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Attaques de camions, trafics, apparition de "mafias"... L’aide humanitaire à Gaza menacée par l’effondrement de l’ordre public dans le sud de l’enclave

Tandis que le risque de "famine de masse" est plus que jamais présent dans la bande de Gaza, la semaine dernière, l’ONU a stoppé ses convois en direction du nord face à l’insécurité sur les routes devenue trop élevée.

Article rédigé par Etienne Monin
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Ce camion transportant de l'aide humanitaire en provenance du Royaume-Uni a pu entrer à Gaza via le poste frontière de Kerem Shalom, dans la partie sud du territoire palestinien, le 17 février 2024, à Rafah. (SAID KHATIB / AFP)
Ce camion transportant de l'aide humanitaire en provenance du Royaume-Uni a pu entrer à Gaza via le poste frontière de Kerem Shalom, dans la partie sud du territoire palestinien, le 17 février 2024, à Rafah. (SAID KHATIB / AFP)

À deux doigts du chaos. Le chef de l'ONU a mis en garde lundi 26 février contre la fin des programmes d'aide humanitaire pour la bande de Gaza si Israël lançait une offensive militaire majeure sur Rafah annoncée par le Premier ministre Benjamin Nétanyahou, qui veut faire sortir les civils de la ville surpeuplée pour vaincre définitivement le Hamas.

L'offensive "ne serait pas seulement terrifiante pour plus d'un million de civils palestiniens qui s'y abritent ; elle sonnerait également le glas de nos programmes d'aide", a prévenu Antonio Guterres, à l'ouverture de la 55e session du conseil des Droits de l'homme à Genève. Selon l'ONU, 2,2 millions de personnes, soit l'immense majorité de la population, sont menacées d'une "famine de masse".

"Des jeunes armés de couteaux et de bistouris"

Et une autre menace plane : l’aide humanitaire a Gaza est menacée par l’effondrement de l’ordre publique dans le sud de l’enclave. Cette semaine, l'ONU a dû stopper ces convois en direction du nord face à l’insécurité trop élevée sur les routes. Et la situation risque encore d’empirer à cause de la disparition des policiers à Rafah. Depuis quelque temps, les habitants de Gaza parlent même de l'apparition de mafias qui n'hésite à pas détourner l'aide humanitaire. L'ONU confirme et dit constater que les attaques contre des camions dans le secteur de la frontière avec l'Egypte et sur la route du Nord augmentent et sont de plus en plus violentes.

Si on ne sait pas qui est derrière, en revanche, une chose est sûre : elles ne viennent pas de gens désespérés qui demandent de l'aide, mais il s'agit d'un trafic organisé. Ces attaques ciblent précisément les camions d'aide humanitaire afin de revendre la nourriture à prix d'or au marché noir. "Il y a des jeunes de 15, 16, 17 ans qui font des barrages. Ils arrêtent les camions et montent à bord avec des couteaux, avec des bistouris... C'est la mafia parce qu'il n'y a pas de la loi", explique Nabil qui fait partie des déplacés de Rafah.

Effondrement de l'administration palestinienne

En cause : la situation sécuritaire qui s'est détériorée. Il n'y a en effet plus de protection depuis que la police est ciblée par l'armée israélienne, dénonce Andrea de Domenico, chef de l’Ocha, la coordination humanitaire à Jérusalem.

"Les attaques contre la police ont été systématiques. Les policiers se sont retirés et essaient de rester en sécurité parce qu'ils ne veulent pas s'exposer directement aux attaques israéliennes."

Andrea de Domenico, responsable de la coordination humanitaire à Jérusalem

à franceinfo

"Les routes étaient un problème depuis longtemps, avec des hauts et des bas, avec des moments plus ou moins protégés. Mais le peu qui arrive et qui, parfois reste à Rafah, est exposé. On a eu des attaques systématiques dans les dernières deux semaines. Des attaques non seulement aux installations, mais aussi au personnel", précise l'humanitaire. Des tracts ont été envoyés par l'armée israélienne pour menacer la police de Rafah : elle a déjà été visée par quatre frappes. Cette stratégie menace de briser la déjà fragile chaîne humanitaire.

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