Chute du gouvernement Bayrou : "La journée d'hier restera lamentable pour la classe politique et humiliante pour notre démocratie", déplore Jean-François Copé, maire LR de Meaux

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Article rédigé par France 2 - Édité par l'agence 6Medias
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Invité des "4 Vérités" mardi 9 septembre, Jean-François Copé a fustigé la séquence politique actuelle et le nouveau renversement du gouvernement par un vote de confiance lundi. Le départ d'Emmanuel Macron lui apparaît comme "l'une des seules idées possibles" pour sortir de la crise.

Au lendemain de la chute du gouvernement de François Bayrou, élus et parlementaires y vont de leur commentaire sur la crise politique que traverse le pays. Invité à réagir sur le plateau des "4V" ce mardi, Jean-François Copé, maire de Meaux, reste la seule figure des Républicains avec Valérie Pécresse à plaider pour la démission d'Emmanuel Macron. Une issue que l'édile soutient plus que jamais après la journée "catastrophique", selon ses mots, du 8 septembre.

Ce texte correspond à une partie de la retranscription de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.


Gilles Bornstein : La France n'a ce matin ni gouvernement, ni budget, ni Premier ministre. François Bayrou a-t-il commis une faute lourde ?

Jean-François Copé : La journée d'hier restera celle d'une journée lamentable pour la classe politique nationale, je vous le dis avec un regard de maire, et puis, d'autre part, humiliante pour notre démocratie. J'ai parcouru un peu la presse européenne, c'est catastrophique, on passe vraiment pour ce qu'on est devenu, c'est-à-dire un pays dont les fondamentaux restent solides et qui est poussé dans une descente aux enfers interminable par une classe politique qui a été lamentable. Lamentable.

Dans votre condamnation, il y a aussi celle du président de la République, parce que votre solution, c'est le départ du Président. Il a été élu pour cinq ans, pourquoi vouloir vous en prendre à lui ?

Non, vous savez très bien, j'ai pris le temps d'expliquer que mon propos n'a rien à voir avec celui de l'extrême gauche ou de l'extrême droite. J'ai simplement acté une situation, ça n'a rien de personnel. Changer de gouvernement nous amènera aux mêmes causes qui produiront les mêmes effets. Dissoudre à nouveau, ça veut dire un risque, soit de retrouver le même désordre, soit de faire arriver une majorité absolue pour le Rassemblement national, ça se fait en quelques jours, il n'y a pas le temps de faire campagne. J'ai donc proposé cette idée qui me paraît être l'une des seules possibles, mais qui, je le vois bien, n'est pas arrivée du tout dans l'esprit du président de la République. Quand on est à ce point désavoué, la question se pose de dire : "Je propose que, dans six mois, au lendemain des municipales, moi, Emmanuel Macron, j'annonce ma démission", ce qui fait une présidentielle anticipée au mois de mai prochain et ça donne le temps aux partis politiques non seulement d'organiser, le cas échéant, des primaires pour avoir un candidat, mais aussi, d'autre part, pour parler aux Français. Qu'est-ce qu'on veut pour l'avenir ? François Bayrou, en réalité, a commis cette erreur considérable de préférer dramatiser plutôt que d'expliquer. Parce que, de nos jours, il n'est pas bon d'expliquer, ça ferait donneur de leçons, alors on n'explique pas les sujets. On a un problème médical, on est contents que son médecin vous explique ce que vous avez. On ne demande pas aux professionnels de la politique, s'il en reste encore, d'expliquer les raisons pour lesquelles on doit baisser les dépenses publiques, par exemple. Donc, le résultat, c'est qu'il n'y a plus de débats, et c'est la prime à tous les simplismes, et dans ce domaine, les populistes se régalent.

"Le général de Gaulle, lui, a démissionné deux fois et pas dans des petits moments"

Mais s'il ne veut pas partir, Emmanuel Macron, vous êtes d'accord qu'il n'y a aucun moyen de le forcer ?

Aucun, d'ailleurs, la Constitution est très claire. C'est-à-dire que, quand je reçois des leçons de gaullisme de ceux qui le sont récemment ou pas du tout, en disant : "Non, ça protège l'institution", je rappelle que le général de Gaulle...

Qui vous donne des leçons de gaullisme ?

Tout le monde. En dehors de Valérie Pécresse, ça, il faut le reconnaître, nous sommes deux à partager ce point de vue, mais sinon, tous les autres nous expliquent que...

Donc Bruno Retailleau, Laurent Wauquiez, ils vous donnent des leçons de gaullisme ?

Non, enfin, j'ai tout entendu. Ce que je veux simplement vous dire, c'est que je rappelle que le général de Gaulle, lui, a démissionné deux fois et pas dans des petits moments, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, parce que la classe politique était totalement désorganisée, ou en 1969, parce qu'il est sorti par le haut, je le rappelle, après mai 68. Pourquoi je vous dis ça ? Parfois, ça peut être utile d'avoir un peu de profondeur historique. Voilà, ça permet d'éviter de vivre dans la dictature du quotidien qui fait qu'on raconte n'importe quoi et qu'on fait croire n'importe quoi à des Français qui sont parfaitement connaisseurs de la chose politique et qui sont dégoûtés de ce qu'ils voient, et ils ont raison malheureusement.

L'idée de démissionner n'est manifestement pas arrivée aux oreilles du président de la République, donc il va devoir nommer un Premier ministre. Il a dit qu'il le ferait dans les tout prochains jours, c'est l'expression de l'Élysée. Qui faut-il ? une personnalité du bloc bentral, selon vous ?

On ne va pas nommer quelqu'un du Rassemblement national ou du Parti socialiste. De toute façon, quoi qu'il arrive, on est dans une situation bloquée et on sait que les mêmes causes produiront les mêmes effets. La seule chose, c'est que si c'est un candidat du PS, je ne sais pas où il trouvera sa majorité. Mélenchon a clairement expliqué qu'il allait faire la peau à tous les socialistes qui passent. Au passage, j'invite à méditer sur ce que c'est pour un parti de gouvernement de s'allier avec un parti extrémiste. Le PS, dans sa descente aux enfers, nous montre ce que ça donne d'être allié avec LFI.

"Sébastien Lecornu est quelqu'un de remarquable, si ça doit être lui, tant mieux"

Olivier Faure a prononcé les paroles de rupture avec Jean-Luc Mélenchon.

Oui, mais face au moment des élections où là, pour sauver son siège, il est tout de suite le premier à se jeter dans les bras de Mélenchon. Ça fait dix ans que c'est comme ça et qu'on voit un PS qui a renoncé à la laïcité, qui a renoncé à toutes les valeurs de l'histoire de la gauche. Ca ne peut pas être un socialisme. Ça veut dire qu'il faut à nouveau trouver quelqu'un, effectivement, de ce que vous appelez le bloc central, même si, moi, étant de droite, je pense que la notion de centre, il va bien falloir qu'un jour ou l'autre elle s'arrête parce qu'on voit bien que le "en même temps" paralyse le pays. Mais de toute façon, je vais vous dire une chose, tout le monde fait semblant. Le gouvernement a fait semblant de faire des réformes considérables, il n'en a pas les moyens. Monsieur Bayrou a fait semblant de dire des choses définitives, ça s'est terminé hier. Et quant au président de la République, il fait semblant d'avoir tous les pouvoirs, alors qu'il n'en a plus.

Sébastien Lecornu, dont on parle beaucoup, ce serait une bonne idée ?

Sébastien Lecornu est quelqu'un de remarquable pour qui j'ai la plus grande estime. Et si ça doit être lui, tant mieux. Mais ne nous trompons pas, je ne vois pas comment est-ce qu'on peut tenir durablement dans une situation où un gouvernement n'a pas la majorité.

Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.

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