"Une certaine admiration pour les hommes forts [et] les autocrates qui tiennent leur pays" chez Donald Trump, analyse Isabelle Lasserre, correspondante diplomatique au Figaro
/2023/07/05/64a55fd777de4_placeholder-36b69ec8.png)
Isabelle Lasserre, correspondante diplomatique du Figaro et Frédéric Charillon, professeur de relations internationales à l’université Paris-cité, sont les invités de "Tout est politique", samedi 18 octobre.
Ce texte correspond à une partie de la retranscription de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.
Isabelle Lasserre, correspondante diplomatique du Figaro et ancienne correspondante à Moscou, sort le livre Les Fantômes de Munich : l'Europe face aux défis du monde contemporain aux éditions de l'Observatoire. Frédéric Charillon, professeur de relations internationales à l’université Paris-cité, est quant à lui l'auteur de Géopolitique de l'intimidation, chez Odile Jacob. Ils sont les invités de "Tout est politique", samedi 18 octobre.
Franceinfo : Je voudrais commencer par vous entendre sur ce qui s'est passé hier. À Washington, Isabelle Lasser, votre lecture de ce déjeuner un peu particulier avec Volodymyr Zelensky, le président ukrainien. L'Ukraine, une fois de plus, a été douchée par Donald Trump. Il avait envisagé de livrer des Tomahawk, des missiles de longue portée à Kiev, et ce sera finalement non. Comment vous expliquez cette fin de non-recevoir ? Est-ce qu'à la fin, c'est toujours Poutine qui gagne ?
Isabelle Lasserre : Oui, pour l'instant, jusqu'au jour où il perdra. Mais c'est vrai que Donald Trump était un petit peu pressé par ceux dans sa base qui aimeraient qu'il aide plus directement l'Ukraine, qu'il a voulu sans doute refaire le coup de Gaza en se disant "je menace de l'apocalypse", parce que les Tomahawk pour Vladimir Poutine, c'est l'apocalypse, en espérant que ça provoque un recul en face ou une soumission.
Sur le fond, on a vu qu'il n'avait absolument pas changé de camp, et qu'il préfère Vladimir Poutine à Volodymyr Zelensky, qu'il a davantage de projets économiques et de business, que c'est quand même ça qui compte pour Donald Trump, avec la Grande Russie et ses terres rares, ces projets de tunnels qui peuvent relier l'Alaska à la Russie qu'avec la petite Ukraine. Puis il a une certaine admiration pour les hommes forts, les autocrates qui tiennent leur pays. Et il y a aussi tous ces liens et ces rumeurs sur la nature profonde des liens qui unissent les deux hommes.
Par quoi sont-ils liés ? Est-ce que Trump a été un agent dormant sans le savoir ou, en le sachant, du KGB, il y a longtemps ? Est-ce qu'il y a des kompromat, comme on dit en Russie, des dossiers qui peuvent l'incriminer et qui expliqueraient cette espèce d'attirance alors que, sur le fond, l'alliance entre la Russie, héritière de l'ancienne Union soviétique, et l'Amérique de Trump, héritière de la grande démocratie capitaliste... Sur le fond, cette association est complètement non-naturelle. Le précédent reset, le redémarrage des relations lancé par Barack Obama, s'était en partie abîmé sur cette incompatibilité des deux systèmes.
Trump encore berné, on pourrait le dire comme ça, par la lumière Poutine, qui sort à nouveau vainqueur de cette séquence, même s'il faut rester prudent, et la perspective d'un sommet à Budapest. Budapest, c'est l'Europe, c'est l'Union européenne. Victor Orban, même s'il est allié de Poutine. Ce n'est pas sûr qu'il ait lieu ce sommet (...) entre Trump et Poutine, mais que ce soit Orban qui accueille, avec pour l'instant un acquiescement prudent des Européens, si c'est pour faire la paix, dit Ursula von der Leyen, comment vous l'expliquez ?
Frédéric Charillon : C'est ce que disait Isabelle à l'instant, c'est-à-dire qu'il y a quand même beaucoup de doutes sur le penchant de Donald Trump pour les autoritaristes ou les populistes qui se confirment, parce que ça offrirait une victoire. S'il a lieu - parce que probablement, c'est vrai qu'à Moscou, on a dit qu'il y avait encore beaucoup de travail à faire pour que ça puisse avoir lieu - ça serait aussi une victoire diplomatique pour Victor Orban, dont on sait qu'il n'est pas du tout sur la ligne européenne majoritaire pour l'instant d'une défense plus forte de l'Ukraine.
Donc ça ne fait qu'accumuler, effectivement, les doutes sur le fait que Donald Trump a un agenda qui n'est pas celui des démocrates libéraux, on va dire, européens. On l'a vu se confirmer à plusieurs reprises, qui est plutôt du côté des régimes autoritaires et populistes. On voit aussi le vice-président Vance est venu à Munich expliquer aux Européens qu'ils étaient plus dangereux que la Russie et la Chine.
Néanmoins, ils ont quand même maintenu leur soutien. Ils n'ont pas augmenté, mais ils ne l'ont pas supprimé ou même diminué, je crois.
Frédéric Charillon : Il y a effectivement une hypothèse qui est de dire que Donald Trump est toujours sur le même agenda et qu'au bout du compte, on retourne toujours sur les mêmes pieds, c'est-à-dire qu'il est avec Vladimir Poutine. C'est une hypothèse.
Il y a une autre hypothèse aussi qu'il ne faut pas exclure, c'est qu'il ne connaît pas vraiment ses dossiers. On le sait, ce n'est pas quelqu'un qui travaille énormément, et il essaie de compenser ou de masquer cette incompétence, ou en tout cas ce peu de suivi de certains dossiers, par des changements de posture permanents. C'est quelqu'un qui aime être au centre de l'attention. Il le fait sur Gaza. Rien ne nous dit d'ailleurs qu'après avoir voulu imposer la paix à Gaza, il ne dise pas finalement : "Ils ont raison, je serai totalement derrière Israël s'ils reprennent le combat". En Ukraine, c'est pareil.
Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité
À regarder
-
La langue des signes est-elle en train de mourir ?
-
Ils crient tous ensemble (et c'est ok)
-
Obligée de payer une pension à sa mère maltraitante
-
Maison Blanche : Donald Trump s'offre une salle de bal
-
Musée du Louvre : de nouvelles images du cambriolage
-
Traverser ou scroller, il faut choisir
-
Manuel Valls ne veut pas vivre avec des regrets
-
Nicolas Sarkozy : protégé par des policiers en prison
-
Piétons zombies : les dangers du téléphone
-
Tempête "Benjamin" : des annulations de trains en cascade
-
Femme séquestrée : enfermée 5 ans dans un garage
-
Vaccin anti-Covid et cancer, le retour des antivax
-
A 14 ans, il a créé son propre pays
-
Ils piratent Pronote et finissent en prison
-
Aéroports régionaux : argent public pour jets privés
-
Bali : des inondations liées au surtourisme
-
Cambriolage au Louvre : une nacelle au cœur de l'enquête
-
Alpinisme : exploit français dans l'Himalaya
-
Un objet percute un Boeing 737 et blesse un pilote
-
Cambriolage au Louvre : où en est l'enquête ?
-
Jean-Yves Le Drian défend l'image de la France
-
Chine : 16 000 drones dans le ciel, un nouveau record du monde
-
Donald Trump lance de (très) grands travaux à la Maison Blanche
-
Glissement de terrain : des appartements envahis par la boue
-
Emmanuel Macron sème la confusion sur la réforme des retraites
-
Tornade meurtrière : scènes d'apocalypse dans le Val-d'Oise
-
Nicolas Sarkozy : premier jour en prison
-
La lutte sans relâche contre les chauffards
-
L'OMS alerte sur la résistances aux antibiotiques
-
Les frères Lebrun, du rêve à la réalité
Commentaires
Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.
Déjà un compte ? Se connecter