Reportage "Pourquoi on devrait subir ça ?" : à Marseille, la décision de fermer les épiceries de nuit entre 22h et 6h divise commerçants et habitants

Afin de réduire les nuisances, les épiceries de nuit du centre-ville marseillais vont devoir baisser le rideau entre 22h et 6h du matin, selon un arrête de la préfecture des Bouches-du-Rhône. Cette mesure entre en vigueur pour un mois à partir du 21 mars prochain.

Article rédigé par franceinfo
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Une épicerie marseillaise ouverte de nuit, qui devra fermer dès 22h pour un mois à partir du 21 mars prochain. (DENIS THAUST / MAXPPP)
Une épicerie marseillaise ouverte de nuit, qui devra fermer dès 22h pour un mois à partir du 21 mars prochain. (DENIS THAUST / MAXPPP)

Dans le centre-ville de Marseille, une cinquantaine d’épiceries de nuit vont devoir fermer à partir de 22h et jusqu'à 6h du matin. La préfecture de police des Bouches-du-Rhône a pris, lundi 24 février, un arrêté en ce sens, effectif pour un mois à partir du 21 mars prochain, pour lutter contre les nuisances dont se plaignent de nombreux riverains.

Une bonne chose pour Dominique, qui tient une boutique dans une rue près du Vieux-Port où se trouvent deux épiceries de nuit. "Je trouve qu'il y en a beaucoup trop maintenant, constate-t-il. Ça crée des attroupements de gens qui parlent fort, de gens qui se battent pour de l'alcool parce qu'ils vendent de l'alcool, du gaz hilarant, de la drogue bien sûr."

"Ils pissent partout !"

Nora, riveraine d'épicerie de nuit

à franceinfo

La police reçoit de très nombreuses plaintes de riverains qui dénoncent les mêmes nuisances. Nora habite juste à côté d’une épicerie de nuit et elle se dit excédée par les rassemblements nocturnes. "Moi, je veux déménager à cause de ça justement, parce que depuis qu'ils ont ouvert à côté, pour rentrer chez moi, il faut que je dise pardon à tout le monde, déplore-t-elle. Et ça crie et ça insulte. Et la saleté, il y a des bouteilles de pisse partout."

"On se sent un peu réprimés"

C’est souvent pour acheter de l’alcool que l’on se rend dans une "alim", une alimentation de nuit. "La semaine dernière, on y est allées car on faisait une petite soirée entre filles, explique Jade, étudiante. On allait acheter une bouteille de vin entre minuit et 2h." Elle regrette cette fermeture à venir : "Oui, ça fait chier, on se sent un peu réprimées en se disant qu'on peut même plus acheter de l'alcool le soir parce qu'on fait une soirée entre potes."

"Parfois, on a aussi des parents qui viennent, ils achètent des couches et des produits d'hygiène."

Abdel, épicier

à franceinfo

Dans son arrêté, le préfet de police rappelle justement que certaines épiceries ne respectent pas l’interdiction de vendre de l’alcool à emporter la nuit et que "l’activité licite" de ces établissements est "faible après 22h".

Ce que conteste Abdel, qui tient, avec sa mère, une épicerie de quartier. C’est la nuit, après 22h, qu’il a le plus de clients : "C'est à cette heure-ci qu'on fait notre chiffre d'affaires, une bonne partie du moins. On travaille, on vend des fruits, des légumes, des boîtes de conserve. Les infirmiers et ceux qui travaillent de nuit, qui finissent par le soir, ils viennent. On ne vend pas de drogue, on ne vend pas de cigarettes. Donc voilà, encore une fois, on subit à cause des autres, on paye pour les autres sous prétexte qu'il y en a qui vendent du shit... Je suis désolé, mais nous, ce n'est pas le cas. Pourquoi on devrait subir ça ?" L’épicier se dit prêt à manifester contre cet arrêté.

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