Madrid attire les grandes fortunes et les prix de l'immobilier explosent

La capitale espagnole séduit les très grandes fortunes internationales à la recherche de biens exclusifs. C’est bien pour l’économie, mais pas idéal pour la population locale qui voit les prix du logement, déjà soumis à de fortes pressions, grimper en flèche.

Article rédigé par Mathieu de Taillac
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Une vue du centre-ville de Madrid. Photo d'illustration. (DANIEL FOURAY / MAXPPP)
Une vue du centre-ville de Madrid. Photo d'illustration. (DANIEL FOURAY / MAXPPP)

Madrid a été classée ville la plus attractive du monde par une agence immobilière internationale. La capitale espagnole attire notamment beaucoup de très riches familles latino-américaines. Des gens qui cherchent un sublime pied à terre à l’abri des soubresauts économiques, sociaux et politiques de leurs pays d’origine. Il y a évidemment la facilité de la langue et la proximité culturelle. Puis la région de Madrid pratique une politique d’attractivité fiscale, en baissant les impôts.

Sauf que cette politique peut déboucher sur un paradoxe. Daniel Sorando, docteur en sociologie à l’Université de Saragosse et auteur de First we take Manhattan : la destruction créative des villes explique : "Dans les villes latino-américaines, les niveaux d’insécurité sont très élevés et les enfants des familles les plus fortunées ne se déplacent qu’en voitures blindées, protégées par des gardes du corps armés. Ce n’est pas le cas à Madrid. Mais par leur arrivée, ils contribuent à installer le même projet économique qui encourage ces inégalités, et qui, à moyen terme peut transformer Madrid en une ville tellement inégale qu’elle engendre le même type d’inconvénients, de problèmes sociaux et de santé que ceux qui les ont poussés à fuir leurs villes d’origine".

Madrid n’est pas encore Caracas ou Mexico, mais c’est vrai que l’inégalité y est plus forte que dans le reste de l’Espagne, et les services sociaux, la santé publique par exemple, sont de plus en plus saturés.

Un phénomène qui ne se limite pas aux beaux quartiers

Le quartier de Salamanca, par exemple, qui commence au nord du très beau parc du Retiro, est clairement la cible de choix, avec une ou deux autres zones du centre ou de la périphérie nord. Mais ça, c’est l’effet direct et il y a aussi des effets indirects. "Selon un effet tache d’huile, des quartiers contaminent les autres dans la mesure où ils expulsent des anciens habitants qui doivent chercher de nouveaux quartiers où habiter, explique Daniel Sorando. Il y a sans aucun doute un effet domino. Des quartiers centraux les plus gentrifiés aux périphéries les plus lointaines où les personnes déplacées ajoutent à leur pauvreté la solitude : ils perdent les relations sociales dont dépend leur bien-être."

Double peine, donc, pour les classes moyennes et les familles modestes de Madrid, expulsées du centre-ville et déboussolées loin de leurs relations habituelles.

Le gouvernement face à la crise du logement

Le gouvernement a multiplié les annonces ces derniers mois. Par exemple, la fin des golden visas. Mais la vérité, c’est que les Latino-Américains en ont rarement besoin, ils peuvent être naturalisés espagnols en deux ans. Il y a aussi une taxation très forte des étrangers non européens qui achètent un bien. Mais c’est uniquement pour ceux qui ne résident pas dans leur nouvelle acquisition.

Le gros problème, c’est l’offre insuffisante, en particulier une offre abordable. Dernière idée du gouvernement, 1,3 milliard d’euros pour construire 15 000 logements préfabriqués par an. C’est toujours ça de pris, mais on reste très loin du compte. Selon la banque d’Espagne, il faudrait construire 200 000 logements chaque année pour absorber la demande.

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