"Ça a été une super expérience", témoigne Marie Cau, la première femme transgenre élue maire en France

Élue en 2020, elle démissionne en janvier 2025, épuisée par sa fonction. Six mois plus tard, Marie Cau vit toujours à Tilloy-lez-Marchiennes. Elle revient sur ces cinq années de maire, à la fois riches et douloureuses.

Article rédigé par Alain Gastal
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Marie Cau, devant la mairie de Tilloy-lez-Marchiennes, le lendemain de son élection, le 24 mai 2020. (FRANCOIS LO PRESTI / AFP)
Marie Cau, devant la mairie de Tilloy-lez-Marchiennes, le lendemain de son élection, le 24 mai 2020. (FRANCOIS LO PRESTI / AFP)

Le 14 janvier 2025, la maire de Tilloy-lez-Marchiennes, un village de 530 habitants près de Valenciennes, envoie sa lettre de démission au préfet du Nord. Marie Cau était la première personne transgenre élue maire en France, c'était en 2020. Un mandat qu'elle ne terminera pas, épuisée par sa fonction. Mise en minorité par son conseil municipal, elle jette l'éponge. "Les agressions que j'ai subies, c'est surtout des agressions en tant que maire, résume-t-elle à ce moment-là. Les gens, quand ils viennent voir un maire, au lieu de dire 'j'ai un problème, qu'est-ce qu'on peut faire pour trouver une solution', ils commencent par lui crier dessus."

"Ça a été une super expérience", confie Marie Cau, six mois après sa démission. Elle vit toujours à Tilloy-lez-Marchiennes, juste en face de la mairie et garde donc un souvenir positif de cette expérience en tant qu'élue d'un village.

"Quand on est une personne transgenre, on se cache toute la vie. Être une personne qui devient connue et appréciée pour ce qu'elle est, c'est une rédemption quelque part, ça fait du bien."

Marie Cau

sur franceinfo

"C'est une expérience qui est extrêmement positive, poursuit-elle. Malheureusement, c'est ce qu'on voit un peu partout dans les petits villages, c'est toujours une minorité de gens un peu toxiques, qui ont des problèmes d'ego, d'intérêts personnels, qui font un jeu de basse politique et c'est vraiment dommage". Elle n'est donc pas déçue de cette expérience, plutôt de la façon dont "notre société évolue". Elle espérait "créer une dynamique", mais elle n'a pas réussi à "mobiliser" ses concitoyens. "Les gens sont casaniers et ne veulent pas s'investir. C'est très difficile de mobiliser sur un événement du village. C'est devenu très renfermé sur soi. Si les gens ne veulent pas s'investir, je ne peux rien faire."

"Être une personne transgenre ne m'a pas aidé"

Alors, elle le reconnaît, "être une personne transgenre ne m'a pas aidé". Mais, elle insiste, ce n'était pas la principale difficulté qu'elle a rencontrée. Le plus dur, assure-t-elle, c'était les problèmes que "tous les petits maires ruraux rencontrent : le manque de moyens, les gens qui veulent tout, tout de suite." "Le fait d’être une personne transgenre n'a pas amélioré les choses. C'était d'autant plus facile de se moquer, de me dénigrer, etc. Jamais en public, mais dans un village, tout se sait. Des propos tenus étaient ouvertement transphobes, c'est clair. C'était un facteur aggravant, mais ce n'était pas le principal."

"Quand vous êtes une personne LGBT, soit vous survivez, soit vous crevez, faut être réaliste."

Marie Cau

sur franceinfo

Elle l'assure, en tant que personne LGBT, elle a l'habitude de subir des attaques personnelles, ce qui l'a plus gênée, c'est sa notoriété. "Ça a généré beaucoup de jalousie, explique-t-elle. J'entendais 'Oui, elle ferait mieux de s'occuper de la mairie', alors que je bossais 10 heures par jour pour la mairie, mais ce n'était jamais assez. On m'a beaucoup critiqué alors que j'ai obtenu beaucoup pour le village et j'ai fait avancer des chosess justement par ma notoriété."

Cette expérience lui a-t-elle donné envie de se lancer dans un nouveau mandat ? "Dans tous les cas, répond-elle, je vais donner un coup de main aux associations et je continuerai à porter ma voix qui est singulière". Mais à court terme, elle pense surtout à se reposer, après "cinq ans de travail à fond" et "deux années de harcèlement permanent à la mairie", qui l'ont "épuisée". "Après, les idées, j'en ai beaucoup", assure-t-elle.

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