En Chine, plusieurs millions de livreurs auront désormais accès à la sécurité sociale

C’est une petite révolution pour une profession dont on connaît les conditions de travail très difficiles dans les grandes villes chinoises. Plusieurs plateformes qui emploient ces livreurs ont annoncé qu’elles vont désormais payer les cotisations sociales pour certains de leurs employés.

Article rédigé par Sébastien Berriot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des livreurs en attente de commandes dans une rue de Pékin (Chine) en septembre 2024 (WANG ZHAO / AFP)
Des livreurs en attente de commandes dans une rue de Pékin (Chine) en septembre 2024 (WANG ZHAO / AFP)

Les livreurs pour les Chinois, c’est une véritable institution, beaucoup plus qu'en France. Ils ont une place centrale dans la vie quotidienne en Chine, où presque tout se fait livrer à domicile. Chaque minute, 56 000 repas et produits alimentaires sont livrés dans le pays, et pour réaliser ce travail ce sont plus de dix millions de livreurs qui parcourent nuit et jour les grandes villes chinoises sur leurs scooters électriques.

Les conditions de travail sont très dures, le manque de sommeil notamment : devant les restaurants, on voit ces livreurs dormir sur leurs véhicules en attendant les commandes. Ces hommes et femmes sont des travailleurs migrants, c’est-à-dire des Chinois des campagnes qui viennent travailler dans les grandes villes. Ce qui signifie que sur leur lieu de travail, à Pékin, Canton ou Shanghai, ils n’ont pas accès à la sécurité sociale et ne peuvent pas donc être pris en charge en cas de maladie. Parce qu’en Chine, vous cotisez dans votre région d’origine et vous devez y retourner pour vous faire soigner.

La nouveauté, c’est donc que les plateformes qui emploient les livreurs ont commencé à se soucier de ce problème. La dernière en date, Meituan, la plus importante de ces plateformes, spécialisée dans la livraison de repas, a annoncé qu’elle va fournir des prestations de sécurité sociale à une partie de ses livreurs, employés à temps plein ou à temps partiel stable. La plateforme, qui emploie plus de sept millions de livreurs, ne dit pas combien d’employés vont être concernés précisément, mais c’est déjà une réelle avancée qui va permettre à une partie des livreurs de se faire soigner correctement dans les hôpitaux avec une prise en charge.

Les plateformes sous la pression des autorités

La lutte contre la précarité et la pauvreté est l’une des priorités du gouvernement chinois, qui promeut la prospérité commune pour éviter de possibles contestations. Un objectif pas vraiment compatible avec ces travailleurs pauvres particulièrement  visibles dans les grandes villes chinoises. Ce n’est pas anodin si l’annonce de la plateforme Meituan est intervenue au lendemain d’une rencontre entre Xi Jinping et les grands patrons du secteur privé. Le président les avait invités à promouvoir le sens de la responsabilité nationale.

Les plateformes n’ont pas tardé à prendre des mesures. Question d’image aussi auprès de leurs clients : à l’automne dernier, un livreur de 55 ans dans la ville de Hangzhou s’était effondré de fatigue sur la route et était décédé, ce qui avait suscité une vive polémique sur les réseaux sociaux. Le paiement des cotisations de sécurité sociale fait partie de la réponse.  

Pour les livreurs, c’est aussi une juste récompense : pendant les années Covid, ils ont servi de bouée de sauvetage, ravitaillant des millions de Chinois confinés dans leurs appartements. La mesure va entrer en vigueur dans les prochaines semaines. 

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