"Une mine d'or" : plus de six ans après le Grand débat national, les données des contributions citoyennes analysées grâce à l'intelligence artificielle
"Traiter ces données, c'est respecter la demande de reconnaissance qui a été exprimée", estime sur France Inter Jérémie Peltier, co-directeur général de la Fondation Jean-Jaurès qui a contribué à analyser les résultats. Il décrit une population française "très mature".
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Plus de six ans après le Grand débat national qui a fait suite au mouvement des "gilets jaunes", la Fondation Jean-Jaurès et Arlequin AI publient mercredi 11 juin un rapport présentant ce qui ressort de ces contributions citoyennes.
Pour analyser les très nombreuses données des cahiers de doléances, Hugo Micheron, docteur en sciences politiques et cofondateur d'Arlequin AI, et ses équipes ont utilisé l'intelligence artificielle. Les résultats ont ensuite été analysés par la Fondation Jean-Jaurès. Il en ressort notamment "le souhait d’associer davantage le peuple aux grandes orientations politiques et à la décision publique en promouvant une démocratie plus participative, transparente et proche des réalités locales".
"La plus grande remontée depuis 1789"
"C'est une mine d'or, il y a plein de pépites. Et surtout, le fait de traiter ces données, c'est respecter la demande de reconnaissance qui a été exprimée" par les Français à cette période, souligne sur France Inter Jérémie Peltier, co-directeur général de la Fondation Jean-Jaurès. "Le fait de traiter ces sujets-là, c'est répondre au grand sentiment de frustration qu'ont pu ressentir une part très importante de Français, qui est à mon avis toujours présent". "Pour moi, c'était un devoir de la société civile", abonde Hugo Micheron.
Pour rappel, le 15 janvier 2019, à la suite du mouvement des "gilets jaunes", l'exécutif français a lancé la plus grande consultation publique en Europe. "En moins de trois mois, plus de deux millions de contributions citoyennes sont collectées : 1,9 million déposées sur une plateforme numérique dédiée et 200 000 contributions manuscrites regroupées dans 19 900 cahiers". En tout, 400 000 répondants ont pris part à une consultation en ligne de plus de 80 questions. Il s'agit donc de "la plus grande remontée d'information publique volontaire et spontanée depuis 1789", indique le rapport. Malgré l'importance de ces données, "l'absence d'outil suffisamment puissant pour permettre l'exploration de toute la richesse du corpus des réponses collectées" ne permettait pas de les analyser totalement.
Hugo Micheron et le CNRS ont développé ces derniers mois "des outils capables de traiter des volumes de données exceptionnels, tout en gardant la granularité", la "finesse" de l'analyse, explique l'enseignant-chercheur, co-auteur du rapport. Ce que donne à voir cette mine d'or, c'est une population française très mature sur beaucoup de sujets."
"Il y a pas mal de points de convergence, qui montrent que la population française n'est pas forcément une population d'énervés qui veulent renverser la table."
Jérémie Peltier, co-directeur général de la Fondation Jean-Jaurèsà France Inter
"Sur les questions écologiques, démocratiques ou de fiscalité, on voit un niveau de connaissance et de réflexivité assez élevé", note Jérémie Peltier.
"On ressent une société française très fracturée - et elle l'est à certains égards - mais il y a des choses qui, spontanément, émergent, comme l'école, l'hôpital. Une priorité, avec les mêmes désirs pour qu'il y ait les moyens pour avoir ce service public-là de qualité, et que ces moyens soient bien répartis", ajoute Anne Rosencher, chroniqueuse sur France Inter et directrice déléguée de la rédaction de L'Express, qui publie mercredi des extraits du rapport sur son site.
Une grande défiance vis-à-vis de la politique
Il ressort aussi de l'analyse des cahiers de doléances des questions sur la représentation des Français, une "grande demande de démocratie" et une "grande défiance vis-à-vis de la politique d'une façon générale", souligne Jérémie Peltier, avec un terme qui revient beaucoup : "sectarisme". Beaucoup de citoyens dénoncent "l’écart entre les promesses électorales et les actes, une fois les élus parvenus au pouvoir, ainsi que l’influence excessive des lobbys et des intérêts partisans dans les décisions publiques". En revanche, les participants expriment une confiance considérable envers les élus locaux – notamment les maires et conseillers municipaux – considérés comme "accessibles, proches du terrain et soucieux du bien commun", indique le rapport. Selon l'analyse de la Fondation Jean-Jaurès, de nombreux Français appellent "à l’organisation fréquente de référendums, à différentes échelles, sur des sujets majeurs tels que l’économie, la santé, l’environnement ou la fiscalité". "Un des éléments les plus importants est qu'il n'y a pas de ras-le-bol fiscal", poursuit Jérémie Peltier.
"Ce qui revient énormément dans les réponses qu'on a analysées, c'est que les gens ne comprennent pas à quoi 'servent' leurs impôts. L'idée n'est pas de payer moins d'impôts, l'idée est que l'impôt soit mieux utilisé."
Jérémie Peltierà France Inter
L'outil d'intelligence artificielle a notamment permis d'extraire quatre groupes principaux sur la base des réponses des participants : les civiques (36% des répondants), les conservateurs (13,7%), les éco-focalisés (15,8%) et les pessimistes (29%). En résumé, "si le premier groupe des civiques se caractérise par leurs attentes en matière de réformes politiques et institutionnelles, le deuxième, les conservateurs, priorise clairement les questions fiscales et économiques. Ils sont mobilisés par l’efficacité de la dépense publique tout en maintenant un positionnement socialement conservateur. Le troisième groupe, les éco-focalisés, se distingue par sa mobilisation autour des enjeux de transition énergétique et des questions écologiques, notamment relatives aux usages de la voiture, alors que les pessimistes se caractérisent par une sensibilité particulière aux dysfonctionnements de l'administration et des services publics au quotidien et par une colère, non négligeable, voire un sentiment de défiance, quant à la gestion des affaires publiques".
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