Suspension d'une pilule abortive aux Etats-Unis : "C'est un recul pour le droit des femmes et l'IVG qui est très important", estime un historien
Selon Simon Grivet, maître de conférences en histoire et civilisation américaine à l'université de Lille, "pour 2024, la question de l'IVG va être au cœur de la campagne présidentielle" aux Etats-Unis.
La suspension d'une pilule abortive aux Etats-Unis "est un recul pour le droit des femmes et l'IVG qui est très important", a déclaré samedi 8 avril sur franceinfo Simon Grivet, maître de conférences en histoire et civilisation américaine à l'université de Lille. Le président américain Joe Biden a annoncé vendredi qu'il allait "combattre" la décision d'un juge fédéral de suspendre l'une des pilules abortives aux Etats-Unis.
franceinfo : La pilule abortive est autorisée depuis une vingtaine d'années aux Etats-Unis. Qu'entraîne cette décision ?
Simon Grivet : Cela vient compléter la décision de la Cour suprême, en juin 2022, qui a supprimé le droit fédéral à l'avortement. A partir de là, chaque Etat s'est déterminé et dans la moitié, l'IVG a été interdite ou très fortement restreinte avec une limite posée à six semaines. Quand on regarde bien les choses, l'avortement médicamenteux est la procédure qui est la plus utilisée, dans 53% des cas. Donc, c'est un coup très dur à ce droit fondamental.
L'interdiction concerne-t-elle vraiment tous les Etats-Unis ?
A priori, cette décision s'applique à l'ensemble du territoire mais le juge fédéral qui l'a mise en application l'a suspendue pendant cinq jours pour permettre un appel. Une heure après, on a vu dans l'Etat de Washington, un juge nommé par Obama, prendre une décision contraire. Donc, on est dans un état de confusion juridique et judiciaire avancé. Il y aura un appel très rapide du gouvernement fédéral.
Que peut faire Joe Biden à part un recours à la Cour suprême ?
Sa situation politique est compliquée puisque les Républicains ont la main sur la Chambre, donc il ne peut pas obtenir du Congrès une loi fédérale qui homogénéiserait la situation. Pour l'instant, le mieux qu'il puisse faire c'est avoir recours à la Cour suprême pour obtenir une décision qui inverse celle de ce juge du Texas et utiliser ces décisions sur un plan politique. Vous pouvez être sûrs que pour 2024, la question de l'IVG va être au cœur de la campagne présidentielle.
C'est donc la Cour suprême fédérale qui va trancher ?
Oui, c'est très probable puisque les deux camps ne veulent pas en rester là. C'est un recul pour le droit des femmes et l'IVG qui est très important.
La Cour suprême est anti-avortement et a déjà décidé de supprimer le droit fédéral à l'avortement. Pensez-vous vraiment qu'elle va aller contre cette décision d'interdire la pilule abortive ?
Cela reste du droit, mais là le juge a décidé de contrevenir à l'autorisation de mise sur le marché d'un médicament décidé par l'autorité fédérale. Est-ce qu'un juge fédéral peut de lui-même suspendre la mise sur le marché d'un médicament qui était utilisé depuis 2000 ? Les défenseurs des droits des femmes sont inquiets.
Les femmes peuvent-elles recourir à l'avortement librement aux Etats-Unis ?
Principalement dans les Etats démocrates que ce soit sur la côte ouest de la Californie à l'Oregon ou dans l'Etat de l'Illinois. Mais quand on regarde les cartes, on s'aperçoit que l'IVG est devenue impossible ou très difficile dans plus de la moitié des Etats. Il y a des enjeux socio-économiques évidents et ce droit des femmes affecte principalement les femmes qui ont le moins de moyens, ne peuvent pas se déplacer et changer d'Etat ou de pays.
La société américaine est-elle fondamentalement opposée à l'avortement ?
Il faut faire attention et prendre en considération les nuances régionales. Dans le Sud, on a clairement une majorité opposée à l'avortement à cause de l'importance de la pratique religieuse et de la foi. Ce sont des Etats où on est très protestants ou catholiques. Dans le reste du pays, notamment sur les côtes ou les très grandes villes, on a une position qui se rapproche de celle de l'Europe occidentale. On tolère l'avortement mais on estime qu'il faut un cadre législatif.
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