Trois failles dans la lutte antiterroriste pointées du doigt par le patron du renseignement intérieur
Fin mai, Patrick Calvar, le patron de la DGSI, a été auditionné par la commission d'enquête parlementaire sur les attentats de novembre. Voici ses principales recommandations pour éviter de nouvelles attaques.
Le patron du renseignement intérieur s'inquiète "d'angles morts" dans la lutte antiterroriste. Patrick Calvar a pointé du doigt trois faiblesses importantes, lors de son audition par la commission d'enquête parlementaire sur les attentats de 2015, le 24 mai dernier. Le contenu de son intervention, à huis clos, a été rendu public mardi 12 juillet. Francetv info revient sur les principales recommandations du patron de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).
1Un contrôle judiciaire à renforcer
La commission d'enquête parlementaire a dénoncé les "défaillances du contrôle judiciaire" qui ont permis à Samy Amimour, l'un des terroristes du Bataclan, de se rendre en Syrie en 2013 alors qu'il faisait l'objet d'une mise en examen et d'une interdiction de sortie du territoire. La raison, selon Patrick Calvar ? Les services de renseignement "ne peuvent plus suivre ni intercepter les gens les plus dangereux dès lors qu'ils sont mis en examen", afin de ne pas "porter atteinte aux droits de la défense". Leur suivi ne peut être assuré que si les personnes concernées "sont impliquées dans un autre projet et qu'une autre enquête est ouverte".
Quelque 256 personnes ont été mises en examen dans des enquêtes sur des filières jihadistes en Irak et en Syrie, à la date du 4 juillet. Parmi elles, 162 ont été placées en détention provisoire et 94 sous contrôle judiciaire. "Il s'agit d'un angle mort", estime le patron de la DGSI. Pour Patrick Calvar, "il appartient à un contrôle judiciaire de permettre le suivi de l'intéressé". "Il est nécessaire de prévoir des mesures de contrôle judiciaire qui soient très fortes et appliquées à la lettre", poursuit-il. La commission parlementaire a demandé l'adaptation des "obligations dans le cadre du contrôle judiciaire des personnes mises en examen pour des infractions à caractère terroriste". Elle veut également "renforcer les modalités du contrôle judiciaire".
2Des communications impossibles à intercepter
Autre "enjeu majeur" de la lutte antiterroriste, d'après le patron de la DGSI : "le renseignement technique". Les 3 000 agents du renseignement intérieur se heurtent "au quotidien au problème du chiffrement, à la multiplication des moyens de communication, aux masses de données", fait valoir Patrick Calvar. Les messageries mobiles comme WhatsApp et Viber sont très prisées des groupes jihadistes, notamment au sein de l'organisation Etat islamique. Les services de renseignement sont toutefois incapables de casser le chiffrement des messages envoyés sur ces réseaux, dont seul l'utilisateur a la clé.
"Le chiffrement est assurément une question majeure que seules des conventions internationales pourront régler, les frontières des Etats étant désormais le plus souvent inopérantes pour fixer les termes de la loi, explique Patrick Calvar. Nous aurons un jour ou l'autre un bras de fer avec les opérateurs et pas seulement les opérateurs américains – le principal réseau utilisé par les terroristes, Telegram, est russe." Les autorités américaines ont été confrontées à ce problème dernièrement. Elles avaient demandé (en vain) à Apple de débloquer le téléphone de l'un des auteurs de la fusillade de San Bernardino (Californie). Le FBI avait finalement réussi à trouver par lui-même un moyen d'accéder aux données du téléphone.
3Des papiers d'identité trop faciles à falsifier
Certains des jihadistes des attentats du 13 novembre étaient rentrés de Syrie en empruntant la route des migrants et en utilisant de faux papiers d'identité. Il est toujours impossible à ce jour de retracer le trajet emprunté par Abdelhamid Abaaoud, cerveau présumé des attaques à Paris, alors qu'il est établi qu'il a fait des allers-retours entre la Syrie et l'Europe.
"Les identités n'ont de nos jours plus grande signification du fait des contrôles aléatoires et des possibilités de falsification grandissantes, estime le patron de la DGSI. Faire des contrôles d'identité n'a plus aucun sens." Pour remédier à ce problème, Patrick Calvar recommande "d'introduire systématiquement des éléments de biométrie, incluant la possibilité de croisement des fichiers".
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