était sali par sa compromission avec le régime nazi", explique le directeur à BnF. "L'œuvre avait été composée trente ans avant. Mais il donne un manuscrit à la France en 1945. Evidemment le geste est incroyable !"À regarder
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