Édito
Attentat raciste à Puget-sur-Argens : le profil du suspect embarrasse le RN

Après le meurtre raciste dans le Var, samedi, qui a coûté la vie d'Hichem Miraoui, un Tunisien de 46 ans, le Rassemblement national est gêné par le profil du tireur qui ne cache pas ses sympathies pour le parti d'extrême droite.

Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Salon de coiffure où travaillait Hichem Miraoui, abattu samedi 31 mai par son voisin. (VIKEN KANTARCI / AFP)
Salon de coiffure où travaillait Hichem Miraoui, abattu samedi 31 mai par son voisin. (VIKEN KANTARCI / AFP)

Il y a comme un sérieux malaise au sein du Rassemblement national, car l’auteur présumé du meurtre d'Hichem Miraoui, 46 ans, tué samedi 31 mai de cinq balles en raison de son origine, ne cache pas ses sympathies pour le RN. L'homme arrêté, Christophe B., 53 ans, est l'auteur de nombreux messages violents et haineux sur les réseaux sociaux - postés avant et après le meurtre, d'appels aux meurtres de musulmans, mais aussi d'appels à voter en faveur du RN.

Pressé de voir "Marine ou Jordan" arriver au pouvoir pour "virer les immigrés", nostalgique de "Jean-Marie" [Le Pen] qui "nous avait bien dit qu'on serait dans la merde", le suspect est un fidèle des publications du maire RN de Fréjus David Rachline, ou de Marine Le Pen elle-même, qu'il lui arrivait de reposter sur son compte Facebook.

Une indignation de façade, mais des députés qui restent muets

Alors que Bruno Retailleau a reconnu "un crime raciste" avec "une dimension terroriste" dans les actes, le RN a aussi clairement condamné cet acte. Un "meurtre abject", selon les mots de Marine Le Pen, un "assassinat aux motifs racistes qui révulse la France" pour Jordan Bardella. La direction du parti récuse tout lien entre le discours anti-immigrés du RN et les obsessions racistes de l'assassin présumé.

Mais la plupart des députés lepénistes se terrent. Depuis les violences qui ont suivi la victoire du PSG, ils sont intarissables pour dépeindre un pays à feu et à sang, en proie aux "racailles" de "la banlieue non assimilée" et de "l'immigration incontrôlée". Mais ils restent muets au moment d'évoquer un assassinat politique dont le parquet national antiterroriste s'est saisi. Et ceux qui le font se contentent d'y voir une preuve de plus de "l'ensauvagement" du pays, ou l'acte d'"un type qui n'est pas équilibré dans son raisonnement" selon le porte-parole du RN Laurent Jacobelli.

Un racisme dénié, mais qui colle à la peau

Le RN s'est toujours défendu de faire preuve de toute forme de racisme. C'était déjà ce que répétait Jean-Marie Le Pen. Sa fille s'emploie depuis des années à écarter les cadres les plus sulfureux. Mais le parti enchaîne les rechutes. Aux législatives de juillet 2024, plusieurs dizaines de candidats ont été épinglés pour des propos racistes, antisémites ou homophobes. Et le site Les Jours vient de révéler l'existence d'un groupe Facebook, "La France avec Jordan Bardella", qui rassemble plus de 10 000 adhérents, sympathisants - et même neuf députés du RN - où pullulent des messages du genre : "Les Arabes dehors !" ou : "Virez tous ces sionistes qui vivent sur le cul des Français !".

Le parti de la "préférence nationale" a beau récuser tout racisme, 96% de ses électeurs considèrent qu'il y a trop d'étrangers en France, et presque autant jugent l'islam incompatible avec la société française, selon la dernière enquête "Fractures françaises" d'Ipsos. Reste donc une question incontournable, plus pressante encore après l'assassinat de Puget-sur-Argens : si le RN ne propage pas de discours raciste, pourquoi autant de racistes s'en réclament-ils ?

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