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"La traque de Mohamed Amra" (4/8) : les complices

Le 14 mai 2024, la France a été secouée par une attaque meurtrière et sans précédent au péage d'Incarville. Un fourgon pénitentiaire transportant le détenu Mohamed Amra, 30 ans, surnommé "La Mouche" et connu pour trafic de drogue, a été la cible d'un commando lourdement armé de Kalachnikovs. Cette agression brutale, qui n'a duré que trois minutes, a coûté la vie à deux agents de l'administration pénitentiaire, Arnaud Garcia (34 ans) et Fabrice Moello (52 ans), et en a blessé trois autres. Notre pays a été plongé dans le deuil face à la violence et la sidération, révélant la brutalité du narcobanditisme. Mohamed Amra, qui a participé activement à son évasion en courant derrière ses ravisseurs, réfutant l'hypothèse d'un enlèvement par un clan rival, est rapidement devenu l'homme le plus recherché de France. Dès lors, une traque "hors norme" a été lancée, mobilisant des centaines d'enquêteurs dans le cadre du plan Épervier. Les enquêteurs sont convaincus que le criminel a profité de son incarcération à la maison d'arrêt d'Evreux pour activer son réseau criminel local et recruter le commando d'Incarville.

L'enquête s'est concentrée sur les complices de Mohamed Amra, des "malfaiteurs d'habitude" capables d'exercer des violences régulières, impliqués dans le trafic de stupéfiants, les enlèvements, séquestrations et extorsions de fonds. Parmi eux, "Prof", un homme de 32 ans originaire d'Evreux, est soupçonné d'être le chef du commando. Arrêté en Espagne dans une luxueuse villa, il a été remis à la France, mais garde le silence pour l'instant. Plusieurs jeunes suspects du commando appartiendraient à un groupe mystérieux et très soudé appelé la BMF ou Black Manjak Family. À l'origine un label de musique fondé par le rappeur Koba LaD, soupçonné d'avoir contribué au financement de la cavale de Mohamed Amra. Bien que l'avocat de Koba LaD soutienne qu'il ne s'agit que d'un label musical inspiré d'une série américaine, la police judiciaire estime qu'il s'agit d'une organisation criminelle dangereuse et violente, dont l'activité première est le trafic de stupéfiants et dont les membres sont connus pour des faits graves. Les enquêteurs ont établi que plusieurs membres du commando étaient "très proches et membres de la BMF", démontrant une "collectivité de solidarité" autour d'Amra.

La traque de neuf mois de Mohamed Amra, qui a finalement été localisé et arrêté le 22 février 2025 en Roumanie, a été complexifiée par la "très bonne hygiène numérique" des complices et d'Amra lui-même. Ils ont utilisé des appareils modernes, des abonnements sans identification, des VPN et ont changé fréquemment de matériel pour échapper aux investigations. Amra a passé sa cavale dans différents appartements en France avant de rejoindre la Roumanie, tout en continuant ses activités criminelles via des réseaux cryptés. L'enquête a également mis en lumière le rôle crucial des "petites mains", des dizaines de suspects qui ont fourni une aide logistique à Amra, que ce soit en volant des véhicules, en fournissant de fausses identités, des logements, de la nourriture ou des téléphones. Bien que ces actes puissent sembler anodins, les magistrats soulignent leur gravité importante lorsqu'ils sont liés aux crimes perpétrés. Plus d'une quarantaine de suspects sont déjà mis en examen pour avoir aidé Mohamed Amra. L'enquête se poursuit pour que "justice soit faite" et pour identifier le tireur. 

Un podcast du service Police-Justice de franceinfo, avec en invités fils rouges : le commissaire Yann Sourisseau, ex-patron de l’Office central de lutte contre le crime organisé (OCLCO), et Eric Serfass, le procureur adjoint chargé de la Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (JUNALCO). 

Production : David Di Giacomo, Pierre de Cossette, Gaële Joly, Mathilde Lemaire, Yannick Falt | Réalisation : Vanessa Nadjar | Rédaction en chef : David Di Giacamo | Coordination : Pauline Pennanec’h | Mixage : Raphaël Rasson