La parole enfin écoutée des "enfants de la Creuse", exilés malgré eux
À Paris vendredi et à Guéret dimanche, une soixantaine d’enfants déplacés de La Réunion vers la métropole il y a plus de 35 ans vont témoigner devant une commission nationale enquêtant sur cette migration forcée.
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De 1963 à 1982, plus de 2 000 enfants ont été déplacés de La Réunion vers des secteurs métropolitains touchés par l'exode rural. Un grand nombre a atterri dans les environs de Guéret, d’où cette appellation des "enfants de la Creuse". Essentiellement placés dans des familles, de nombreux déplacés restent marqués par cette migration forcée, sur laquelle enquête depuis deux ans une commission nationale. Celle-ci va recueillir le témoignage d'une soixantaine d'entre eux, vendredi 6 janvier à Paris et dimanche 8 janvier à Guéret.
Les enfants déplacés de #LaRéunion appelés à témoigner devant la Commission nationale à Guéret dimanche prochain https://t.co/xoZGVSmobi
— France Bleu Creuse (@FBCreuse) 2 janvier 2017
"Mensonge" sur les raisons d'un départ
Marie-Josée Virapin avait 11 ans lorsqu'elle a été envoyée dans un établissement du Gers, à des milliers de kilomètres de sa famille. Naturellement souriant, son visage se fige quand elle se remémore le 27 septembre 1969, date de "son exil forcé". À 59 ans, les souvenirs la transportent dans un avion pour la métropole. L'appareil est rempli d'enfants.
Les services sociaux disent à sa jeune mère que c'est "pour le bien" de sa petite fille. "On a réussi à lui faire signer ce papier qui lui permettait d'autoriser son enfant à partir en métropole, dans le but de faire des études, puis de revenir régulièrement à La Réunion pour les vacances et ne pas couper le lien", explique Marie-Josée Virapin. Elle raconte que sa mère, comme beaucoup de parents à l'époque, avait beaucoup de difficultés à élever ses enfants : "C'est la misère et l'illettrisme". Sa mère a accepté, mais "la séparation est définitive". C'est "le premier mensonge", dit-elle.
Un cheminement sans affection
Près de 50 ans plus tard, Marie-José traîne sa peine comme un boulet. Elle repense à son parcours chaotique.
Intérieurement, je ne m'en remettrai jamais
Marie-Josée Virapin, "enfant de la Creuse"à franceinfo
L'enfant déplacée a passé son baccalauréat à 45 ans et travaille aujourd'hui comme animatrice. Des égarements en tout genre ont marqué sa jeunesse : "L'alcool, la drogue, les attachements à tout le monde." Elle y voit à présent de "l'excès et une recherche d'affection et d'amour qu'elle n'a jamais eus". Malgré la maturité, Marie-Josée, toujours en souffrance, confie son manque de confiance et de repères : "Aujourd'hui, et c'est de pire en pire, j'ai toujours des difficultés relationnelles." Elle dit passer beaucoup de temps chez son psychologue, "accrochée à son histoire, à son combat".
La quête d'une reconnaissance
Marie-Josée a rencontré sa mère longtemps après le grand voyage, à 20 ans, après avoir mis la main sur son dossier. Les deux rencontres ne l'auront pas apaisée. "J'en veux beaucoup au gouvernement de l'époque. Qu'est-ce qui leur a donné l'autorisation de nous enlever à nos familles, de nous faire disparaître de notre île ?" Marie-Josée attend la reconnaissance d'une responsabilité, une reconnaissance de l'État marquée dans les livres d'Histoire, et pourquoi pas une réparation financière. Car, dit-elle, "quand on commet un crime, on le paie".
En octobre 2016, la commission nationale chargée de faire la lumière sur la zone grise des exilés de La Réunion a déjà recensé 2 150 enfants déplacés d'office.
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