"L'Affaire Makropoulos" : une reprise sous le signe de King-Kong et de Marilyn
Reprise à l’Opéra Bastille d’un spectacle dont on avait beaucoup parlé il y a six ans, surtout pour la mise en scène (une de ses premières en France) de Krzysztof Warlikowski. Angela Denoke était alors une flamboyante Emilia Marty. Aujourd’hui c’est Ricarda Merbeth qui la remplace et c’est… une femme, Susanna Mälkki, qui dirige, pour la deuxième fois dans l’histoire de l’Opéra de Paris !
C’est l’avant-dernier opéra(1926) de Leos Janacek, qui mourra deux ans plus tard. Musique d’une jeunesse incroyable chez un homme de plus de soixante-dix ans et quasi conclusion d’une décennie qu’il consacre à l’opéra et qui fait de lui un des créateurs majeurs du XXe siècle dans ce domaine.
Et pourtant cela fait peu de temps qu’on représente Janacek dans le monde entier. Est-ce le tchèque, langue peu pratiquée par les chanteurs, et impossible à traduire tant musique et texte, chez Janacek, sont intimement liés? Est-ce ce langage si personnel (on reconnaît Janacek au bout de deux mesures) ? Ce mélange de folklore, de rythmes décalés, de sonorités acides (Janacek mêle ou oppose comme personne le son des vents (clarinettes, hautbois) et celui des cuivres (trompettes, trombones)), de puissance et de nostalgie? Janacek, c’est l’énergie faite musique. Les plus grands chefs (Boulez, Rattle) l’ont mis aujourd’hui à leur répertoire.
Susanna Mälkki est un grand chef
Il faut donc un chef à cet « Affaire Makropoulos ». Et Susanna Mälkki est un grand chef. On est heureux de l’entendre ailleurs que dans le répertoire très contemporain qui l’a fait connaître (elle dirigeait l’Ensemble Intercontemporain, fondé par Boulez, jusqu’à cette année). Elle réussit l’idéal : rendre sensible la modernité de l’oeuvre (les cuivres de l’orchestre ont un peu de mal à s’y mettre) en n’oubliant jamais ni sa beauté sonore ni son lyrisme, avec une précision rythmique qui n’est pas le plus simple de cette musique.
En 2007 on découvrait quasiment Krzysztof Warlikowski en même temps que cette mise en scène. J’avais gardé en mémoire des images frappantes : Emilia Marty, l’héroïne, dans la main d’un immense singe sosie de King-Kong, Emilia Marty en Marilyn Monroe, la projection en fond de scène, pendant l’ouverture, d’archives émouvantes de Marilyn et, dans les interludes, d’une autre icône, Gloria Swanson dans « Boulevard du crépuscule ».
Une Marilyn de pizzeria
Il faudrait, pour nous accrocher, être pris par la main, à défaut de l’être par la mise en scène, comme on l’était il y a six ans par Angela Denoke qui jouait admirablement le détachement ironique de l’immortelle blasée. Or Ricarda Merbeth (superbes aigus mais la voix s’estompe à partir du médium) incarne une brave fille un peu popote, absolument pas une Marilyn, sinon de pizzeria.
Et puis soudain, démasquée, Emilia Marty comprend qu’elle va mourir. Enfin. Et là Merbeth donne tout : l’ironie amère, le cynisme, le soulagement, la nostalgie, sur un décor de piscine à mosaïques bleues superbement éclairé, pendant que Mälkki et l’orchestre se déchaînent. Rideau. Après 337 ans, Emilia Marty ensorcelle encore le mâle que je suis. Mais de justesse. Les autres mâles (ceux qui chantent) sont globalement très bien.
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