Gênes : l'effondrement du viaduc "remet en cause notre illusion de toute puissance et renvoie à notre fragilité d'être humain"
Selon le psychiatre Christian Navarre, la catastrophe de Gênes entraîne "un changement de repères brutal, comme si pour nous, un monument emblématique de Paris s'était écroulé".
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L'effondrement du viaduc de Gênes représente "un bouleversement majeur dont les images sont elles-mêmes émotionnellement choquantes", estime samedi 18 août Christian Navarre, psychiatre et auteur de Du traumatisme collectif à la catastrophe individuelle. Les premières obsèques nationales sont organisées samedi dans la ville. Une prise en charge collective "très importante pour les familles", affirme le spécialiste.
franceinfo : Faire le deuil d'une personne morte dans un accident de la route banal ou dans une catastrophe nationale, est-ce différent ?
Christian Navarre : Effectivement, c'est différent, dans la mesure où c'est extrêmement médiatisé. Tout d'abord, il s'agit d'un bouleversement majeur dont les images sont en elles-mêmes choquantes émotionnellement. Ce pont gigantesque faisait partie du paysage et de l'inconscient collectif des habitants de Gênes, c'est donc un changement de repères brutal, chaotique auquel nous assistons tous, comme si pour nous, un monument emblématique de Paris s'était écroulé. Cela évoque des films catastrophe, des bombardements de temps de guerre, ce qui paraît irréel dans le contexte actuel. Les victimes font effectivement partie d'un groupe auto-constitué de gens, qui n'avaient rien à voir les uns avec les autres mais qui, sur un plan collectif, sont maintenant dans la même action.
Certaines familles de victimes refusent de participer aux obsèques nationales et préfèrent une célébration dans l'intimité, comment expliquez-vous cela ?
Les familles endeuillées pensent en permanence aux circonstances de la mort de leurs proches, donc la douleur peut aussi entraîner le fait qu'on ne souhaite pas être en groupe. Le groupe est pour certains rassurant et pour d'autres, il est anxiogène. En fonction de nos personnalités, on a des façons différentes de voir la mort et le deuil, peut être aussi en fonction des croyances.
Quand on parle de deuil national, est-ce que cela veut dire que les familles des victimes sont en lien avec toute la nation italienne ?
En effet, et plus que la nation italienne - vu l'impact des réseaux sociaux - avec peut-être même toute l'Europe. Car c'est aussi une effraction dans notre illusion de toute puissance, de maîtrise technologique, d'invulnérabilité, qui nous renvoie à notre fragilité d'être humain. Nous paraissons aussi fragiles et démunis que des fourmis face aux énormes décombres, cela correspond à nos angoisses archaïques. C'est pour ça qu'il y a plusieurs types de victimes. D'abord, on a les témoins directs, qui ont vu s'effondrer le pont, qui s'identifient au conducteur et au passager et voient le drame arriver. Mais aussi ces personnes blessées qui ont vécu un traumatisme avec une impression de mort imminente. L'état de choc, l'incompréhension, ce qu'on appelle un état de stress aigu. Et puis, il y aussi les survivants physiquement indemnes, d'abord soulagés, mais qui pourraient secondairement souffrir de culpabilité d'être vivant, de la colère, et même développer des symptômes avec des cauchemars et des angoisses, et qui ne pourront plus reprendre la route en particulier sur un pont. C'est pour ça que cette prise en charge collective européenne est très importante pour les familles, parce qu'ils ont l'impression que nous sommes tous avec eux.
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