"Le symbole de la difficulté pour les victimes des pesticides à obtenir justice" : face aux moyens colossaux de Bayer-Monsanto, la famille de Théo déterminée
Bayer-Monsanto s'est retrouvé devant la justice française, jeudi, car son produit phare, le glyphosate est accusé d'avoir causé de graves malformations au garçon dont la mère a manié le produit pendant sa grossesse.
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Arguments et contre-arguments. Après des années de procédure, les parents de Théo, 17 ans, ont fait face, jeudi 3 avril au tribunal de Vienne, en Isère, à la multinationale Bayer-Monsanto. Ils accusent le glyphosate, célèbre herbicide du groupe, d'avoir causé les très graves malformations à la naissance de leur fils, après que la mère de Théo a pulvérisé la substance pendant sa grossesse.
Pendant cette journée d'audience, Bayer-Monsanto a tenté de démonter un à un les arguments de la famille. "Il n'y a eu aucune exposition au glyphosate", assène l'un des avocats du géant de la chimie dans une longue plaidoirie. Il tacle les témoignages de ceux qui assurent avoir vu Sabine Grataloup, la mère de Théo, asperger de pesticide sa carrière d'équitation en août 2006. Ces témoignages ont été recueillis dix ans plus tard, "comment peuvent-ils s'en souvenir précisément ?", interroge le camp Monsanto. La défense brandit également la photo du bidon de désherbant fourni par la famille Grataloup. Selon elle, un détail dans l'étiquette montre qu'il ne peut pas dater de ce fameux été 2006.
"Tout s'effondre", dit l'avocat de Monsanto, avant de mettre aussi en doute le sérieux de l'avis de 2022 rendu par les experts du Comité d'indemnisation des victimes de pesticides. Ils avaient reconnu le lien entre les malformations à la trachée et l'œsophage de Théo et le glyphosate. Le camp Monsanto en appelle ensuite à la science : il n'existe, selon ses avocats, aucune étude sérieuse prouvant le lien entre le glyphosate et des malformations congénitales.
La famille de Théo agacée mais confiante
Face à une nuée de caméras et de micros, Sabine Grataloup, aux côtés de son fils, n'a pas caché son agacement, sa colère même, après la longue démonstration du camp adverse et ses moyens colossaux. "C'est déjà compliqué pour une petite famille du nord de l'Isère de devoir faire toutes les recherches scientifiques, contacter des scientifiques en France, aux États-Unis, en Argentine, rassembler les études, souligne-t-elle. Je trouve que c'est vraiment tout le symbole de la difficulté pour les victimes des pesticides à obtenir justice."
Mais les avocats de la famille Grataloup ont eux aussi pu exposer leurs arguments. C'est-à-dire, comment, selon eux, il ne fait aucun doute que Sabine Grataloup a pulvérisé le glyphosate dans les premières semaines de sa grossesse, quand le fœtus est particulièrement vulnérable. Comment Monsanto a dissimulé les dangers de son produit. Comment certaines études montrent bien les risques du glyphosate pour les fœtus. Sabine Grataloup garde espoir : "Je garde confiance en la justice, le tribunal a entendu, bien sûr, les deux parties, j'ai confiance. Ils vont étudier soigneusement le dossier, qui ne se réduit pas aux présentations caricaturales qui ont été faites par nos adversaires."
Le tribunal rendra sa décision le 31 juillet. Et si celle-ci n'est pas favorable à la famille Grataloup, elle a déjà prévenu qu'elle fera appel. Bayer-Monsanto, de son côté, fera certainement de même, si sa responsabilité est reconnue.
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