Thomas de Pourquery explore l'univers de Sun Ra
Pour son premier album en tant que leader, le saxophoniste et chanteur Thomas de Pourquery rend un hommage volcanique au pianiste et compositeur de jazz américain Sun Ra (1914-1993), avec un groupe formé spécialement pour ce projet, Supersonic. Nous l'avons rencontré.
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Dans ce recueil musical de onze titres, sept sont des arrangements de morceaux de Sun Ra. Thomas de Pourquery y a glissé deux compositions ("Three Months", "Disco 20100"), cosigné l'improvisation "N’Other Blue Man" -anagramme de Herman Poole Blount, le vrai nom de Sun Ra- avec trois membres de Supersonic et repris un titre du saxophoniste Roland Kirk (1935-1977), "Eulipions". Du jazz vocal et instrumental
Éclectique dans son répertoire comme l'était Sun Ra, Thomas de Pourquery glisse des morceaux chantés au milieu d'un jazz instrumental percutant, souvent rock, parfois blues, enrichi de chœurs. Sa voix fait merveille dans le splendide "Love in Outer Space", le chaleureux "Enlightenment" (où l'on entend la chanteuse Jeanne Added en invitée dans les chœurs) et le solennel "Eulipions", un titre de Roland Kirk qui parle de soleil, d'amour et d'espace, lui donnant une place légitime dans l'album.
Pour ce projet qui a failli ne jamais voir le jour (voir l'interview ci-dessous), Thomas de Pourquery a tenu à s'entourer de musiciens d'horizons différents : Laurent Bardainne (saxophone), un de ses "plus vieux frères de musique" qui officie dans le groupe électro rock Poni Hoax, tout comme Arnaud Roulin (claviers), "shaman des sons" ; Fabrice Martinez (trompette), "soliste ultime qui vient de la musique contemporaine" ; Edward Perraud (percussions) et Frédérick Galiay (basse), ces deux derniers formant le duo drum & bass BIG. Autant d'artistes auxquels Pourquery voue une admiration sans bornes.
Les morceaux ont été enregistrés en une prise, dans les conditions du live, dans le huis clos d'une maison louée en Seine-et-Marne. Le résultat est simplement intense et saisissant. La rencontre
Nous avions fait connaissance avec Thomas de Pourquery en septembre 2012, à l'occasion du Brain Festival (pour la lutte contre les maladies neurodégénératives) dont il est le fondateur. Lundi 20 janvier, pour le second entretien avec cet artiste d'une générosité désarmante, place à la musique.
- Que ressent-on après une telle perte ?
- Et ce week-end d’adieu a finalement abouti à un nouveau projet Sun Ra !
- Y avait-il des morceaux communs au projet disparu dans le vol d’ordinateur ?
- Quelle a été votre approche, votre travail, autour de la musique de Sun Ra ?
- Je tiens à souligner que ce n’est pas un hommage à Sun Ra, que j’aime profondément. Je n’ai pas eu l’intention de le revisiter. Parce que dans le mot "revisiter", il y a "re" ! Il s’agit plutôt de "visiter" ! C'est comme jouer des standards. Tous les musiciens de jazz en jouent. Pour moi, il s’agit de vrais standards. J’insiste sur ce point car j’ai toujours été étonné de ne pas voir jouer de morceaux de Sun Ra comme on peut jouer du Gershwin, du Miles Davis ou du Duke Ellington. Le Real Book, fameuse Bible des standards de jazz, ne contient aucun titre de Sun Ra !
- Comment peut-on l’expliquer ?
- Je ne sais pas. Peut-être à cause de cette image qui le poursuit. Il a touché à tellement de choses que pour les gens, les petites perles de génie d’écriture comme "Love in outer space" sont noyées au milieu de 12.000 morceaux de free jazz… Alors qu'en vérité, il a fait des albums, des recueils de compositions incroyables. Mais toujours, stylistiquement, assez différents. Chez Sun Ra, même au sein d’un album, ou pendant ses concerts, paraît-il - puisque je n’y ai jamais assisté - on pouvait passer du super free à la pop, en passant par la musique africaine, le jazz à la Duke Ellington dont Sun Ra était un grand fan.
- Complètement. Je pense que c’est quelque chose qui peut représenter la musique de Sun Ra. Cette notion de transe, de musique répétitive, assez étonnamment d’ailleurs puisqu’il a cette image du mec qui faisait du "free imbitable" ! Alors qu’il a vraiment touché à tous les styles. Il a inspiré Joy Division. Le batteur, qui était un fou de Sun Ra, a piqué le pattern rythmique de "The Perfect Man". Ce pattern préfigure la new wave. Pour revenir à sa musique, c'est vraiment quelque chose qui fait du bien. C’est étonnant. Sun Ra disait qu’il était né sur Vénus, mais pour moi c’est le plus terrien, le plus humain des compositeurs.
- Mais Vénus, ça signifie donc "amour"…
- Bah oui, il ne parle que de ça dans ses paroles de chansons, d'amour, d'énergie, des choses les plus belles et simples du monde. C’est pourquoi je suis très étonné de voir qu’on ait une image de Sun Ra un peu sectaire, ou farfelue, d’un mec qui vivait en communauté avec ses musiciens. Il vivait simplement en communauté par moments pour faire de la musique ! Comme Frank Zappa, Duke Ellington, énormément de musiciens ! Cela peut aussi m’arriver, c’est tout à fait normal. Quand on écoute "Love in Outer Space", c’est un médicament ! Sun Ra, c’est sans doute un enfant de Vénus pour de vrai. J’y crois !
(Propos recueillis par A.Y.)
Mercredi 28 mai à Coutances, pour Jazz sous les Pommiers
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