Meublés touristiques à Paris : "Réduire le nombre de jours maximum" où une résidence principale peut être louée, "n'apportera aucun logement additionnel sur le marché", estime le PDG d'Airbnb France
Comme Londres et Barcelone, Paris prévoit mardi de lutter contre le prix et le manque de logements en s'attaquant au nombre de nuitées autorisées à la location courte durée en 2025. Mais s'attaquer aux résidences principales "ne sert à rien", selon Clément Eulry.
Paris durcit son arsenal anti Airbnb. Dans beaucoup de grandes villes européennes comme Vienne, Londres, Stuttgart ou Barcelone, les maires luttent contre le surtourisme, pour réguler les prix et maintenir des habitants dans les centres-villes. Ces villes sont passées notamment par la limitation du nombre de nuitées autorisées par an pour la location touristique.
Alors que la location d'une résidence secondaire en Airbnb à Paris est déjà interdite, le Conseil de Paris veut s'attaquer à la mise en location de résidences principales. Mais si l'objectif est d'ajouter des logements sur le marché locatif parisien de longue durée, appliquer cette mesure, "ça n'aura aucun impact positif sur le logement, selon Clément Eulry, directeur général d'Airbnb France. Cela aura en revanche des impacts négatifs sur le pouvoir d'achat de ces gens, sur la capacité à garder leur bien à Paris quelquefois, et sur l'activité économique des commerces."
franceinfo : À partir du 1er janvier, une résidence principale à Paris ne pourra être louée que 90 jours maximum dans l'année, contre 120 jours auparavant. Est-ce, selon vous, une bonne idée ?
Clément Eulry : Non, absolument pas. C'est une mesure de plus qui s'additionne aux différentes mesures drastiques qui ont été prises par la mairie de Paris depuis huit ans. Mais cette fois-ci, elle s'attaque aux résidences principales avec soi-disant un objectif de logement. Or, on comprend bien que pour des résidences principales, réduire le nombre de jours maximum où il peut être loué n'apportera aucun logement additionnel sur le marché.
Si on peut louer sa résidence principale trois mois dans l'année, c'est déjà beaucoup, non ?
Je vous confirme que les gens qui louent leur résidence principale entre 90 et 120 jours, c'est une très faible minorité de l'activité des Airbnb à Paris. Cependant, on parle de gens qui ont des vraies situations. Par exemple, une étudiante avec laquelle j'ai parlé récemment, a le droit et s'est accordée avec son propriétaire, pour louer quand elle est en vacances, ce qui lui permet de garder son bien sur plusieurs années. Est-ce qu'on a envie de lui interdire ça ? J'ai beaucoup d'autres exemples, comme des gens qui voyagent pour des raisons professionnelles. Réduire le nombre des jours pendant lesquels une résidence principale peut être louée, cela va-t-il libérer des logements ? Non, puisque ce sont déjà des résidences principales.
Donc ça ne sert à rien ?
Ça ne sert absolument à rien, ça n'aura aucun impact positif sur le logement. Ça aura en revanche des impacts négatifs sur le pouvoir d'achat de ces gens, sur la capacité à garder leurs biens à Paris quelquefois, et aussi sur l'activité économique des commerces. Ce que je remarque, c'est que depuis huit ans, l'ensemble des mesures que la mairie de Paris a prises, sous couvert d'objectifs de logements, n'ont en fait malheureusement pas permis aux Parisiens de pouvoir mieux se loger aujourd'hui qu'auparavant. Les prix immobiliers et des loyers ont continué à augmenter. Et dans le même temps, la destination Paris pour les touristes, notamment les familles françaises et étrangères qui viennent à Paris, s'est enchérie.
La mairie de Paris estime de son côté à 25 000 le nombre de meublés touristiques loués illégalement dans la capitale, et prévoit de doubler l'amende pour transformation illégale, la faisant passer de 50 000 à 100 000 euros. Ça aura un effet dissuasif ?
Mais dissuasif de quoi ? Vous citez un chiffre que je n'ai jamais vu. J'aimerais le voir. Une des propositions que je me permets de faire, c'est de dire : faisons une mission qui permette de regarder la situation et notamment l'impact des mesures contre la location de touristes depuis huit ans.
Mais Paris n'est pas la seule la ville à mettre en place ce type de mesures, Londres l'a fait avant elle, Stuttgart, Barcelone. Énormément de capitales européennes et de grandes villes européennes mettent en place ce type de mesures.
Dans l'ensemble de ces villes, le résultat est le même. Premièrement, il n'y a pas plus de logements sur le marché, la vacance reste aussi forte. Deuxièmement, les prix des loyers de l'immobilier augmentent. Troisièmement, les prix des hôtels augmentent. Pourquoi ? Parce que quand on réduit l'offre d'accueil touristique, les prix augmentent parce que la demande reste. À Barcelone, on voit une surconcentration.
Les prix y ont augmenté de façon hallucinante, avec + 70% en dix ans.
Exactement, et sur Paris + 77% pour le prix des chambres d'hôtel sur six ans.
Donc ça ne fera pas baisser le prix des loyers et ça ne maintiendra pas des habitants dans les centres-villes. Ce qui est aussi l'objectif des élus, on comprend leurs intentions.
Évidemment et c'est pourquoi j'appelle à des mesures efficaces. C'est pour ça qu'une étude pour savoir l'impact des mesures qui ont été prises me semblerait utile. Je demande à la mairie de Paris de réfléchir et de regarder l'impact des mesures et de réfléchir à un autre cadre réglementaire pour Paris afin de libérer des logements. Et aussi de permettre aux touristes, aux familles, de pouvoir profiter de Paris à un tourisme abordable.
Craignez-vous que Paris ne soit la première d'une série de villes qui prennent derrière elles ce type de mesures ? Il y a une loi qui a été adoptée par le Parlement il y a quelques mois et qui permet aujourd'hui aux villes de renforcer leur arsenal "anti-Airbnb" ?
Il y a des mesures efficaces possibles dans l'arsenal. Premièrement : des quotas. C'est pour ça que j'ai décidé de partager l'ensemble des données aux maires pour que, quartier par quartier, ils puissent savoir combien il y a de résidences principales, combien il est de résidences secondaires.
Vous avez mis en place un outil d'aide à la décision des élus il y a quelques semaines.
Afin que s'il y a besoin, dans certains quartiers, d'établir des quotas sur les locations de tourisme, ces mesures puissent être prises. En revanche, prendre des mesures qui n'auront aucun impact sur le logement et seulement un impact négatif sur le pouvoir d'achat, je ne vois toujours pas l'intérêt.
Pour le nouvel an, vous avez mis en place des mesures pour éviter les fêtes qui dérapent. Est-ce que ça arrive souvent et est-ce que la France est particulièrement concernée ?
Les fêtes sont interdites sur Airbnb, je vous le confirme et c'est pour ça qu'il y en a si peu. Pourquoi ? Parce qu'on s'engage très fortement. Premièrement, notre système permet d'identifier a priori avec une très bonne probabilité, la propension de telle ou telle réservation à devenir une fête. Dans ce cas-là, elle est annulée tout de suite. Deuxièmement, les voisins, par l'usage d'une adresse email : voisinage@airbnb.com, peuvent signaler si jamais il y a du bruit. Et troisièmement, on s'est engagé aussi à fournir des détecteurs de bruit dans les logements. Donc en fait, on parle d'un sujet où on peut tout à fait profiter des fêtes de fin d'année, mais dans le calme et dans le respect. Les voyageurs sur les ennemis sont très respectueux puisqu'ils sont chez des gens qui les accueillent.
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