: Reportage "C'est un véritable business qui s'est installé" : comment Enedis traque les compteurs d'électricité trafiqués
Enedis a lancé une vaste opération de contrôle pour détecter les fraudes aux compteurs Linky, notamment dans les commerces. Le phénomène, en forte hausse, représente un coût important pour l’ensemble des consommateurs.
Pris la main dans le sac. Ou plutôt dans la prise. Pour lutter contre la fraude aux compteurs Linky, Enedis renforce ses contrôles face, notamment, à l'augmentation des vols d'électricité. Ce jour-là, devant des employés stupéfaits, les deux agents d'Enedis, accompagnés de policiers, rentrent dans un fast-food à Champigny-sur-Marne, dans le Val-de-Marne.
Le commerce est soupçonné de voler l'électricité. Ils balayent alors d'un regard les lieux à la recherche du boîtier Linky. "J'aurais besoin de voir votre compteur d'électricité", demande l'un des deux agents. Le gérant n'est pas sur place, un salarié le contacte par téléphone. Il ne se montre d'abord pas coopératif. "Je vais vous passer les forces de l'ordre", prévient l'un des agents. Finalement, le patron abdique.
"Une grosse partie de l'électricité n'est pas enregistré"
Le boîtier est rapidement localisé et inspecté par les agents Enedis. Et une fois ouvert, le constat est sans appel : le compteur a bien été trafiqué. "Je constate trois fils bleus qui ont été raccordés entre l'entrée et la sortie du compteur. Ce qui veut dire qu'il y a une grosse partie de l'électricité qui passe par ces fils et qui n'est pas enregistré", nous explique l'un des agents Enedis. Cette manipulation lui permet de diminuer de 80% sa facture d'électricité. "Cela veut dire qu'il y aura une grosse baisse de la consommation électrique et une grosse baisse au niveau des factures, c'est-à-dire qu'il y a un réel bénéfice pour le client", poursuit l'agent.
De plus en plus de particuliers ou des commerçants trafiquent leur compteur Linky, ces boîtiers qui permettent de relever votre consommation d'électricité, pour réduire leur facture. Pour endiguer ce phénomène, Enedis a lancé mardi 8 juillet une vaste opération de contrôles pour traquer les compteurs trafiqués dans les entreprises. Plus d'une centaine de commerces ont été inspectés un peu partout en France, principalement dans le secteur de la restauration.
e gérant frauduleux à Champigny s'expose à des sanctions lourdes jusqu'à 75 000 euros d’amende pour vol d’énergie, et jusqu'à 375 000 euros pour escroquerie (ces montants pouvant être multipliés par cinq pour les personnes morales). Ces délits sont également punis de peines pouvant aller jusqu’à 5 ans d’emprisonnement.
"Une propagation virale du phénomène de fraude"
Pour traquer ces voleurs de courant, le gestionnaire du réseau électrique met en place des processus. Au siège, dans le quartier d'affaires de la Défense, une cellule de veille est en cours. Audrey Hudé, cheffe de projet, suit sur son écran en temps réel des alarmes automatiques : "Pour chaque ouverture de compteur, on va avoir une alerte sur une consommation qui a brutalement chuté sur une durée longue. Chaque data-analyste a une liste de traitements et va analyser et pouvoir dire celui-ci, il y a une vraie suspicion, ou celui-ci, ça semble normal."
Ces alertes proviennent d'un peu partout en France, aussi bien de commerçants que de particuliers. "À partir de fin 2022, on a eu une propagation véritablement virale du phénomène de fraude", explique Bertrand Boutteau, en charge du programme de lutte contre la fraude, qui n'hésite pas à parler d'un "véritable business". Plus de 100 000 cas de fraude ont été identifiés depuis 2022, impliquant tous types de clients confondus. Un phénomène dû en partie à la hausse des prix de l'énergie mais aussi aux réseaux sociaux sur lesquels on trouve des tutoriels.
"Des personnes vous proposent, moyennant une somme de 400, 500 ou 800 euros, de faire une intervention sur votre compteur."
Bertrand Boutteauà franceinfo
Enedis veut doubler le nombre de ses agents patrouilleurs en passant de 250 à 500 d'ici 2026 pour lutter contre ces fraudes qui ont un coût, non seulement pour l'entreprise mais aussi pour l'ensemble de ses clients. "Il faut savoir que la fraude à l'électricité, ça coûte plusieurs centaines de millions d'euros par an à l'ensemble des consommateurs, indique Bertrand Boutteau. L'électricité est volée à Enedis, une entreprise régulée, et du fait des mécanismes de régulation, à la fin, cela se retrouve dans le tarif d'utilisation d'électricité."
Outre l'aspect illégal, Enedis rappelle que ces pratiques frauduleuses sont aussi très dangereuses. Elles peuvent présenter des risques d'électrocution ou d'incendie.
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