Rock en Seine 2025 : Kneecap et Fontaines D.C. ont assuré un final sous le signe de la Palestine, de l'amour et de l'Irlande
Les deux groupes irlandais se sont succédé sur les scènes du festival francilien pour sa dernière journée. Malgré les polémiques autour de Kneecap, la soirée s'est déroulée dans la fête et sans accroc.
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Clap de fin à Rock en Seine dimanche 24 août et la soirée de clôture aura pris des airs de cortège irlandais. Au menu : deux groupes cousins, deux pays séparés par une frontière encore chargée de mémoire, et un même mot d'ordre scandé de scène en scène : Free Palestine. Dans le parc de Saint-Cloud, ça sentait la bière renversée, la poussière soulevée par les pogos, la sueur des fins d'été et les drapeaux claquant dans l'air tiède.
Sur le papier, la scène du Bosquet est dédiée plutôt aux artistes émergents. Dimanche, recevant l'un des groupes les plus attendus, elle rassemblait une marée compressée. Une dizaine de milliers de festivaliers – trop pour l'espace prévu – se sont massés pour voir Kneecap, trio nord-irlandais qui fait rimer rap en gaélique, politique et polémique. Le groupe de Belfast se voit en effet reprocher de faire "l'apologie du terrorisme" après avoir porté lors d'un concert à Londres en 2024 un drapeau du Hezbollah et crié "Vive le Hamas, vive le Hezbollah". L'un des membres du groupe, Mo Chara, fait même l'objet de poursuites judiciaires outre-Manche pour "infraction terroriste".
18h25, la déferlante Kneecap
Polémique oblige, le dispositif policier était renforcé. À l'entrée, contrôles tatillons, sacs fouillés, vêtements inspectés. Lili, la quarantaine, parisienne, a dû retourner son t-shirt floqué "Wanted" où s'affichaient les portraits des trois rappeurs. "Je m'y attendais un peu donc j'avais prévu le coup", raconte-t-elle. "J'ai découvert Kneecap par Fontaines D.C. et par la lutte pro-palestinienne. Ça fait deux ans que je les suis. Moi, je n'appelle pas ça une polémique, ils ne sont pas antisémites, ils soutiennent un peuple en lutte et ça va historiquement avec l'histoire de l'Irlande." Pour ce qui est de la crainte des débordements, elle ajoute, confiante : "C'est un festival de Parisiens, je ne pense pas que ça soit le bazar."
Même Outre-Manche, on ne comprend pas les retraits de subventions. Quentin, Anglais venu pour l'occasion, ne cache pas son étonnement devant l'ampleur de la controverse en France : "Ils sont connus depuis longtemps chez nous. Je ne comprends pas trop la polémique ici et maintenant, surtout quand Macron s'apprête à reconnaître la Palestine."
Et puis ça démarre, 18h25 pétantes. Le public crie "Free Palestine", et des slogans antifascistes comme un warm-up militant.
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À leur arrivée sur scène, Kneecap donne le ton : un "Free Palestine" en lettres blanches sur fond noir, encadré de slogans traduits en français. "Israël commet un génocide contre le peuple palestinien." Puis : "Plus de 90 000 personnes ont été assassinées par Israël en 22 mois." Et encore : "Le gouvernement français est complice : il vend et facilite le commerce d'armes à l'armée israélienne." Sur la pelouse, c'est ovation immédiate et "Free Palestine" repris à pleins poumons par des milliers de festivaliers.
Des spectateurs venus du monde entier ont également fait le déplacement, dans le public, on entend de l'allemand, de l'espagnol et évidemment de l'anglais. Olivia, 22 ans, irlandaise, T-shirt vert aux couleurs de l'Irlande, brandit un drapeau palestinien coincé dans ses cheveux entremêlés dans un keffieh. Ses amies portent le maillot vert d'une équipe féminine de foot irlandaise. "On connaît toutes les paroles par cœur", souffle-t-elle. Drapeaux irlandais, keffiehs, et même un drapeau breton, surgissent dans le public.
À mesure que les morceaux s'enchaînent, Kneecap alterne slogans et messages d'amour. Loin du portrait anxiogène dressé ces derniers jours, le set a plutôt l'allure d'une fête. Militante, certes. Mais fête quand même. Le groupe a même tenté de reprendre du Britney Spears, mais ça n'a pas pris et a plutôt provoqué l'hilarité générale. Ainsi pouvait-on lire sur leur compte Instagram avant le concert, ce qui résume bien leur show "Liberté, égalité, keffiehs !".
19h25, migration vers la Grande Scène
À peine le concert achevé, un mouvement de foule impressionnant s'élance vers la Grande Scène. Trente minutes de bousculades pour espérer se rapprocher. Cris agacés – "Arrêtez d'avancer !", "On se fait écraser !", poussière étouffante, sacs écrasés. Mais tout le monde veut être là pour eux : Fontaines D.C.
Contrairement à Kneecap, ce n'est pas la polémique qui attire : c'est que la renommée du groupe irlandais a déjà fait ses preuves, les keffiehs toujours présents se sont mélangés aux T-shirts de concert ou des maillots du Bohemians FC floqués Fontaines D.C. dont le groupe est le sponsor. À moins de trente mètres de la scène, impossible de trouver quelqu'un qui ne chante pas chaque refrain du quintette de Dublin. Comme Valentin, doctorant en histoire culturelle du punk et fan absolu des Dublinois : "Je les ai vus trois fois et, honnêtement, on est deux crans au-dessus en termes de niveau. La voix, le show, la musique. Je m'attendais à du solide, mais là, je suis comblé."
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Le décor est minimaliste, mais chaque détail compte : un drapeau irlandais scotché au micro, un autre, palestinien, posé sur le clavier. Pas de slogans outranciers, mais des symboles discrets et assumés. Et la voix de Grian Chatten, entre rage contenue et lyrisme new wave, qui emplit le parc.
Le chanteur charismatique se balance d'avant en arrière, mi-Alex Turner mi-Liam Gallagher. Entre deux morceaux, il lance un salut tendre à Kneecap, leurs frères du Nord, et des mots pour Gaza. La foule répond par un cri unanime.
Le show traverse toutes les humeurs de leur discographie : passages sombres et brumeux, titres plus secs qui déclenchent des pogos en rafales, mais toujours dans une ambiance fraternelle. On relève son voisin à terre, on tend une bouteille d'eau à l'inconnu d'à côté, on souffle deux secondes avant de replonger dans la vague suivante.
Puis vient le moment suspendu : I Love You. Le tube résonne, repris par des milliers de voix en chœur avec sur les écrans géants des messages pour la Palestine. L'émotion est palpable, presque physique. Bras levés, poings serrés, certains les larmes aux yeux. Au-dessus des têtes, drapeaux irlandais, palestiniens, s'agitent comme une constellation de luttes.
La poussière danse avec les projecteurs, enveloppant la scène d'un voile incandescent qui clôt la séquence gaélique de cette fin de Rock en Seine. Le groupe irlandais s'éteint sur Starbuster, morceau éponyme de l'album nommé aux Grammy Awards 2025. Avec lui, deux concerts, deux visages d'une Irlande en lutte, et un seul cri qui traverse la foule : liberté.
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