Édito
Condamnation de Marine Le Pen : le RN intensifie sa riposte, notamment contre la justice, une stratégie risquée

Le parti d'extrême droite va muscler sa stratégie pour défendre leur leader. Marine Le Pen a, de son côté, décidé d'attaquer la justice.

Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Marine Le Pen, présidente du groupe RN à l'Assemblée nationale, lors de son arrivée au tribunal de Paris, le 31 mars 2025. (THOMAS SAMSON / AFP)
Marine Le Pen, présidente du groupe RN à l'Assemblée nationale, lors de son arrivée au tribunal de Paris, le 31 mars 2025. (THOMAS SAMSON / AFP)

Après la condamnation de Marine Le Pen, le RN intensifie sa riposte avec des tracts, une pétition et un meeting dimanche à Paris. Un "complot", une "persécution du système", un "coup des francs-maçons", "des juges aux ordres, des politiciens corrompus, des intellectuels vendus qui n’ont qu’une obsession : barrer la route au Front National par tous les moyens". Tout ça, c’était il y a 27 ans, le 21 février 1998. Des mots lancés par Jean-Marie Le Pen à ses troupes chauffées à blanc qu’il faisait défiler dans les rues de Versailles contre les juges, déjà, qui voulaient lui infliger une peine d’inéligibilité pour avoir molesté une élue PS.

Quels seront les mots de sa fille dimanche lors de son meeting parisien ? On en a eu un aperçu mardi quand Marine Le Pen a accusé "le système" d’avoir "sorti la bombe nucléaire" pour l’écarter d’une présidentielle qu’elle se dit certaine de gagner. Toute la journée, le RN a redoublé d’attaques toujours plus violentes contre la justice et le pouvoir. Et à l’Assemblée, les députés lepénistes ont abandonné la stratégie de la cravate pour transformer l’hémicycle en meeting trumpiste et vociférer, sur un ton quasi séditieux, contre la "trahison de l’État de droit".

Déclarer la guerre à la justice

Pourquoi ce choix ? Parce que Marine Le Pen a décidé de déclarer la guerre à la justice. Finie la fameuse "dédiabolisation" et la quête de respectabilité, place à la brutalisation : guidée par la colère, elle retrouve les accents populistes de son père. Une rechute. Les réflexes sont les mêmes : d’abord ressouder le clan autour du Chef menacé. L’ambitieux Jordan Bardella, qui ne s’est guère affiché au procès, a été sommé de monter en première ligne, comme Bruno Mégret jadis. Les mots d’ordre sont identiques. En 1998, c’était : "Avec Le Pen, défendons les libertés ! Les pourris en prison, justice pour le Front !".

Dimanche, ce sera : "Sauvons la démocratie, Défendons Marine !". Les ressorts complotistes n’ont pas changé – les magistrats sont forcément "politisés" et les médias forcément "aux ordres" - et la violence verbale se déchaîne de nouveau contre la "tyrannie des juges rouges" et "l’oppression du système".

Une stratégie politiquement risquée

Attaquer des juges indépendants n’est pas sans risque pour un parti qui prétend gouverner le pays et donc les institutions. Jusqu’où cibler les magistrats, quand celle qui a condamné le RN a été placée sous protection parce qu’elle croule sous les menaces de mort ? Et quand on espère obtenir leur clémence en appel. Marine Le Pen veut se victimiser pour galvaniser ses partisans en surfant sur le climat illibéral impulsé par Donald Trump, Viktor Orban ou Jair Bolsanaro, cette amicale de leaders populistes en guerre avec les juges, qui lui ont tous apporté leur soutien.

De père en fille, le lepénisme est toujours un test pour l’indépendance de la justice et la solidité de nos institutions démocratiques.

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