Le Sénat enclenche la restitution d'un "tambour parleur" réclamé par la Côte d'Ivoire

Le texte, soutenu par le gouvernement, sera ensuite examiné par les députés. La Côte d'Ivoire demande le retour du tambour "Djidji Ayokwe" depuis 2019.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
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Le Djidji Ayokwe, dit "tambour parleur", emballé après sa restauration par le musée du Quai Branly en 2023. (SUMMUM 3D)
Le Djidji Ayokwe, dit "tambour parleur", emballé après sa restauration par le musée du Quai Branly en 2023. (SUMMUM 3D)

Un "tambour parleur" de 3,5 m et 430 kg, confisqué depuis 1916 par la France et bientôt rendu à la Côte d'Ivoire : le Sénat a enclenché lundi 28 avril le processus de restitution définitive de ce bien culturel réclamé par les autorités ivoiriennes.

À travers l'adoption d'une proposition de loi à l'unanimité en première lecture, la chambre haute entend honorer une promesse d'Emmanuel Macron, qui s'était engagé en 2021 à ce que la France restitue à la Côte d'Ivoire le tambour Djidji Ayokwe, confisqué aux Ebriés (ou Atchans) par les autorités coloniales françaises.

La Côte d'Ivoire avait demandé dès 2019 le rapatriement de cet objet rituel, qui a déjà fait l'objet en 2022 d'une cérémonie de désacralisation préalable aux travaux de restauration de ce "tambour parleur" sous l'égide du musée du Quai Branly.

En parallèle, la Côte d'Ivoire a engagé d'importants investissements pour permettre au musée des civilisations d'Abidjan (MCCI) d'accueillir ce tambour. En raison d'un principe d'inaliénabilité des collections publiques, il est nécessaire d'adopter une loi d'exception pour "déclasser" ces biens culturels et permettre leur restitution.

Pas de loi-cadre pour la restitution des biens culturels

Jusque-là, le tambour pillé pendant la colonisation devait être rendu sous la forme d'un "dépôt", un prêt longue durée. Une option insuffisante pour le Sénat. "Il est impératif d'aller plus loin et de rendre à la Côte d'Ivoire la pleine et définitive propriété du tambour", a insisté le sénateur Les Républicains Max Brisson, rapporteur sur le texte du centriste Laurent Lafon. "Ce faisant, nous répondrons à l'attente légitime de la communauté atchan et au-delà de toute la nation ivoirienne", a-t-il ajouté.

Le texte est désormais transmis à l'Assemblée nationale, où il pourrait prospérer rapidement en raison du soutien que le gouvernement lui a apporté lundi par la voix de la ministre de la Culture Rachida Dati, celle-ci saluant "une avancée importante".

En 2017, Emmanuel Macron s'était engagé à accélérer les restitutions des biens coloniaux vers l'Afrique, une promesse notamment concrétisée fin 2021 par le retour au Bénin de 26 œuvres du trésor royal d'Abomey spoliées par l'armée. Mais ces rapatriements se font au compte-goutte, en l'absence d'une loi-cadre promise par le chef de l'État pour faciliter ces processus, actuellement au point mort au Parlement.

Si de nombreux sénateurs ont appelé à reprendre ce chantier, Rachida Dati a promis de "poursuivre le dialogue" tout en évitant "d'ouvrir la porte à une instrumentalisation des débats" sur le sujet explosif de la colonisation. Pièce centrale de l'art musical de l'ethnie ivoirienne des Ébriés, le "tambour parleur" Djidji Ayokwe servait notamment à prévenir des dangers, mobiliser pour la guerre ou convoquer les villages à des cérémonies.

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