Protéger le consommateur : "une mobilisation très intense" de la part de la DGCCRF, selon Sarah Lacoche
Fraudes, ententes, publicité mensongère est le champ d'action de la DGCCRF particulièrement vaste. Sarah Lacoche, directrice générale de la DGCCRF, dresse le bilan de l’année 2024, marquée par des défis majeurs et évoque les actions de son institution pour protéger consommateurs et entreprises.
Dans un contexte où les enjeux de protection des consommateurs et des entreprises deviennent de plus en plus complexes, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) joue un rôle essentiel. Face aux défis croissants liés aux fraudes, ententes, publicité mensongère ou encore aux nouvelles pratiques commerciales en ligne, l’administration se doit d’être à l’écoute des vulnérabilités des différents acteurs du marché.
Sarah Lacoche, directrice générale de la DGCCRF, revient sur les grandes actions de l’année 2024 et les enjeux pour l’année à venir et explique les priorités et les défis de son institution pour garantir une consommation plus équitable et sécurisée pour tous.
franceinfo : Vous dressez le bilan de l'année écoulée. Quelles sont les spécificités de 2024 s'il y en a ?
Sarah Lacoche : La première, c'est les Jeux Olympiques. Ça a été une année de très, très forte mobilisation de près de 900 agents. Donc c'est important puisqu'on est 3000. Déjà préparés dès 2023 parce qu'il fallait anticiper et on a fait 16 000 contrôles, ce qui est très important parce qu'on en a fait à peu près 65 000 en total sur toute l'année, sur tous les secteurs. Donc ça montre bien la mobilisation jusqu'au dernier moment. Mobilisation très intense pour s'assurer de la bonne information, notamment des touristes dans les hôtels, dans les restaurants, sur les billetteries, mais aussi sur des sujets de sécurité puisqu'on a géré quelques alertes. On a trouvé quelques gourdes avec du bisphénol A, donc c'était important de les retirer du marché.
Est-ce que vous avez rencontré des problèmes particuliers ou est-ce que finalement, globalement, comme nous on l'a ressenti, les Jeux Olympiques se sont plutôt bien passés ?
Les Jeux Olympiques se sont plutôt bien déroulés du point de vue consommateur, on avait aussi fait des efforts vis à vis des touristes. On avait fait des choses traduites en anglais. On a veillé à ce que l'information soit fiable, notamment sur l'hôtellerie-restauration. Mais globalement, le fait qu'on avait mis la pression de contrôle avant les Jeux, tout ça s'est bien déroulé le moment venu.
Ces derniers mois ont été marqués par des crises particulières dans les territoires et les départements d'outre-mer. Mayotte après le passage du cyclone, crise de la vie chère en Martinique qui se poursuit. Le ministre des Outre-mer, Manuel Valls, se rend d'ailleurs à nouveau sur place ces jours-ci. Les produits alimentaires ont pu coûter jusqu'à 40% de plus sur place qu'en métropole. Comment est-ce qu'on peut éviter cela ? Qu'est-ce que vous mettez concrètement en place?
C’est vrai que sur la vie chère en outre-mer, il y a un protocole qui a été signé cet automne en Martinique, qui a fait l'objet d'échanges, locaux notamment. C'est le préfet qui était beaucoup à la manœuvre dessus. Nous, on a contribué aux réflexions et l'idée c'est un peu de mobiliser différents leviers d'action. Il y en a qui sont sur l'octroi de mer, mais il y a aussi sur le fait de demander à chacun des acteurs, notamment il va y avoir une baisse de la TVA également sur ces produits, de répercuter les efforts qui sont faits par chacun des acteurs pour réussir à baisser les prix.
Et ça marche ?
Ça vient de se mettre en place. Le protocole date de l'automne. La baisse de TVA avec le vote du budget, ça prend place un peu plus tard. Donc là, nous, on va rendre un bilan d'ici la fin du mois de mars pour justement mesurer.
"Je pense que ça va se faire au fur et à mesure, parce qu'il y a aussi des effets de stock, c'est à dire que les produits qui étaient déjà achetés dans les rayons ne peuvent pas bénéficier de l'effet de mesure."
Sarah Lacocheà franceinfo
Mais, a priori, on devrait voir un début de baisse des prix dans le volet alimentaire.
Il y a aussi tous les problèmes qu'on rencontre quand on achète en ligne avec le e-commerce. En 2023, vous avez fait détruire pas moins de 225 000 jouets dangereux. Est-ce que, un an plus tard, on est toujours sur ces ordres de grandeur ou est-ce que ça se passe?
C'est vrai que le e-commerce c'est le nombre record de signalements qu'on a sur notre application "SignalConso", on n'en a plus de 100 000. C’est le consommateur qui peut nous envoyer un signalement, c'est transmis à l'entreprise. Ça permet d'avoir une forme de résolution à l'amiable. Mais pour nous, c'est aussi une mine d'informations pour voir là où il y a des problèmes pour les consommateurs. Donc ça, on sait que le e-commerce est un sujet qui signale pas mal de problèmes. Et nous, on fait aussi des prélèvements en matière de sécurité. Et c'est vrai qu'on voit que sur les plateformes en ligne, le taux de dangerosité demeure plus important que sur le commerce physique. Donc, c'est vraiment un message de précaution qu'on peut donner aux consommateurs.
Et en provenance de certains pays en particulier.
Notamment en provenance de certains pays effectivement, des plateformes des pays asiatiques, mais pas que, dès lors qu'on a des produits qui sont importés. On voit que c'est souvent une fragilité pour nous en termes de conformité.
"Il y a un nouveau règlement européen qui est sorti sur la sécurité générale des produits, qui renforce les obligations des grandes plateformes, notamment l'information sur le produit doit être améliorée, elles doivent mieux informer les consommateurs s'il y a eu des retraits ou des rappels."
Sarah Lacocheà franceinfo
Une des armes de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) pour protéger le consommateur, c'est la sanction en cas de fraude, qui peut se traduire par une amende financière. À combien s'élèvent ces amendes pour l'année dernière ?
C'est très variable. On a beaucoup d'amendes qui sont plutôt sur le volet des entreprises, les délais de paiement ou les sanctions des centrales internationales. Donc, là, en autour, j'ai un peu moins de 100 millions d'euros pour cette année et après on fait beaucoup de procédures pénales. Donc là, après, c'est le juge qui va décider du montant de l'amende. C'est très variable, mais c'est vrai que l'an dernier, si on regarde les amendes administratives, on a en tout cas donné des amendes importantes sur le volet des délais de paiement, on va dire qu'on est autour de l'ordre de grandeur d'une quarantaine de millions d’euros.
Ça, c'est pour protéger les entreprises.
C’est pour protéger les entreprises. Et aussi sur le volet des centrales européennes, on parle là des négociations commerciales. On a voulu s'assurer que les centrales européennes, qui donc distribuent en France sur les produits dans la grande distribution, respectaient bien les règles du jeu européen. Certaines ne respectaient pas les règles du jeu français. Et nous avons donc sanctionné.
Vous pensez que la mise en place de ces centrales d'achat européennes sont un contournement de la loi EGalim ?
Certaines dans tous les cas, ne respecte pas, mais pas toutes puisque nous avions vu une centrale qui avait respecté les règles du jeu et qui n'a donc pas été sanctionné.
Est ce qu'il y a des secteurs qui sont des objets de vigilance de votre part ?
Il y a des objets sur lesquels nous maintenons une vigilance particulière parce que c'est un point d'attention des consommateurs. On est vigilant sur tout ce qui est francisation dans le domaine alimentaire, c'est à dire les gens qui importent des produits, qui prétendent que c'est français, alors qu'en fait c'est pas français parce que ça pénalise le consommateur qui parfois est prêt à payer plus cher en disant "c’est de la qualité française". On a de la francisation sur des fruits rouges sur lesquels il y a une sanction pénale, ça peut arriver sur des champignons, ça peut arriver sur du vin, l'huile d'olive. Donc ça c'est important parce que ça protège les consommateurs, mais ça protège aussi nos agriculteurs. On regarde aussi beaucoup tout ce qui se passe sur le domaine de la rénovation énergétique parce qu'on sait qu'on a un gros enjeu pour rénover notre parc. Et en même temps, il faut donner de la confiance dans le système. Or, on sait que dans la mesure où il y a des subventions publiques. C'est un domaine qui a attiré beaucoup de fraude et de la fraude très organisé.
"On travaille aussi beaucoup avec l'Agence nationale de l’habitat (Anah), avec d'autres partenaires, pour regarder comment on appréhende le schéma de fraude et comment on peut agir ensemble."
Sarah Lacocheà franceinfo
Vous avez également de nouvelles compétences pour réguler les plateformes et les marchés numériques.
Les grandes plateformes doivent respecter des règles du jeu qui sont importantes. On peut être amené à porter main forte à la commission si elle décide de lancer une enquête. Nous, on contrôle les entreprises françaises, mais on regarde ce que font les autres entreprises qui sont situées dans l'Union européenne.
Est-ce que vous avez un objet de vigilance en particulier pour 2025 ?
Alors, on reste très mobilisés sur nos grandes thématiques. Tout ce qui peut aider à protéger le pouvoir d'achat, l'outre-mer, ça va rester important et on va rester prioriser sur nos grandes priorités qui sont transition numérique et transition écologique.
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