Vigilance orange en Savoie : qu'est-ce que le "retour d'Est" qui provoque des chutes de neige dans les Alpes ?
Bien connu dans la région, le phénomène est provoqué par de l'humidité en provenance d'Italie, qui se condense et se heurte aux montagnes.
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L'hiver n'a pas rendu son dernier souffle. D'importantes quantités de neige sont tombées sur les Alpes depuis mercredi et Météo-France a une nouvelle fois placé la Savoie en vigilance "orange", vendredi 18 avril, en raison des risques d'avalanches. En à peine vingt-quatre heures, il est tombé 38 cm à Bourg-Saint-Maurice (Savoie) – un record depuis 1994 – et 36 cm à Chamonix – un niveau inédit depuis 1962. Les relevés affichent 105 cm de neige fraîche à Tignes ou encore 90 cm à Val-Thorens, où un homme de 27 ans a été enseveli sous une coulée de neige avant de mourir à l'hôpital. De tels cumuls en si peu de temps ne surviennent "que tous les dix ou vingt ans", relève Corentin Perrot, prévisionniste chez Météo-France.
Ces fortes chutes de neige sont liées à un phénomène, bien connu dans la région alpine, appelé "retour d'Est" : de l'humidité venue du nord de l'Italie et de la Méditerranée, près du golfe de Gênes, se condense puis se heurte aux montagnes des Alpes. Cette humidité s'accumule, stagne et retombe sous forme de neige, de façon concentrée sur une zone assez restreinte. Météo-France a partagé une photo satellite, prise jeudi matin, illustrant une partie de ce mécanisme : l'image montre la dépression Hans s'enrouler autour des Alpes, apportant de la neige sur les massifs et de fortes pluies sur la Corse.
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Un retour d'Est a une durée de vie très variable, "d'une demi-journée à plusieurs jours", précise Corentin Perrot. "Tout dépend des conditions météorologiques du moment", ajoute-t-il. Le dernier épisode a pris fin dans la nuit de jeudi à vendredi et l'instabilité du manteau neigeux qui entraîne des risques d'avalanches vient de cette neige récente, qui "s'humidifie rapidement avec l'augmentation des températures et le retour du soleil".
Un phénomène relativement fréquent
Le phénomène est si "ancré" qu'il est enseigné et qu'il se retrouve mentionné dans une formation de Météo-France dédiée à la "formation des phénomènes hivernaux". Sur le terrain, il devient presque un argument marketing. "Ces retours d'Est, c'est spécifique au Queyras [une vallée du département des Hautes-Alpes]", déclare Pilou Sabatier, moniteur de ski interrogé par France 3 Provence-Alpes-Côte d'Azur, alors qu'il touche d'autres vallées de la région. Nombre de fans de glisse s'y rendent spécialement pour profiter de neige fraîche en abondance.
Les retours d'Est sont également fréquents. Sans être exhaustif, France 3 Provence-Alpes-Côte d'Azur a en a évoqué en 2016, 2017, 2018, 2023 ou encore 2024. Cette année, le météorologue François Jobard en parlait le 14 mars, sur le réseau social Bluesky. Gaétan Heymes, ingénieur prévisionniste chez Météo-France dans les Alpes du Sud, évoquait sur le 2 avril, sur le même réseau, un "petit retour d'Est". Cet événement de mi-avril n'est d'ailleurs pas si tardif : Météo-France faisait état en 2023 du même phénomène aux alentours du 20 mai.
"Le retour d'Est arrive généralement à l'automne ou au printemps."
Corentin Perrot, prévisionniste chez Météo-Franceà franceinfo
"Nous n'avons plus trop l'habitude mais il n'est pas rare d'avoir de la neige sur les massifs alpins à la mi-avril. Si l'on prend du recul, météorologiquement, c'est normal", insiste-t-il. "En revanche, ce sont les cumuls observés qui rendent cet épisode exceptionnel, notamment dans les zones de moyenne montagne", souligne-t-il.
Comment les retours d'Est vont-ils évoluer dans les décennies à venir avec le réchauffement climatique lié aux activités humaines ? "Ils vont se reproduire", anticipe Corentin Perrot. Ils ne risquent pas non plus d'être plus rares ou plus fréquents, selon le spécialiste. En revanche, comme une atmosphère plus chaude peut contenir plus d'humidité (avec chaque degré de plus, elle peut se charger d'environ 7% d'humidité supplémentaire), les retours d'Est risquent d'être plus intenses, causant davantage de problèmes au sol et de potentielles inondations lors de la fonte.
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