Vidéo "J'ai appris que j'avais envoyé papa et Gilbert à la mort" : devant la photo de son petit frère assassiné à Auschwitz, Ginette Kolinka, ancienne déportée, se souvient

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Article rédigé par France 2
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Elle s'était tue pendant trente ans, mais depuis les années 2000, Ginette Kolinka fait partie des témoins, de plus en plus rares, qui racontent l'enfer d'Auschwitz. Dans cet extrait d'un portrait diffusé à l'occasion des 80 ans de la libération du camp, "Envoyé spécial" l'a rencontrée au mémorial de la Shoah, à Paris.

Le 27 janvier 2025, le monde commémore les 80 ans de la libération du camp d'Auschwitz-Birkenau. En France, il resterait une cinquantaine de rescapés de ce camp d'extermination où périrent presque un million de juifs durant la Seconde Guerre mondiale. A 96 ans, Esther Senot, déportée le 2 septembre 1943, continue à témoigner de l'enfer qu'elle a traversé. Avant d'être envoyée au crématoire, les dernières paroles de sa sœur, qu'elle a retrouvée au camp, ont été celles-ci : "Tu me promets, si tu as la chance de revenir, de raconter ce qui nous est arrivé, pour qu'on ne soit pas les oubliés de l'Histoire…" 

A ses côtés devant les photos des déportés exposées au mémorial de la Shoah, à Paris, Ginette Kolinka accomplit ce travail de mémoire depuis plus de vingt ans. A presque 100 ans, elle continue à faire le tour des écoles pour faire comprendre aux jeunes où mènent la haine et le refus de la différence. Des neuf personnes de sa famille qui ont été déportées, elle est la seule à être revenue.

Devant le visage de son petit frère Gilbert, "adorable", qui "travaillait bien à l'école", la vieille dame se demande ce qu'il serait devenu s'il avait survécu. "Un gangster ? Pourquoi pas ?" imagine-t-elle avec humour, avant de livrer un récit particulièrement douloureux.

"Un remords constant"

Ginette, qui s'appelait alors encore Cherkasky, a été déportée à Auschwitz un 13 avril 1944, en même temps que Gilbert, 12 ans, et leur père. A l'arrivée, alors que le voyage en wagon à bestiaux a été extrêmement éprouvant, il faut encore marcher jusqu'au camp… Pour qu'ils se reposent, la jeune fille de 19 ans croit bien faire en insistant pour que son père et son frère montent dans un camion, à la descente du train.

"Et papa, Gilbert sont montés dans le camion, raconte-t-elle. Et j'ai appris que j'avais envoyé papa et Gilbert à la mort." Le camion allait tout droit à la chambre à gaz. Ginette Kolinka en garde "un remords constant" qui l'a "transformée complètement".

Sa mère, confie-t-elle, "n'a jamais pu réaliser qu'elle ne reverrait plus son mari et son fils". Ginette, elle, s'estime chanceuse de l'avoir retrouvée ainsi que ses sœurs. Retrouvé aussi, l'appartement de son enfance qu'elle habite toujours et où elle aura donc "vécu un siècle – sauf pendant la guerre". 

Extrait de "Ginette Kolinka : mémoire vive", un reportage à voir dans "Envoyé spécial" le 23 janvier 2025.

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