La canicule, notre obsession

Depuis 1976, les canicules sont devenues un enjeu politique majeur en France.. Leur impact, autrefois perçu comme naturel, est aujourd’hui au cœur des préoccupations sociale

Article rédigé par franceinfo, Fabrice d'Almeida
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un agriculteur confronté à la sécheresse à Toulouse, le 4 août 2003. (MAXPPP)
Un agriculteur confronté à la sécheresse à Toulouse, le 4 août 2003. (MAXPPP)

On ne parle que de cela samedi 28 juin. La belle chaleur sur la France, la canicule. Évidemment, ce n’est pas la première dans notre histoire, mais c’est devenu un enjeu politique. À notre époque, tout problème appelle une solution gouvernementale. La première canicule devenue un véritable problème pour le gouvernement remonte à 1976. Plusieurs vagues de chaleur, à partir du mois de mai, s’abattent sur la France. À Paris, on se promène en maillot de bain sur les bords de Seine en mai et on se baigne en Normandie. Le nord de la France connaît un début de sécheresse, alors que le sud reçoit quelques pluies. L’eau devient une obsession. L’Église organise des prières, des processions et des invocations au Tout-Puissant pour qu’elle vienne. Mais rien ne se passe comme espéré.

De juin à juillet, survient la troisième vague de chaleur. On atteint 37 °C — soit moins que cette année — mais, sur tout le Nord-Ouest, le thermomètre ne descend pas en dessous de 35 °C et reste supérieur à 24 °C, même au cœur de la nuit. Ce sont des records pour l’époque. Les agriculteurs appellent à l’aide. La sécheresse ravage les cultures et le bétail. Le Premier ministre de l’époque, Jacques Chirac, les connaît bien et cherche les moyens d’une aide. Mais en août, il démissionne, remplacé par Raymond Barre.

L"impôt sécheresse de 1976"

Il y aura un "impôt sécheresse" pour aider les campagnes, adopté par le nouveau Premier ministre en octobre 1976. La canicule entre alors dans les mémoires par la fiscalité. C’est la première fois que le mot canicule envahit les médias et la presse.
Justement, ce mot a une portée historique. Selon les linguistes, cela remonte à la Renaissance : canicula veut dire "petite chienne" en latin,  le nom sous lequel on désignait Sirius, dans la constellation du Grand Chien. Les Romains avaient remarqué que le moment des fortes chaleurs d’été correspondait à la période où le Soleil et cette constellation se retrouvaient alignés. On a donc associé le nom de la plus brillante des étoiles aux grandes chaleurs.
Signe que la météo fascinait déjà.

Au Moyen Âge, les historiens du climat, comme Emmanuel Le Roy Ladurie, ont repéré un épisode chaud entre le Xe et le XIVe siècle. Il correspond à un développement démographique, à un "beau Moyen Âge", marqué par la croissance de l’agriculture. Ce réchauffement européen expliquerait que les Vikings aient pu coloniser le Groenland. Tout cela cesse avec la peste et des étés plus difficiles au XVe siècle. En fait, la canicule de 1976 était surtout vue comme une sécheresse.

Après la grande canicule de 2003, qui a vu le constat d’une surmortalité, on a remarqué qu’à l’époque aussi une surmortalité avait frappé les plus anciens. Tout comme en 1983, qui reste, dans la période récente, la plus longue canicule. Désormais, on attend que les politiques s’occupent aussi de la prévention. L’histoire des canicules montre que nos préoccupations évoluent, et changent l’action publique.

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