Autoroute A69 : 800 participants au rassemblement pourtant interdit par la préfecture

La mobilisation baptisée "Turboteuf" se déroule sur un terrain privé afin de contourner l'interdiction préfectorale. Les opposants au chantier de l'A69 entendent faire "enterrer" ce projet après que la justice leur a dernièrement infligé un revers.

Article rédigé par Guillaume Farriol
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des gendarmes postés devant le terrain privé où se déroule la nouvelle journée de mobilisation contre le chantier de l'autoroute A69, à Maurens-Scopont, dans le Tarn. (ED JONES / AFP)
Des gendarmes postés devant le terrain privé où se déroule la nouvelle journée de mobilisation contre le chantier de l'autoroute A69, à Maurens-Scopont, dans le Tarn. (ED JONES / AFP)

Malgré son interdiction, des centaines de personnes participent, samedi 5 juillet, à un nouveau rassemblement pour protester contre l'autoroute A69 en construction entre Toulouse et Castres. À 8h, 800 participants ont été comptabilisés à Maurens-Scopont, dans le Tarn, annonce le préfet du département, Laurent Buchaillat, lors d'une conférence de presse. Et quelque 1 500 membres des forces de l'ordre sont mobilisés.

Le représentant de l'État souligne la "présence significative d'individus masqués et cagoulés, d'individus déjà identifiés dans des manifestations ultraviolentes". Lors des préparatifs pour ce rassemblement interdit par la préfecture, "on a pu observer la fabrication de catapultes, de réserves de pierres qui montrent l'intention d'en découdre", ajoute le préfet. "On n'est pas sur un événement festif", affirme-t-il. La mobilisation avait été interdite par la préfecture en raison "des risques manifestes de troubles graves à l'ordre public". Le chantier de l'autoroute vient en effet de reprendre après avoir été suspendu un temps par la justice.

Un très long dossier

Pour bien comprendre, il faut remonter à fin février, quand le tribunal administratif de Toulouse a décidé de suspendre le chantier. À la surprise générale, la justice avait jugé que cette autoroute ne présente pas un "intérêt public majeur" et que les atteintes à l'environnement le long des 53 kilomètres de travaux n'étaient pas justifiées. Un chantier alors jugé illégal et suspendu. Sauf que l'État avait fait appel, avec une demande assortie d'un "sursis à exécution". Cette requête a été acceptée par la justice il y a quelques semaines. Concrètement, avant de se prononcer sur le fond dans plusieurs mois, la Cour d'appel a suspendu le jugement de première instance. Le chantier peut donc reprendre, très progressivement. Les tractopelles et autres engins ont fait leur retour il y a une semaine, après quatre mois d'interruption.

En parallèle, la bataille de l'A69 se joue aussi au Parlement. Une proposition de loi, soutenue par des parlementaires locaux, favorable l'A69, est en passe d'être adoptée par l'Assemblée et le Sénat. Il s'agit d'un texte des plus inhabituel qui vise à inscrire dans la loi le caractère "d'intérêt public majeur" de l'autoroute. Objectif : empêcher la justice de pouvoir dire l'inverse et éviter une éventuelle nouvelle suspension du chantier par la cour d'appel de Toulouse dans les prochains mois. Ce texte fait débat. Les opposants ont déjà promis de saisir le conseil constitutionnel s'il est adopté définitivement, ce qui devrait avoir lieur rapidement.

"Radicalisation" des opposants

Ces derniers revers pour les opposants n'ont fait qu'attiser la colère. Les autorités alertent sur une "radicalisation de l'opposition" au projet d'autoroute : 2 000 manifestants au moins sont attendus samedi avec un "risque majeur de troubles à l'ordre public", prévient la préfecture, qui a interdit tout rassemblement et débuté les contrôles dans le secteur dès lundi.

Le préfet promet des forces de l'ordre plus nombreuses encore que l'an dernier, en juin 2024, quand la manifestation avait tourné à l'affrontement pendant de longues heures. Les organisateurs, eux, ont donné rendez-vous sur un terrain privé dans la campagne tarnaise, sur le domaine d'un château, tout près du tracé de l'A69. Ils dénoncent un Etat "prêt à tout pour empêcher la mobilisation contre toute autoroute illégale" et critiquent la volonté de "criminaliser les militants" avant même la manifestation.

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