Info franceinfo L'ONU s'inquiète de la possible interférence de la Chine dans la gestion du musée Guimet à Paris

Il est notamment reproché au musée national des arts asiatiques d'avoir remplacé le terme "Tibet" par celui de "monde himalayen", avec la suspicion d'avoir voulu satisfaire Pékin. Une initiative prise en 2024 lors d'une exposition, et qui a fait l'objet d'une alerte de l'ONU.

Article rédigé par Nathanaël Charbonnier
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Une personne devant une œuvre lors de l'exposition "La Chine des Tang" au musée Guimet, le 18 novembre 2024 à Paris. (GAO JING / XINHUA)
Une personne devant une œuvre lors de l'exposition "La Chine des Tang" au musée Guimet, le 18 novembre 2024 à Paris. (GAO JING / XINHUA)

La rapporteuse spéciale des Nations unies sur les droits culturels à Genève s'inquiète de la possible interférence de la Chine dans la gestion du musée Guimet à Paris, a appris mardi 30 septembre la rédaction internationale de Radio France auprès de sources concordantes. Il est notamment reproché au musée national des arts asiatiques d'avoir remplacé le terme "Tibet" par celui de "monde himalayen", avec la suspicion d'avoir voulu satisfaire Pékin. Cette initiative a été prise en 2024 alors que se déroulait le 60e anniversaire des relations diplomatiques entre la France et la Chine. Une affaire révélée dans une enquête conjointe de la Cellule investigation et de la rédaction internationale de Radio France, en novembre 2024.

En juillet dernier, la rapporteure de l'ONU, Alexandra Xanthaki, lance l'alerte et écrit un courrier de huit pages, particulièrement documenté, à la France. Elle souligne dans ce document plusieurs points : les accusations de suppression du mot dans les allées du musée sont-elles fondées ? Quelles sont les mesures prises par la France pour éviter les interférences extérieures ? Quelles sont les mesures prises pour la protection du patrimoine culturel tibétain en France ?
 
Selon les informations de la rédaction internationale de Radio France, la France a répondu à cette lettre, via sa mission permanente auprès de l'ONU à Genève, pour justifier son choix du terme "monde himalayen" à la place de "Tibet". Elle dit garantir la protection des œuvres tibétaines dans le musée et certifie qu'elle va renforcer les textes qui visent à prévenir les ingérences étrangères. Le dernier texte date de 2007 et serait visiblement dépassé puisque dans la réponse française, il est expliqué qu'une version actualisée de la charte de déontologie des conservateurs du patrimoine devrait être publiée très prochainement. 

Opacité des financements des expositions

Mais les arguments avancés par la France sont contestables, selon l'ethnologue et spécialiste du Tibet Katia Buffetrille, à l'origine de l'affaire. Tout d'abord, "les différents courriers [...] reçus ne sont absolument pas complets", selon elle. Rien n'est dit non plus sur "l'utilisation du nom Tubo, nom chinois pour parler du Tibet, qui a été employé pendant l'exposition Tang au musée Guimet l'année dernière", ajoute l'ethnologue. Elle souligne aussi que dans le conseil d'administration du musée Guimet, "trois personnes [sont] très, très liées à la Chine". Elle regrette aussi le manque de transparence sur les "financements" des expositions.  
 
En France, le musée Guimet est visé par un recours déposé par quatre associations pro-Tibet devant le tribunal administratif, pour excès de pouvoir.

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