La transition menacée en Syrie après de nouvelles violences communautaires

Des affrontements entre groupes armés et membres de la communauté druze ont fait plus de 100 morts cette semaine dans la banlieue de Damas. Des violences qui remettent en cause le processus de transition menée par le nouveau pouvoir, alors que le quartier présidentiel a été visé par une frappe israélienne la nuit dernière.

Article rédigé par Nicolas Teillard
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Une voiture détruite après des affrontements sectaires près de Damas le 1er mai 2025. Le chef spirituel druze syrien, Cheikh Hikmat al-Hijri, a condamné une "campagne génocidaire" contre son peuple, après deux jours d'affrontements sectaires meurtriers. (OMAR HAJ KADOUR / AFP)
Une voiture détruite après des affrontements sectaires près de Damas le 1er mai 2025. Le chef spirituel druze syrien, Cheikh Hikmat al-Hijri, a condamné une "campagne génocidaire" contre son peuple, après deux jours d'affrontements sectaires meurtriers. (OMAR HAJ KADOUR / AFP)

Une frappe a touché le quartier présidentiel syrien, à Damas, revendiquée par l'armée israélienne. Un signal clair envoyé par le puissant voisin au nouveau régime syrien, au moment où le pays est traversé par de nouvelles et vives tensions communautaires. Bientôt cinq mois après la chute de Bachar Al-Assad, l'épisode illustre la fragilité du processus de transition engagé par le nouveau pouvoir en place, et prouve que le chemin de la réconciliation est encore long.

Un immense défi mis en péril, il y a quelques semaines déjà, par le massacre de centaines de personnes de la communauté alaouite, celle du président déchu, qui a montré combien les plaies du passé étaient difficiles à refermer. Cette semaine, c'est la communauté druze qui a été la cible de violences. Une communauté religieuse très minoritaire, composée de quelques centaines de milliers de membres vivant à cheval entre le sud de la Syrie, du Liban, et le nord d'Israël.

Des Druzes restés à l'écart de l'opposition à Bachar Al-Assad pendant la guerre civile, et considérés comme hérétiques par les musulmans sunnites qui composent les groupes armés liés au nouveau pouvoir. Des rancœurs politiques et religieuses qui sont sans doute liées aux violences qui ont débuté lundi soir dans la banlieue de Damas, et qui ont fait plus de 100 morts en deux jours, selon un décompte de l'Observatoire syrien des droits de l'homme. Une "campagne génocidaire", dénonce le plus influent chef religieux druze, qui s'en est pris au  gouvernement, et qui a appelé à une "intervention internationale immédiate". 

Le rôle central d'Israël

Ces affrontements affaiblissent clairement l'autorité du nouveau régime, parce qu'ils remettent en cause tout le processus de transition basé sur le pari politique de l'intégration des différentes communautés, à qui une importante autonomie est promise. Ahmed al-Charaa a beau avoir dénoncé ces violences et répété son "engagement à protéger toutes les composantes du peuple syrien", le pari du jeune président est mis à mal par un manque d'autorité sur certaines factions et par la désorganisation des forces de sécurité installées dans le chaos de la chute du régime Assad. La Syrie compte aujourd'hui tout un millefeuille d'anciennes brigades rebelles ou d'organisations locales de sécurité. Beaucoup de ces groupes ont été intégrés à l'armée ou à la police mais se révèlent difficiles à gérer. Et puis la communauté druze est elle-même divisée entre ceux qui veulent prendre part à la transition politique et les partisans d'un repli communautaire sous la protection d'Israël.

Israel joue d'ailleurs un rôle central dans le chaos actuel en Syrie, avec des incursions répétées de son armée dans le Golan et des centaines de bombardements sur le pays depuis cinq mois. L'État hébreu veut éliminer tout ce qu'il reste de menaces dans un pays qui servait de pont entre l'Iran et le hezbollah libanais. Mais ce qui apparaît manifestement, c'est que Benjamin Netanyahou ne souhaite pas laisser prospérer chez son voisin, un pouvoir aux mains d'un ancien chef jihadiste. Derrière le soutien à la communauté druze, la frappe de la nuit dans le quartier présidentiel résonne comme un sérieux avertissement.

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