Reportage "Même les morts n’ont pas été épargnés, le régime n’a eu aucune pitié" : en Syrie, le titanesque chantier de la reconstruction

Un mois après la chute du régime de Bachar al-Assad, le nouveau pouvoir commence à prendre ses marques. La reconstruction du pays se chiffre en milliards. Parmi les zones les plus affectées, celle de La Ghouta, près de la capitale.

Article rédigé par franceinfo - Arthur Sarradin
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
En attendant d'avoir les moyens de reconstruire la Syrie ravagée par 13 ans de guerre, les combattants rebelles assurent la sécurité des quartiers bombardés en désarmant par exemple, les missiles non explosés. (ARTHUR SARRADIN / RADIO FRANCE)
En attendant d'avoir les moyens de reconstruire la Syrie ravagée par 13 ans de guerre, les combattants rebelles assurent la sécurité des quartiers bombardés en désarmant par exemple, les missiles non explosés. (ARTHUR SARRADIN / RADIO FRANCE)

Dans le quartier de Jobar à l’est de Damas, aucun immeuble n’a été épargné. Abu Faycal est un combattant rebelle originaire de ce quartier. Samedi, il est revenu d’Idlib où il est réfugié depuis sept ans, pour pouvoir enterrer sa mère. "Nous l’avons mise ici avec son frère mais je n’arrive à reconnaître presque aucune des tombes de mes proches", se désespère-t-il.

Et pour cause, le cimetière n’a pas été épargné. Sept missiles l’ont transformé en un monochrome pâle de poussières et de morceaux de tombes. "Tu vois ce qui s’est passé pendant la guerre. Tu veux chercher ton neveu, ton père, ton oncle, mais tu ne trouves personne. "Même les morts n’ont pas été épargnés. Le régime n’a eu aucune pitié", résume Abu Faycal.  Avec d'autres combattants, Abu Faycal a essayé de numéroter les tombes et réunir les morceaux. Un travail titanesque pour ces rebelles, alors que tout le quartier est détruit.

Des combattants rebelles essaient de réunir les morceaux des tombes d'un cimetière bombardé à l’est de Damas pour en identifier les occupants. (ARTHUR SARRADIN / RADIO FRANCE)
Des combattants rebelles essaient de réunir les morceaux des tombes d'un cimetière bombardé à l’est de Damas pour en identifier les occupants. (ARTHUR SARRADIN / RADIO FRANCE)

Quelques mètres plus loin, Mohammad, la soixantaine, veut nous montrer le sous-sol de la mosquée : "Regardez ! C’est un missile que nous a tiré ce régime de criminels".

"Le missile a perforé cinq étages avant d’arriver ici. Si jamais il avait explosé, vu sa taille, il aurait fait sauter toute la mosquée avec lui."

Mohammad, un habitant du quartier Jobar

à franceinfo

Là aussi, c’est aux rebelles de retour d’exil de se charger de l’engin non explosé. Abdel Aziz a son uniforme sur le dos. Il a passé les premières années de la guerre dans cette mosquée quand il a rejoint les combattants rebelles à 18 ans. "On était tous encore dans cette mosquée il y a sept ans, se souvient-il. Quand le régime a repris la zone, on a dû fuir au nord, à Idlib, et personne n’a plus eu le droit de retourner ici".

Maintenant de retour, ces rebelles tentent de maintenir un semblant de sécurité à Jobar. "Pour l’instant, on fait la loi ici, on assure la sécurité pour éviter les vols et les crimes, pour protéger les citoyens qui reviennent ici. C’est un devoir national". Un devoir qu’Abdel Aziz dit vouloir poursuivre en rejoignant la nouvelle armée syrienne. Pour l’instant, sans moyens, difficile de se sentir utile à Jobar. Dans la Syrie ravagée, le chantier est faramineux pour le nouveau pouvoir. La reconstruction pourrait prendre des décennies.

En attendant des moyens, les rebelles tentent de sécuriser et reconstituer les quartiers dévastés - Reportage à la Goutha, près de Damas, d'Arthur Sarradin

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