: Entretien Procès du meurtre de Lola à Paris : les proches ont "besoin" de réponses pour "traverser l'enfer", déclare l'avocate de la mère de l'adolescente
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Le procès de la meurtrière présumée de la jeune Lola s'ouvre vendredi. L'accusée comparaît pour "meurtre d'un mineur de 15 ans" et pour "viol commis sur un mineur avec torture ou acte de barbarie".
Un procès trois ans après les faits. Dahbia Benkired, âgée de 27 ans, comparaît devant la cour d'assises de Paris à partir de vendredi 17 octobre. Elle est suspectée d'avoir violé, torturé et tué Lola, 12 ans, le 14 octobre 2022. Le corps de la jeune fille démembrée avait été retrouvé dans une malle. L'affaire avait suscité un vif émoi dans l'opinion.
Le procès, qui ne se déroule pas en huis clos selon la volonté de la mère de Lola, doit durer six jours pour tenter de comprendre ce qui a poussé la meurtrière présumée à commettre ce crime sordide. Franceinfo s'entretient avec les avocats des parties civiles : Clotilde Lepetit, avocate de la mère de l'adolescente, ainsi que Mathias Darmon, avocat de l'association Innocence en danger.
franceinfo : Ce procès arrive à une date quasiment anniversaire. À quel point est-ce que les proches de Lola, la famille de Lola, l'attendent ?
Clotilde Lepetit : Ils l'attendent en ce sens qu'ils ont besoin d'obtenir des réponses à des questions qui leur sont insoutenables, parce qu'ils ont besoin de savoir. C'est à la fois ignoble, insoutenable et infernal. Et pourtant, à un moment donné, il faut que l'imaginaire s'arrête pour justement traverser l'enfer. Donc cette vérité-là, ils en ont besoin, ils l'attendent encore.
Qu'attendent-ils de savoir ?
Clotilde Lepetit : Manifestement, tout n'a pas été dit jusqu'au bout de la part de l'accusée. Je n’entrerai pas dans le détail du dossier qui fera l'objet des débats au fond, mais ils attendent de tout savoir sur ce qu'à vécu leur petite fille et ses derniers moments. Il faut que l'imaginaire cesse d'empêcher de dormir tous les jours.
Pendant ces trois années, est-ce que les proches ont cherché à savoir ce que l'enquête révélait ou est ce qu'ils ont préféré s'en tenir éloigné jusqu'au procès ?
Clotilde Lepetit : Il y a ceux qui ont eu besoin un temps de ne plus approcher ni les faits, ni tout ce qu'on en disait autour, toute l'hypermédiatisation, l'hyperpolitisation autour de la mémoire d'une jeune fille qui pourrait tout simplement rassembler.
"Je pense qu'ils se sont recroquevillés pour être en paix, pour récupérer leur intimité, leur chagrin, leur mémoire... Pour qu'on cesse de leur prendre ce qu'on leur avait déjà tellement pris."
Clotilde Lepetità franceinfo
Parmi les parties civiles, il y a la mère de Lola. Elle ne demande pas, alors qu'elle pourrait le faire, le huis clos. Qu'est-ce qui explique le fait qu'elle souhaite que les débats soient ouverts à tous ?
Clotilde Lepetit : Mon interprétation est qu'elle a eu à cœur d'être entourée et d'avoir des témoignages d'empathie, de douceur et des mots tendres à l'endroit de sa fille ou à son endroit. Et je pense qu'elle veut aussi que la France dans son ensemble puisse savoir ce qui s'est passé. La justice va juger au nom du peuple français et donc elle veut le peuple tout entier, possiblement, à cette audience.
Il y a une question qui va apparaître pendant les débats, qui était la question de la responsabilité et de l'état de l'accusée au moment des faits. Comment vous préparez-vous à ce débat-là ?
Clotilde Lepetit : La famille est préparée depuis le début à cette question. Dès lors qu'il a fait l'objet de la moindre médiatisation, cela a été évoqué. Donc bien évidemment que c'est un sujet auquel on s'attend. Ce qui est intéressant, c'est que dans l'imaginaire collectif, on voudrait que ce soit fou, on voudrait que ça ne puisse pas résulter d'un acte libre, parce que ça dirait que nous, les humains, nous sommes des gens bien. Ce n'est pas toujours le cas.
Mathias Darmon : Compte tenu des différents sévices qui ont été imposés, il est difficile de penser qu'elle n'était pas consciente.
"Très vraisemblablement, l'accusée comprenait très bien ce qu'elle était en train de faire."
Mathias Darmonà franceinfo
Il y aura sans doute des questions autour de son discernement, mais les différentes expertises psychiatriques ont écarté une abolition ou une altération de discernement. Pour l'instant, il n'y a aucune raison de considérer que l'accusée était dans un état second au moment des faits des sévices qu'elle a imposés à Lola.
De la même manière, il y a la recherche du mobile. Est-ce qu'il y a un espoir de savoir pourquoi l'accusée a commis ces faits ?
Clotilde Lepetit : On va vivre avec de l'espoir parce qu'on va traverser cette œuvre de justice jusqu'au bout. Donc le fait d'aller à l'audience, c'est que nécessairement, on en attend un peu quelque chose. Et puis on n'est pas non plus dans l'illusion. Et on sait aussi la limite des hommes, la limite de la possibilité du vrai et la limite aussi de la conscience de celle qui sera en face de nous.
De la manière dont les choses se sont déroulées, est-ce qu'on est dans le prototype d'une petite fille victime de sa naïveté ?
Mathias Darmon : C'est sûr que l'accusée a choisi une jeune fille qui était très jeune, 12 ans, qui était particulièrement vulnérable et qui vraisemblablement a voulu faire confiance à cette dame sans savoir véritablement vers quoi elle allait. Et oui, c'est évident que l'accusée a profité de la jeunesse, de la naïveté de Lola pour aller au bout de ses pensées et de ses volontés.
On sait que les faits se sont passés dans la résidence dont les parents de Lola étaient les gardiens. Il y a un certain nombre de témoignages de personnes qui ont pu croiser l'accusée avec la petite fille peu avant les faits. L'une qui a ouvert la porte de la résidence… Est-ce que, chez les parties civiles, peut apparaître à l'audience une forme de sentiment de culpabilité, de ne pas avoir pu protéger cette petite fille ? Comment est-ce que les parties civiles vivent avec ça ?
Clotilde Lepetit : Avec Karine Bourdié, avec qui j'interviens sur ce dossier à la cour d'assises, ce sera l'objet de nos développements. Je pense que pour parler de façon beaucoup plus générale, et quoi qu'il en soit, la culpabilité a cette énorme facilité à s'insérer dans tous les petits recoins les plus fous et les plus irrationnels qui soient chez les êtres humains. Et que s'il faut parler aussi ne serait-ce que du quartier et des gens qui ont vécu l'événement autour… Il y a tout un tas de gens qui ont été meurtris par ce dossier et qui ont encore la larme à l'œil à la simple évocation de ce procès.
Il y a un autre aspect qui a fait beaucoup de bruit et qui a fait l'objet de récupération par ailleurs, c'est la question du statut administratif de l'accusée, sous le coup d'une OQTF, une obligation de quitter le territoire. Est-ce que ce débat-là a une place à l'audience pour vous ?
Clotilde Lepetit : Selon moi, non. À l'audience, on juge une accusée, qui, elle, a commis les faits. Les raccourcis de pensée et la politisation du débat ne seront pas de notre registre, ce n'est pas le lieu de cette cour d'assises. Lors des funérailles et aussi au moment de la marche blanche, Madame Daviet [la mère de la victime] s'est exprimée à ce sujet. J'ai été moi-même mandatée pour demander qu’aucune récupération de communication politique ne soit faite autour de la mémoire et de l'image de cette petite fille qui ne mérite que le rassemblement des uns et des autres autour d'elle et surtout pas la polarisation, ou la vindicte, ou les clivages. Là, en réalité, il s'agit de se retrouver tous autour de la lutte contre la violence faite aux enfants.
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