: Vidéo "Le manque de nourriture, à la longue, ça rend fou !" Ginette Kolinka, Marceline Loridan et Simone Veil témoignent de leur difficile retour des camps d'extermination nazis
En 1944 et 1945, au fur et à mesure de leur avancée, les armées alliées libèrent les camps de concentration et d'extermination nazis. Affamés, épuisés et déshumanisés, les déportés rescapés entament alors un long et difficile retour à la vie.
Le 27 janvier 1945, il y a 80 ans, les soldats soviétiques de l'Armée rouge ouvraient les portes du camp de concentration et d'extermination d'Auschwitz-Birkenau, en Pologne, et libéraient quelque 7 000 survivants dans un état désastreux. Quelques jours plus tôt, près de 60 000 autres déportés en état de marcher avaient été évacués à la hâte par les SS vers les camps plus à l’ouest. Ils rejoignaient ainsi ce qui sera appelé plus tard la "marche de la mort", affrontant le froid intense, la faim, la soif, les maladies, l’épuisement et la crainte d’être exécutés…
Déportée à Auschwitz depuis avril 1944, Simone Veil avait eu écho d’une libération imminente au mois de décembre lorsqu’elle a été embarquée avec sa mère et sa sœur dans un des convois de cette "marche de la mort ". Elle témoigne : "On a été évacués, les SS ont trouvé des trains pour nous emmener. Nous sommes arrivés fin janvier à Bergen-Belsen. Et puis il y a eu une épidémie de typhus. Ma mère a eu le typhus, ma sœur a eu le typhus et j’ai eu le typhus. Mais ma mère était tellement épuisée qu’elle n’a pas pu le supporter, elle s’est éteinte comme ça, au mois de mars…"
"On ne se souvenait plus du visage de sa mère, on était dans une espèce de folie"
Bergen-Belsen a été libéré le 15 avril 1945 par l’armée britannique, mais après avoir vécu l’horreur de la déportation, il était difficile pour les deux sœurs de s’en réjouir : "La libération est arrivée… Maman était morte très peu de temps avant, alors c’était pas gai. Et on avait vécu aussi une telle humiliation ! Le corps que l’on avait... ces corps abominables ! Mais au moment de la libération, moi, je me suis vue dans le regard des premiers Anglais qui sont entrés dans le camp. C’est là que j’ai eu conscience. Je crois qu’ils n’avaient pas du tout imaginé ce qu’ils allaient trouver, c’est d’ailleurs inimaginable."
Des corps rendus squelettiques par des privations de nourriture jusqu’à en perdre la tête. Marceline Loridan, camarade de déportation de Simone Veil, raconte : "Les copines, on ne savait plus qui c’était, les copines. Et puis on savait plus comment s’appelait ton frère, on ne se souvenait plus du visage de sa mère, on était dans une espèce de folie. Le manque de nourriture, à la longue, ça rend fou ! "
"Moi, je n’ai pas pleuré, je ne sais plus pleurer"
Lorsque Ginette Kolinka, déportée à Auschwitz dans le même convoi que Simone Veil et Marceline Loridan, retourne chez elle pour la première fois, elle se sent déshumanisée. Elle raconte sa froideur face à sa mère, qui espère encore retrouver son mari et son fils : "Je sonne à la porte, c’est Maman qui ouvre, on est dans les bras l’une de l’autre. Pleurer, c’est sûr, moi, je n’ai pas pleuré, je ne sais plus pleurer. Mais ma mère, elle me dit : ‘Demain matin on va me donner des nouvelles de Papa et de Gilbert’. Mais Papa et Gilbert sont morts ! Papa et Gilbert sont partis en fumée ! Quelles nouvelles va-t-elle avoir ? Des fausses nouvelles ? ‘Mais non, Maman, t’auras jamais de nouvelles de Papa et de Gilbert, on les a gazés, on a brûlé leur corps’. Comment j’ai pu répondre aussi froidement, aussi brutalement à une mère, à une épouse ? Mais j’avais tellement vu d’horreurs, que pour moi, c’était normal, d’annoncer ça sans prendre de gants. Jamais elle ne m’a fait un reproche, et moi, jamais je ne me suis excusée."
Extrait de la série "Ginette, Marceline et Simone", diffusé dans "13h15 le dimanche(Nouvelle fenêtre)(Nouvelle fenêtre)(Nouvelle fenêtre)(Nouvelle fenêtre)" le 26 janvier 2025.
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