: Reportage "Il y en a assez de nous faire porter la responsabilité" : pour limiter les effets de l'exposition aux pesticides, agriculteurs et riverains organisent leur cohabitation
Depuis plusieurs années, des précautions permettent d'harmoniser la cohabitation entre riverains et agriculteurs en période d'épandage de pesticides.
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Plus de deux millions de Français vivent à proximité d'une parcelle de vigne et ils sont, de fait, plus exposés aux pesticides et plus imprégnés que les autres Français. C'est ce que révèle une grande étude intitulée "Pestiriv" publiée, lundi 15 septembre, par deux agences sanitaires sans déterminer, à ce stade, les impacts sur la santé. Cette étude a décelé la présence de 56 substances dans l'urine et les cheveux de 1946 adultes et 742 enfants, ainsi que dans l'air extérieur, sur 256 sites dans six régions viticoles.
Cette problématique, de nombreux viticulteurs l'ont intégrée depuis plusieurs années. Dans le Bordelais, par exemple, la cohabitation entre les vignes et les riverains s'est organisée. En ce jour de vendanges, le chant du sécateur sur les grappes de raisin résonne sur le domaine du château Luchey-Halde à Mérignac. Ici, on est à la fois en pleines vignes et en pleine ville. "Le vignoble a été créé en 2000. Jusqu'ici, c'était un terrain militaire, ce qui l'a préservé de l'urbanisation. Donc on est arrivés après les voisins", explique Pierre Darriet.
"On a un système de drapeaux, comme à la plage"
Le directeur d'exploitation du domaine montre les maisons, dont on voit les toits au-dessus des vignes. Il a ouvert le domaine aux riverains et il a mis en place un système d'information lors des épandages de pesticides : "On a un système de drapeaux, comme à la plage. Si c'est drapeau vert, les gens peuvent venir se promener. Si c'est drapeau rouge, il ne faut pas entrer sur le vignoble parce qu'on est en train de traiter."
"Pour les voisins, même si on a un système de drapeaux, on envoie des mails pour prévenir qu'on va épandre."
Pierre Darrietà franceinfo
Autour du domaine et dans ses allées, les riverains promènent leurs chiens, font du sport, se promènent : "On vérifie que le drapeau vert est bien mis, sinon ça veut dire qu'on ne peut pas y aller. Surtout qu'on a une petite fille de deux ans, donc on essaye d'éviter au maximum. On est bien obligés de faire confiance. Mais je ne m'inquiète pas plus que ça", commente un passant. "Je pense qu'ils font beaucoup d'efforts, on n'a pas trop de répercussions. Moi, je n'habite pas très loin et je n'ai jamais eu d'odeurs nauséabondes", ajoute une riveraine. "On se dit que comme ils sont en ville, ils font un peu plus attention. Mais souvent on élude le problème, on l'oublie un petit peu alors que c'est une grande question", poursuit un autre.
"Maintenant, on fait aussi reposer la responsabilité sur les riverains"
Cette question, l'étude Pestiriv y répond en chiffres et en recommandations : éviter d'étendre son linge dehors, se déchausser en entrant chez soi, garder fermées les fenêtres sur les vignes… Mais pour Henri Plandet, président d'Alerte Pesticides Gironde, l'étude passe à côté d'un point essentiel : "Les agriculteurs ne sont pas les responsables puisqu'ils utilisent des produits autorisés. Et dans l'étude Pestiriv, maintenant on fait aussi reposer la responsabilité sur les riverains qui doivent ou ne doivent pas faire certaines choses."
"Je suis tenté de dire : 'Agriculteurs et riverains, même combat'."
Henri Plandetà franceinfo
"Il y en a assez de nous faire porter la responsabilité d'une évaluation des risques qui n'est pas adéquate et de l'utilisation de produits dont certains devraient être abandonnés, notamment les perturbateurs endocriniens, parce que là, il n'y a pas de seuil", conclut Henri Plandet. En attendant, à Mérignac, au domaine du château Luchey-Halde, les vignerons sélectionnent les pesticides et limitent leurs quantités. Ils testent également de nouveaux cépages qui nécessitent moins de traitements.
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