"Je pense qu'il peut y avoir un certain nombre de concessions", déclare Bruno Retailleau à propos de la nomination d’un nouveau Premier ministre

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Article rédigé par France 2 - Édité par l'agence 6médias
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Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, était l’invité du journal de 20h lundi 8 septembre. Il s’est notamment exprimé sur le vote de confiance et le mouvement social "Bloquons tout".

Ce texte correspond à une partie de la retranscription de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.

Léa Salamé : La France se retrouve à nouveau sans Premier ministre lundi 8 septembre. François Bayrou a perdu son pari. Vous lui en voulez ?

Bruno Retailleau : Non, c'est simplement un constat. Le problème désormais, c'est qu'il faudra d'abord un Premier ministre le plus vite possible parce qu'on va aborder des jours difficiles. Et il faut pour la France un budget.

Léa Salamé : Il faut un Premier ministre. Emmanuel Macron a dit qu'il voulait aller vite pour nommer quelqu'un à Matignon dans les prochains jours. Ça pourrait être vous ?

Bruno Retailleau : Je ne suis pas sur les rangs. Ce qui m'importe, c'est de servir mon pays. Je verrai si je suis dans le prochain gouvernement, il y a quelques conditions pour cela, je l'ai déjà exprimé, il n'y a rien d'automatique. En tout cas, ce que je sais, c'est que la France est dans une situation d'extrême vulnérabilité et je souhaite pour le pays que j'aime le meilleur.

Léa Salamé : Quelles sont les conditions pour que LR, le parti que vous présidez, fasse partie du prochain gouvernement, pour que vous soyez ministre de l'Intérieur peut-être dans un prochain gouvernement ?

Bruno Retailleau : Juste pour pointer un énorme paradoxe, il y a d'un côté le champ politique qui est totalement morcelé, atomisé. Mais il y a de l'autre côté des Français qui convergent. Il y a une forme de consensus. Ce que je demande, c'est qu'on applique cette politique que veulent les Français, de bon sens, de ce que disait le général de Gaulle, de la majorité nationale. C'est quoi ? Les Français veulent plus de sécurité. Il faut leur proposer. Nous avons un certain nombre de propositions, de mesures à faire. Ils veulent moins d'immigration. Et ils veulent aussi qu'un effort soit un effort partagé. En clair, que s'ils travaillent plus, ce sera pour gagner plus. Et pas pour l'assistanat.

Léa Salamé : Vous n'avez pas de majorité. Ni vous, ni Emmanuel Macron, ni personne. Pour qu'un prochain Premier ministre ne tombe pas, il va falloir faire des concessions. Vous savez ce que dit le Parti socialiste. Ils prétendent taxer plus les hauts revenus ou abroger la réforme des retraites. Est-ce que vous êtes prêts à faire une concession sur ces points-là ?

Bruno Retailleau : Je dis que nous ne participerions pas à un gouvernement qui aurait comme Premier ministre le Parti socialiste. Pourquoi ? J'ai entendu les mesures, les propositions de M. Faure et je vois que ce sont toujours les mêmes recettes, les vieilles lunes socialistes qui ont déjà terriblement affaibli la France. C'est taxer plus, c'est dépenser plus, c'est plus de laxisme, par exemple, en légalisant le cannabis, la drogue, alors qu'on se heurte au narcotrafic.

Léa Salamé : Bruno Retailleau, vous n'avez pas la majorité, donc comment vous faites ? Vous dites, 'je m'opposerai à un gouvernement dirigé par un socialiste'. Ce n'est pas ce que dit Laurent Wauquiez, le président du groupe de votre parti à l'Assemblée nationale. Il dit, 'pas de censure automatique si c'est un PS'. Vous n'êtes pas d'accord ? Et pardonnez-moi de vous dire, quand on voit le vote aujourd'hui de votre parti, les LR, vous étiez totalement divisés alors même que vous êtes au gouvernement, 27 pour, 9 abstentions, 13 contre.

Bruno Retailleau : Mais ce qui compte, ce sont les pour et les contre dans un vote comme celui-ci. C'est normal parce que notre électorat a été divisé. Ce qui est très mal passé, comme chez beaucoup de Français, ce sont les deux jours fériés supprimés sans que ce soit payé. Je pense qu'il peut y avoir un certain nombre de concessions.

Léa Salamé : Lesquelles ?

Bruno Retailleau : Nous verrons. Le président de la République va nommer un Premier ministre. Et le Premier ministre doit préfigurer, c'est-à-dire doit se retourner vers les forces politiques pour qu'on puisse discuter. Simplement, ce que je vous dis c'est qu'il y a un passage. Le passage, pour moi, il est par le haut en faisant une politique de la majorité nationale, moins de taxes, encore une fois moins de dépenses, plus de sécurité, moins d'immigration. Les efforts, bien sûr qu'il en faudra sans doute, ils doivent être partagés. Les Français ne comprennent pas, par exemple, qu'on relève les franchises et que l'aide médicale pour les étrangers en situation clandestine et irrégulière ne soit pas touchée. Ils ne comprennent pas qu'on atteigne l'indexation des retraites, alors que pour ceux qui ne travaillent pas, il n'y a pas de problème. Donc, il faut aussi plafonner les allocations.

Léa Salamé : Ce sont les convictions que vous avez depuis longtemps. Vous nous les redéfinissez, mais vous n'avez pas la majorité. Pour ne pas se retrouver dans une nouvelle situation où le gouvernement tombe, comment vous faites ? Qu'est-ce que vous, patron de LR, êtes prêts à donner ou à lâcher pour que le Parti socialiste, puisqu'en l'occurrence, ce sont eux qui sont d'accord pour travailler avec vous, accepte ?

Bruno Retailleau : Les électeurs socialistes veulent moins d'immigration, veulent de la sécurité, veulent plus de justice dans l'effort. On ne peut pas réclamer des efforts sans justice, notamment sur la fiscalité. Qu'il y ait par exemple des gens qui gagnent beaucoup d'argent sans payer d'impôt, je trouve qu'il y a un problème. C'est ce qu'on appelle la suroptimisation. Mais si on pense en France que c'est toujours en taxant plus qu'on va relever le pays, on se trompe, la preuve ! On est les champions du monde de l'impôt, et pourtant on a une dette astronomique.

Léa Salamé : Nicolas Sarkozy dit que la seule solution, c'est la dissolution.

Bruno Retailleau : C'est la dissolution qui nous a amenés à cette situation. Quand on regarde le paysage politique actuel qui est très fragmenté, qu'est-ce que serait la nouvelle dissolution ? Je le vois bien. Pour beaucoup, ce serait la destitution du président de la République. C'est ce qu'ils cherchent, c'est le chaos. Et notamment, LFI et les Insoumis veulent créer en France un climat insurrectionnel.

Léa Salamé : Dans votre parti, Xavier Bertrand et Valérie Pécresse disent que c'est trop bloqué, il faut une présidentielle anticipée. Ils ont tort là aussi ?

Bruno Retailleau : Je pense que ça ne réglera rien. Je suis gaulliste, je suis attaché aux institutions de la Ve République et la présidence est la clé de voûte. Imaginez qu'aujourd'hui, on pousse un président de la République à démissionner. Ça signifie que tous les successeurs seront fragilisés. Dès qu'il y aura des mouvements de rue, on se tournerait vers l'Élysée pour obtenir une destitution. Je pense que ça, ce n'est pas sérieux et ce n'est pas bon pour l'avenir de la France. En revanche, je pense qu'il y a eu un passage. Je le redis, ce ne sont pas des accords d'appareils. C'est faire la politique qu'attendent de nous les Français, la politique de la majorité nationale avec des choses très claires et très simples, une politique de bon sens.

Ce texte correspond à une partie de la retranscription de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.

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