Vendanges en Champagne : Une main d’œuvre exploitée ?
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Le champagne est un symbole d’excellence à la française. Pourtant, les coulisses de fabrication de cette boisson festive sont parfois moins prestigieuses. Dans certains cas, les vendangeurs sont hébergés illégalement, alors que d’autres sont des travailleurs non déclarés. Enquête sur les conditions de travail de ceux qui récoltent les raisins de ce vin pétillant.
Situé au pied des vignes, un campement de fortune a été installé sur un champ au bord d’une route dans la Marne. Des camionnettes et quelques tentes s’y trouvent, mais ici, il n’y a pas d’électricité et le seul point d’eau potable est une cuve en plein soleil. Nous y rencontrons une dizaine de vendangeurs : des Tchèques, des Italiens, des Polonais… Ils disent avoir un contrat de travail et être payés au Smic français. Ils affirment être venus en Champagne par leurs propres moyens. N’ayant pas trouvé de logement, le vigneron qui les emploie leur a proposé de camper sur un terrain. Certains dorment même dans leur camionnette, chaque soir, après 10 heures de travail intense.
Un campement interdit par le Code Rural
Cette installation est interdite par le Code Rural, car le terrain sur lequel ils sont hébergés appartient à leur employeur. Or, un patron est tenu de respecter des normes bien précises à partir du moment où il s’engage à loger ses salariés chez lui. Parmi les critères, il faut une chambre non-mixte d’une superficie minimale de neuf mètres carrés auxquels s’ajoutent six mètres carrés par occupant supplémentaire. Il faut également un sanitaire et une douche par groupe de six salariés. Enfin, l’hébergement sous tente est interdit. La responsable de ces vendangeurs n’a pas souhaité nous recevoir. Par téléphone, elle se dit consciente du problème mais affirme qu’elle n’a pas d’autre choix.
On n’a tellement trouvé personne que la seule condition pour que [les vendangeurs] viennent c’était qu’ils aient au moins de quoi poser une tente.
Un vigneron à l'Œil du 20H
Ces dernières années, la Champagne a plusieurs fois été citée dans les journaux pour « Esclavage moderne » lors des vendanges, ou encore en 2021, avec « 8 personnes mises en examen pour avoir fait travailler illégalement des vendangeurs ». Souvent, des sociétés prestataires sont pointées du doigt, car certaines font appel à des travailleurs étrangers pas toujours déclarés. A 30 kilomètres de Reims, nous rencontrons des dizaines de vendangeurs turcs et bulgares hébergés dans une maison de centre-ville par un prestataire viticole. Nous demandons à cinq d’entre eux s’ils ont signé un contrat de travail et s’ils savent combien ils seront payés, tous nous répondent « Non ».
On sera payés au kilo, je ne sais pas trop… L’argent sera envoyé en Bulgarie mais c’est tout, on n’en sait pas plus.
Un vendangeur bulgare à l'Œil du 20H
Ces dernières semaines en Champagne, l’inspection du travail a contrôlé 63 entreprises. Une dizaine de situations de travail illégal ont été constatées. Un inspecteur du travail nous confie : « Il arrive que des prestataires établis en France ou à l’étranger ne déclarent pas leurs salariés pour ne pas payer de cotisations sociales, voire ne pas les rémunérer au Smic français. Ca leur permet de tirer le prix de leurs prestations vers le bas.»
De son côté, le représentant des vignerons de Champagne nie toute responsabilité des domaines viticoles dans ces dérives. « Ce sont des sociétés de prestataires et c’est là le problème, parce que ce ne sont pas les vignerons eux-mêmes qui organisent ça. Il y a des sociétés qui se mettent en place, avec des gens qui sont en effet plus ou moins honnêtes. »
La semaine dernière, des représentants syndicaux des vendangeurs ont été reçus au ministère du Travail pour évoquer ces problématiques. Sollicité, le ministère n’a pas souhaité faire de commentaire.
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