"Elle repère énormément de choses" : comment l'intelligence artificielle participe à la lutte contre les feux de forêts

Les pompiers français s'équipent de plus en plus de caméras dopées à l'IA, pour débusquer les départs de feux et intervenir au plus vite sur les incendies.

Article rédigé par franceinfo
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Un feu de forêt près de Narbonne (Aude), le 8 juillet 2025. (MATTHIEU RONDEL / AFP)
Un feu de forêt près de Narbonne (Aude), le 8 juillet 2025. (MATTHIEU RONDEL / AFP)

Traquer, analyser et alerter. Face à la menace des feux de forêts, c'est la mission que confient désormais les pompiers aux systèmes de surveillance incluant une intelligence artificielle. Objectif : "Identifier les départs de feu à tout moment, en exploitant au maximum les capteurs vidéo et thermiques", résume à franceinfo Benoît Vega, attaché de presse du Service départemental d'incendie et de secours (Sdis) de la Gironde, joint par téléphone mardi 8 juillet.

Cette année, pour la première fois, l'IA est en charge "à 100%" de donner l'alerte depuis les caméras installées sur des points hauts à travers le département. "On garde bien sûr un élément humain, qui vient vérifier le signalement et réalise une levée de doute", explique-t-il. Le projet, baptisé "Surmafo" (pour "surveillance du massif forestier"), relie les capteurs de 22 sites du département à un centre opérationnel où trois opérateurs traitent ces informations. C'est à ce moment-là que "l'homme reprend la main sur la situation", souligne Benoît Vega, afin de décider s'il faut déclencher une intervention.

Surveiller de jour comme de nuit

Sur le papier, ce système offre de nombreux avantages et s'insère sur des installations déjà existantes. "Les caméras sont placées sur des édifices comme des châteaux d'eau et des tours de guet, construites à la base pour de la surveillance humaine", détaille le porte-parole du Sdis 33. Le réseau permet de scruter les massifs forestiers et les espaces naturels "de manière permanente, de jour comme de nuit, en présence d'orages", liste par ailleurs le service de secours sur son site. Testée et approuvée, cette vigie numérique permet finalement de "recentrer les ressources humaines sur des missions de lutte plutôt que sur des missions de prévention", souligne le Sdis.

"Comme toute intelligence artificielle, il y a eu une période d'adaptation et d'entraînement", rappelle Benoît Vega. Le système doit être capable de distinguer de la fumée à l'image, ou une anomalie thermique qui pourrait se révéler être un départ de feu. Le tout avec une portée de 20 km. "Elle repère énormément de choses", se félicite-t-il. Pour maximiser son efficacité, l'outil est partagé avec les départements limitrophes des Landes, de la Charente ou du Lot-et-Garonne. Et il s'affine en continu.

"L'algorithme de détection et d'analyse s'améliore constamment, à mesure que l'IA détecte et classe les événements, nourrissant ainsi sa base de données", retrace Benoît Vega, qui estime que cette technologie "tient ses promesses" pour prévenir des incendies qui pourraient s'avérer massifs. "Je pense à nos collègues de l'Aude aujourd'hui, c'est dramatique. Ils ont perdu 2 000 hectares, mais ce n'est parfois qu'un début. Ça peut monter à 30 000 hectares", rappelle-t-il, en référence aux mégafeux qui ont fait rage en Gironde à l'été 2022.

Un outil plébiscité par les pompiers

Ces dernières années, l'IA s'est invitée dans les centres de surveillance un peu partout sur le territoire français. En Dordogne, un réseau vidéo similaire permet de gagner de précieuses minutes et d'"intervenir avant que le brasier ne soit plus contrôlable", expliquait mardi à ICI Périgord le commandant Christophe Morant, directeur du centre d'appels du Sdis 24. "On a une vision très rapide des enjeux sur place et ça nous permet d'adapter en fonction de l'intensité, tandis qu'avant, il fallait se rendre sur place pour estimer l'importance de l'incendie."

Dans le Finistère, des caméras à 360° ont été installées dans neuf communes fin 2024, et c'est désormais "91% des zones à risque" du département qui sont couvertes par un système de télédétection intelligent, explique le Sdis 29 sur sa page Facebook. Comme en Dordogne, le coût de ce projet est de 2 millions d'euros.

Face à des incendies amenés à se répéter et à frapper davantage de régions à cause du réchauffement climatique, la détection des feux grâce à l'IA est en pleine expansion. Parmi les acteurs intéressés, la start-up française FireTracking, déjà présente en Indre-et-Loire, promet par exemple une détection jusqu'à 100 mètres en moins de trois minutes, avec un taux d'erreur inférieur à 10%. 

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