Disiz : "C'est devenu une loi ! Si t'es pas Charlie, t'es suspect !"
Le rappeur Disiz, de retour lundi avec un dixième album, regrette que la "tragédie de Charlie" Hebdo soit parfois devenue une "ligne de démarcation" entre les Français et appelle à vraiment "se parler", quelle que soit sa religion.
Disiz, qui faisait partie d'un collectif de rappeurs à l'origine, en 2013, d'une chanson controversée visant dans un couplet Charlie Hebdo, n'a pas défilé le 11 janvier avec les millions de manifestants scandant "Je suis Charlie". Bien que "dévasté" par l'attentat des frères Kouachi, comme il l'a écrit le jour-même du drame sur les réseaux sociaux, il ne se reconnaissait pas dans cette marche.
"Je n'ai pas défilé et pourtant j'étais triste, j'avais la même tristesse que tout le monde", explique à l'AFP celui qui s'est fait connaître à ses débuts (en 2000) sous le nom de Disiz La Peste, avec des titres plutôt légers et humoristiques comme "J'pète les plombs".
"Mais j'ai ressenti une forte hypocrisie. C'était à vomir pour deux raisons", continue le rappeur d'Evry (Essonne), qui cite "l'hypocrisie de ces chefs d'Etat africains qui, dans leur propre pays, bafouent la liberté d'expression" et "l'hypocrisie des médias" accusés d'avoir "mis en scène" le défilé parisien en "faisant croire" que ces dirigeants défilaient au milieu de tout le monde et non entourés d'un épais cordon de sécurité.
"Etre" ou "ne pas être" Charlie, Disiz sait le sujet ultra-sensible mais refuse les réponses à l'emporte-pièce et réclame de la nuance. "On a utilisé la tragédie de Charlie pour faire une ligne de démarcation entre les Français... C'est devenu une loi! Si t'es pas Charlie, t'es suspect, mais qu'est-ce que ça veut dire?", ajoute le rappeur, rockeur à l'occasion, récemment comédien et écrivain, qui a toujours refusé les "cases".
"Il ne mange pas de porc. C'est grave ?"
Ce métis de 37 ans, né d'un père sénégalais et d'une mère "française, blanche, picarde", se voit "Français, comme tout le monde": "Je vais acheter ma baguette, j'emmène les enfants à l'école, je me pose les mêmes questions, sauf que je suis musulman", explique ce père de famille de quatre enfants.Dénonçant les éditorialistes ou les couvertures de magazines qui "annexent l'avis des gens", Disiz estime que le plus important est maintenant de "se parler vraiment", quelles que soient les religions, et "avant de se parler, de se regarder et accepter que l'autre est différent". "Il ne mange pas de porc, c'est grave? De la même manière, l'autre boit du vin, c'est grave? Bien sûr que non !", dit-il.
Volontiers engagé, le rappeur a récemment participé à un film associatif relatant le récent procès de policiers poursuivis (et finalement relaxés) pour non-assistance à personne en danger après la mort de Zyed et Bouna, en 2005, à Clichy-sous-Bois. Il a aussi réuni plusieurs rappeurs au Bataclan, à Paris, le 19 mai, pour le 90e anniversaire de la naissance de Malcolm X, dont il souhaite aussi faire rééditer la traduction française de l'autobiographie.
Ces préoccupations militantes ne transparaissent toutefois pas beaucoup dans le rap actuel, décomplexé, de Disiz. Son dixième album, "Rap machine", privilégie en effet son retour vers une musique "moins prise de tête" et plus "accessible" que ses derniers disques où le rappeur se battait contre l'étiquette de "rappeur marrant" qui lui pesait un peu. Les instrumentaux se veulent plus instinctifs, les textes plus directs. Dans ces titres, on trouve moins de références littéraires et davantage de clins d'oeil au cinéma populaire, à l'image de son clip "Abuzeur" inspiré de "SOS Fantômes".
"Un disque de rap à l'ancienne, sans pour autant en faire un disque passéiste ou nostalgique", résume celui dont la plume lorgne parfois du côté de Renaud, un chanteur auquel il a récemment rendu hommage en reprenant "Laisse béton".
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