Reportage "Nous rêvons de démocratie" : la Syrie se dote d'un nouveau Parlement lors d'un scrutin inédit mais qui désarçonne par sa complexité

La Syrie nomme dimanche son premier Parlement de l'ère post-Assad dans un processus critiqué pour ses limites démocratiques. Le tiers des membres seront nommés par le président intérimaire Ahmad al-Charaa, qui a renversé Bachar al-Assad en décembre 2024.

Article rédigé par franceinfo - Manon Chapelain
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Des affiches électorales sur un mur le long d'une ruelle du quartier juif de la vieille ville de Damas, le 3 octobre 2025. (LOUAI BESHARA / AFP)
Des affiches électorales sur un mur le long d'une ruelle du quartier juif de la vieille ville de Damas, le 3 octobre 2025. (LOUAI BESHARA / AFP)

Un scrutin inédit s'ouvre en Syrie, dimanche 5 octobre, après plus de quatorze années de guerre et un demi-siècle de dictature. L'objectif est d'élire les 210 parlementaires. Un tiers est nommé par le président par intérim, Ahmed Al-Charaa, le reste par des collèges électoraux régionaux désignés par l'État.

À quelques encablures de l'Assemblée, Yazan, 30 ans, se balade sans quitter des yeux le bâtiment. Bientôt, ici, siègeront de nouveaux parlementaires. "J'espère que l'on pourra enfin avoir des représentants qui nous ressemblent, explique le Syrien. Surtout nous, les jeunes, qui rêvons d'une nouvelle Syrie, qui rêvons de démocratie."

Yazan, depuis toujours intéressé par la politique, a longtemps pensé qu'il pourrait lui-même voter. Il y a quelques jours, il a finalement compris que les élus seront nommés par des comités. "Ce n'est pas vraiment démocratique", déplore Yazan.

"Nous ne pouvons pas juger sans avoir essayé"

À quelques pas de là, dans le café Rawda, connu pour être l'un des poumons de la vie politique syrienne, même interrogation, même scène. "Je sais qu'il y a des élections, mais sincèrement je ne sais pas grand-chose de plus, explique un Syrien. Quoi qu'il arrive, ce salaud d'Al-Assad est parti. Je pense que nous devons donner une chance à ce gouvernement. Nous ne pouvons pas juger sans avoir essayé."

À l'heure du scrutin, peu de Syriens se disent concernés, voire intéressés. Ce qui ne démotive pas Sameer Al-Melek, candidat dans la circonscription de Damas : "Je souhaite aider les plus pauvres, les réfugiés et les déplacés à revenir dans leur quartier d'origine. Aider ceux qui n'ont même pas de quoi s'acheter un bout de pain tous les jours."

Après un demi-siècle de dictature et des décennies de vie politique en berne, le processus électoral est inédit en Syrie, peut-être trop complexe. "Beaucoup de gens nous parlent du manque d'informations, mais nous sommes toujours présents sur Internet et dans les médias, explique Lara Aizouqi, membre du haut comité électoral. Nous nous sommes énormément exprimés sur ces élections et nous continuons à le faire. Après toutes ces années, nous savons qu'en Syrie certaines personnes peuvent simplement être mal informées ou désintéressées par les affaires politiques."

Certains observateurs craignent un manque de représentativité. Le pouvoir central a décidé de reporter les élections à Soueïda et dans le nord-est à dominante kurde, deux zones sur lesquelles il n'a toujours pas repris le contrôle.

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