Plus engagées, les séries algériennes du ramadan mises en lumière à Séries Mania

Au-delà des séries du ramadan, l'Algérie est représentée pour la première fois à Séries Mania avec "El'Sardines", format court franco-algérien sur l'émancipation d'une trentenaire, réalisé par la poétesse Zoulikha Tahar.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
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Photo d'affiches du festival Séries Mania sur les côtés de la gare de Lille Flandres, le 18 mars 2025. (SAMEER AL-DOUMY / AFP)
Photo d'affiches du festival Séries Mania sur les côtés de la gare de Lille Flandres, le 18 mars 2025. (SAMEER AL-DOUMY / AFP)

Les séries du ramadan, produites pour ce mois de jeûne, sont une institution dans les pays musulmans, notamment en Algérie dont les productions, plus engagées sur les sujets de société, ont été mises à l'honneur au festival français Séries Mania.

Drames sentimentaux, comédies familiales, thrillers haletants... Ces feuilletons quotidiens fleurissent sur les chaînes et sur YouTube pour accompagner les familles après l'iftar, la rupture du jeûne au coucher du soleil. "C'est un rendez-vous incontournable parce que c'est le moment où on partage des histoires" et "où la famille se réunit", a expliqué l'actrice algérienne Zahra Harkat, lors d'une conférence. "En France ou en Europe, il y a des séries et films de Noël, il y a un esprit un peu joyeux, convivial... C'est un peu ce type d'esprit qu'on retrouve pendant le ramadan", a-t-elle ajouté.

"Pas de sujets interdits"

Cette tradition a aussi des adeptes dans l'Hexagone. Installée dans le sud de la France, Malika, 31 ans, née en France de parents algériens, revient à Lille chaque année pour passer le ramadan avec sa mère et sa fratrie... et regarder ces séries.

"C'est un peu institutionnel chez nous", raconte à l'AFP cette comédienne, qui a pu "apprendre plein de mots d'arabe" grâce aux séries algériennes. "Ma mère les regarde beaucoup, ça lui rappelle le pays dans lequel elle a grandi" et qu'elle a fui pendant la décennie noire, dans les années 1990, ajoute la jeune femme qui n'a pas souhaité donner son nom de famille.

Cette année, Malika suit Al Ard (ou Alardh, la terre), qui porte un message politique sur la colonisation française et les terres agricoles. Auparavant, elle a été marquée par Babour Ellouh (bateau de bois), sur l'émigration clandestine.

"Les séries du ramadan existent depuis très longtemps en Algérie, mais il y a eu une évolution technique et dans les thématiques traitées ces dix dernières années", explique Zahra Harkat, vue notamment dans une série parlant de corruption.

Une évolution favorisée par l'arrivée de chaînes privées au début des années 2010 et la concurrence des plateformes, qui ont poussé les producteurs à proposer des genres variés, s'éloignant des "séries comiques assez courtes ou des drames un peu soap opera", analyse l'actrice.

"On prend les sujets plus frontalement", abonde pour l'AFP son compatriote Yahia Mouzahem, réalisateur d'El Dama (Eddama), carton en 2023. Cette série, qui a fait débat en explorant le trafic de drogue dans Bab el Oued, quartier populaire d'Alger, a notamment été saluée pour son réalisme.

"Il n'y a pas de sujets interdits", a assuré le réalisateur lors de la conférence. Mais il faut rester "pudique" et "respectueux" des sensibilités, a-t-il souligné, rappelant que les séries du ramadan rassemblent "toute une famille, du grand-père aux petits-enfants de 5 ans". Par exemple, "il n'y a pas de scène sexuelle, même si la sexualité peut être abordée", relève Malika.

Même tendance en Tunisie

On observe la même tendance en Tunisie, où la série la plus populaire cette année est la suite de Ragouj, créée l'an dernier, qui évoque le despotisme d'un maire et la corruption administrative sous la forme d'une comédie satirique.

Fetna traite, elle, des conflits d'héritage dans les familles, en plus d'aborder le trafic d'antiquités. Les phosphates, principale richesse du pays, sont au cœur de la série historique Oued El-Bey qui relate les mauvais traitements infligés aux ouvriers du bassin minier de la région de Gafsa (sud-ouest) sous la colonisation française.

Fort du succès d'El Dama au Maroc, en Tunisie ou encore en Égypte, Yahia Mouzahem a bon espoir de voir les productions algériennes s'exporter davantage, malgré des budgets "très éloignés" de ceux des plateformes, comme le font depuis longtemps les séries égyptiennes.

L'acteur et producteur français Sofiane Zermani, connu dans le rap sous le pseudonyme Fianso, a annoncé à l'AFP monter "une énorme série avec comédiens algériens, réalisateurs algériens et (l'actrice) Lyna Khoudri sur la rédaction de l'organe de presse Révolution africaine dans les années 1960 et 1970 à Alger", à destination d'une plateforme américaine.

Au-delà des séries du ramadan, l'Algérie est représentée pour la première fois à Séries Mania avec "El'Sardines" (arte.tv), format court franco-algérien sur l'émancipation d'une trentenaire, réalisé par la poétesse Zoulikha Tahar.

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