Quand les tueurs en série deviennent des idoles 2.0
Avec la sortie de la nouvelle saison de Monster, consacrée au tueur Ed Gein, Netflix relance la polémique : ses séries "true crime" transforment les criminels en icônes glamour. Casting trop séduisant, emballement sur les réseaux, fascination morbide : la frontière entre fiction et réalité devient floue.
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Depuis vendredi, la nouvelle saison de Monster est en ligne sur Netflix. Et déjà, sur Twitter et TikTok, c’est l’emballement. De jeunes femmes tombent littéralement amoureuses de l’acteur qui incarne le tueur nécrophile Ed Gein. On le trouve "incroyablement sexy", "trop hot". Certains montages lui rendent même hommage comme à une star. Rien de nouveau : la plateforme maîtrise parfaitement l’art de transformer les tueurs en objets de désir
Ed Gein, du macabre au glamour
Dans cette troisième saison de la série produite par Ryan Murphy, Ed Gein est joué par Charlie Hunnam, le héros musclé de Sons of Anarchy et de King Arthur. Dans le premier épisode, l’acteur apparaît nu, regard d’acier et carrure de statue grecque. Difficile de ne pas voir la distance entre ce corps sculpté et le vrai Ed Gein : un fermier du Wisconsin, solitaire, maladif, arrêté en 1957 après avoir tué deux femmes et déterré des dizaines de cadavres. Ses crimes avaient inspiré Psychose, Massacre à la tronçonneuse et Le Silence des agneaux. Pas exactement du matériau romantique.
La recette Netflix : crime, charme et casting
La méthode Ryan Murphy est bien rodée. Dans la première saison, Jeffrey Dahmer, le « cannibale de Milwaukee », était incarné par Evan Peters, ex-idole d’American Horror Story. Les adolescentes l’ont immédiatement trouvé "attendrissant". Pour Halloween, certains parents ont même déguisé leurs enfants en Dahmer.
Dans la deuxième saison, consacrée aux frères Menendez ( deux jeunes ayant tué leurs parents à Beverly Hills dans les années 1980) , Netflix multipliait les plans sur leurs torses musclés et leurs regards complices. Résultat : sur TikTok, des montages "mignons", avec petits cœurs et musique mélancolique, ont fleuri pour célébrer ces meurtriers comme des héros tragiques
L’hybristophilie, ou le syndrome de Bonnie and Clyde
Cette esthétique trouble, entre fascination et fétichisme, fait le succès du genre. Dahmer a dépassé les 800 millions d’heures vues. Mais elle soulève une question : pourquoi ces criminels nous fascinent-ils autant ?
Les psychologues parlent d’hybristophilie, ou syndrome de Bonnie and Clyde : une attirance amoureuse ou sexuelle pour les tueurs. Le phénomène n’est pas nouveau. Ted Bundy, le plus célèbre des serial killers américains, recevait des dizaines de lettres d’admiratrices pendant son procès. Certaines se maquillaient et se pressaient dans la salle d’audience pour croiser son regard. Charles Manson, gourou meurtrier de la "famille" hippie des années 70, recevait jusqu’à 20 000 lettres d’amour par an.
Plus près de nous, Anders Breivik, auteur du massacre d’Utøya en Norvège, reçoit toujours plusieurs centaines de courriers de fans. Et même en France, Nordahl Lelandais, le meurtrier de la petite Maëlys, a trouvé plusieurs fois l’amour en prison.
Quand le crime devient pop culture
En choisissant des acteurs séduisants et en scénarisant la violence comme une tragédie intime, le True Crime exploite cette fascination. Les tueurs y deviennent des personnages complexes, presque romantiques, là où leurs victimes sont reléguées au second plan. On ne se demande plus "comment" ils ont pu commettre l’irréparable, mais "pourquoi", comme s’il s’agissait d’amours contrariées ou de blessures d’enfance.
Le problème, c’est que cette mise en scène brouille la frontière entre empathie et complaisance. Le fait divers devient un produit culturel. Le crime, un matériau de divertissement. Et le tueur, une icône pop. À force de rendre le mal séduisant, Netflix finit par raconter une histoire où la monstruosité s’efface derrière le charisme de ses interprètes. Ces séries captivent, certes, mais au prix d’un étrange renversement : on compatit avec le monstre, on oublie les morts. Derrière la lumière des projecteurs, il ne reste souvent qu’un décor vide et des vies brisées.
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