Comment le théâtre de l'Odéon est devenu la scène des précaires, après trois semaines d'occupation
Le mouvement d'occupation, lancé au théâtre de l'Odéon à Paris le 4 mars, a été suivi par près de 100 salles à travers la France.
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Au Théâtre de l'Odéon, on chante, on danse, on rit. Une scène qui peut sembler banale, si ce n'est que depuis trois semaines, ses acteurs occupent les lieux pour alerter sur la situation des précarisés du Covid.
Un petit air de déjà vu puisque l'Odéon a été occupé pendant un mois en mai 68, ainsi qu'en 1992 et 2016 pour protester contre une réforme du régime des intermittents. Mais le mouvement actuel, parti le 4 mars de ce théâtre national situé à Paris, a fait boule de neige avec près de 100 salles occupées à travers la France.
"On ne lâche rien"
Sur la façade, le message est clair : "On ne joue plus, on lutte", lit-on sur une banderole. "Plus de 500 heures qu'on occupe l'Odéon et on ne lâche rien", répètent la cinquantaine occupants du lieu interviewés par l'AFP jeudi. "Tant qu'ils (le gouvernement) ne répondent pas, nous serons présents sur tout le territoire, la mayonnaise prend", renchérit Rémi Vander-Heym, régisseur de théâtre et représentant syndical de 53 ans.
Dans une ambiance bon enfant, on filme un clip musical sur une revendication phare : le retrait de la réforme de l'assurance chômage qui entre en vigueur le 1er juillet et qui menace de diminuer les allocations mensuelles des intermittents de l'emploi (guides conférenciers, employés dans la restauration, l'événementiel etc.).
Dans le café à l'intérieur du théâtre, les brochures de spectacle - figées dans le temps depuis la fermeture des salles le 30 octobre - ont laissé la place aux revues de la CGT Spectacle. La statue de Corneille porte le drapeau de la confédération ; Racine, lui, brandit le prospectus "Occupation Odéon 2021". Une autre statue est affublée d'un gilet jaune.
Camping et Agora
Sur un chevalet de conférence, on note l'ordre du jour, qui comprend au quotidien deux assemblées générales et une "agora" à 14H00 devant des gens rassemblés sur la place de l'Odéon, parfois en musique et en danse. Samedi 27 mars, des musiciens, dont certains de l'Opéra de Paris, vont jouer devant le théâtre.
On dort dans les loges et ailleurs, sur des matelas ou dans des sacs à couchage. Médicaments, nourriture, serviettes de bain et vêtements sont répartis sur les tables du café, une seule douche à partager, tours de garde 24h sur 24 et respect d'un protocole sanitaire, Covid oblige.
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Jamais plus d'une cinquantaine à l'intérieur, avec parfois de nouveaux venus qui prennent le relais. Des commissions d'approvisionnement et de communication ont été créées; il y a même une commission "inter-occupation" en charge des discussions avec les autres théâtres occupés.
"C'est un peu se réapproprier les lieux publics, on est chez nous quelque part", affirme Marie-Noëlle Thomas, guide conférencière de 59 ans. Celle qui accompagnait les touristes au Louvre ou les châteaux de la Loire fait aujourd'hui "la visite guidée" de l'Odéon aux nouveaux venus pour leur expliquer les règles à observer.
"Il y a des suicides"
Mais au-delà de l'anecdote, la guide conférencière fustige la réforme qui selon elle va mettre "à genoux" ceux déjà précarisés par la crise sanitaire.
"Dans notre secteur, il y a des gens qui ont vendu leur maison, il y a des suicides", affirme-t-elle. "J'ai obtenu un job comme gardienne de square, ça me permet de payer mes factures et (...) nourrir ma fille étudiante". Elle estime avoir de la chance en comparaison avec des collègues qui ont fait un "burn out".
Spécificité française, le régime des intermittents concerne 120 000 artistes et techniciens indemnisés chaque année avec comme condition d'avoir travaillé 507 heures sur 12 mois.
Emmanuel Macron leur a accordé une année blanche qui expire en juillet, mais ils réclament une deuxième année blanche, à cause de la prolongation de la crise. Quant aux millions d'euros versés pour la culture, les occupants estiment qu'ils ne profitent pas aux plus précaires.
Et les intermittents de l'emploi, eux, ne bénéficient pas d'un régime spécial et s'estiment les grands perdants.
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