Internet est-il mort ? Quand les machines inondent le web de contenus absurdes
Une phrase de Sam Altman, patron d’OpenAI, a relancé une vieille théorie du complot : celle d’un Internet "mort", où les humains auraient été remplacés par des robots. Avec la prolifération des contenus générés par intelligence artificielle, cette hypothèse paraît soudain moins farfelue.
"Je n’ai jamais pris la théorie de l’internet mort très au sérieux, mais il semble qu’il y ait vraiment beaucoup de comptes pilotés par des intelligences artificielles", écrivait début septembre 2025 Sam Altman, le créateur de ChatGPT, sur X (ex-Twitter). Derrière l’ironie, une inquiétude : Internet ne serait plus ce lieu d’échange foisonnant imaginé dans les années 1990, mais un espace dominé par des machines qui produisent… pour d’autres machines.
La thèse d’un "web mort" a vu le jour en 2021, sur un forum obscur. Son auteur affirmait que la majorité des messages, vidéos et articles en ligne n’étaient plus l’œuvre d’humains, mais de robots qui se répondent entre eux. À l’époque, cela paraissait délirant. Aujourd’hui, avec l’explosion de l’intelligence artificielle générative, elle sonne presque comme une évidence.
Des contenus absurdes
En 2024, les bots, ces logiciels automatiques, qui imitent des internautes, ont représenté 51 % du trafic Internet, selon la société de cybersécurité Imperva. Pour la première fois, les machines ont donc dépassé les humains. Conséquence immédiate : des millions de publicités se sont affichées non pas devant de vrais utilisateurs, mais devant des scripts informatiques.
Mais la meilleure illustration de cette dérive reste le phénomène du brainrot content, littéralement, le "contenu qui pourrit le cerveau". Ce sont ces vidéos absurdes qui pullulent sur TikTok ou Instagram : chats en 3D qui répètent les mêmes gestes à l’infini, personnages difformes engloutissant des quantités improbables de nourriture, histoires inventées de toutes pièces par des IA. Des séquences sans auteur, ni créativité, mais qui hypnotisent des millions d’utilisateurs. Leur but n’est pas de raconter quelque chose, mais seulement de retenir l’attention, quelques secondes de plus, pour nourrir les plateformes dont le modèle économique repose sur le temps passé à scroller.
Ce cercle devient vite vicieux. Les IA produisent du contenu qui est promu par les algorithmes, lequel sert ensuite à entraîner d’autres IA. Internet s’auto-alimente et tourne en boucle. Des chercheurs d’Oxford et de Toronto ont montré que les modèles finissent par "s’effondrer" lorsqu’ils se nourrissent uniquement de données artificielles.
Ce basculement a aussi des conséquences pour les humains. Remplir le web avec des robots coûte bien moins cher que rémunérer de vrais créateurs. Les plateformes y gagnent : elles ont du contenu à l’infini et captent toujours plus d’attention. Même si générer du contenu par IA coûte aussi moins cher pour les internautes, eux, perdent en diversité et en authenticité.
Pire, cette logique commence à influencer nos propres comportements. Aux États-Unis, des linguistes ont montré que des mots typiques de ChatGPT, comme "méticuleux" ou "approfondir", apparaissent de plus en plus souvent dans les podcasts et conversations. L’intelligence artificielle n’inonde pas seulement le web : elle uniformise notre langage et nos expressions.
Au départ, Internet avait été conçu comme un espace d’échange entre individus, pensé par ses pionniers comme un outil au service de la liberté et de la créativité. Aujourd’hui, il ressemble de plus en plus à une autoroute où circulent des flux automatiques, alimentés par des robots pour des robots. La "théorie de l’internet mort" avait tout d’une fantaisie complotiste. Mais à l’heure du brainrot content et des algorithmes qui parlent aux algorithmes, elle semble prendre une inquiétante consistance.
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