À quoi servent les inocles, ces brins d'ADN géants dans notre bouche ?

Des chercheurs japonais ont découvert dans la salive humaine des fragments d’ADN 30 fois plus longs que la normale. Ils pourraient jouer un rôle clé dans la santé buccale, le système immunitaire… et même ouvrir de nouvelles pistes contre certains cancers.

Article rédigé par franceinfo - Bill François
Radio France
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Temps de lecture : 2min
Les chercheurs ont remarqué que les trois quarts d’entre nous portent dans la bouche des fragments d’ADN 30 fois plus gros que d’habitude. Photo d'illustration. (PETER DAZELEY / PHOTODISC / GETTY IMAGES)
Les chercheurs ont remarqué que les trois quarts d’entre nous portent dans la bouche des fragments d’ADN 30 fois plus gros que d’habitude. Photo d'illustration. (PETER DAZELEY / PHOTODISC / GETTY IMAGES)

C'est une découverte qui laisse bouche bée. Une équipe de l’université de Tokyo vient de s’apercevoir que dans notre bouche flottent des brins d’ADN géants que personne n’avait encore déchiffrés. Ces dernières années, la science a découvert de nombreuses formes d’ADN inhabituelles dans le microbiote du sol – parmi les micro-organismes qui vivent dans la terre, sous nos pieds. Cela a inspiré les chercheurs japonais, qui ont décidé de faire la même étude, mais dans notre bouche.

Comme le sol des forêts, notre bouche abrite un microbiote très varié. Plusieurs centaines de milliers d’espèces de petits microbes interagissent avec nous, nous brossent les dents (ou les salissent), protègent notre système immunitaire… Il y a même plus de cellules d’autres espèces que de nos propres cellules humaines.

Un ADN porté par des bactéries

En étudiant l’ADN de ce microbiote, dans des échantillons de salive de 476 volontaires, les chercheurs ont remarqué que les trois quarts d’entre nous portent dans la bouche des fragments d’ADN 30 fois plus gros que d’habitude.

Ces brins d’ADN, baptisés inocles, sont très longs, donc difficiles à étudier, car il faut séquencer, déchiffrer toute leur information. Mais on sait désormais qu’ils sont portés par des bactéries, Streptococcus salivarius, sans pour autant faire partie de l’ADN principal de la bactérie. C’est plutôt une sorte de kit externe, comme un manuel de survie qui contient des instructions génétiques que la bactérie, ou d’autres, peuvent utiliser si elles en ont besoin.

Une piste contre certains cancers ?

On pense qu’à l’échelle microscopique, cet ADN sert aux bactéries à s’adapter aux conditions changeantes qui règnent dans notre bouche. À notre échelle à nous, cette adaptation a sans doute de grandes conséquences. C’est peut-être une aide pour notre santé buccale ou pour notre système immunitaire, qui pourrait même, éventuellement, se transmettre d’une personne à l’autre.

Il semblerait aussi que les personnes atteintes de certains cancers possèdent moins d’inocles que les autres, donc que ces inocles joueraient un rôle dans des mécanismes liés à ces cancers, offrant potentiellement une piste pour les combattre. On en est encore au tout début, à l’amuse-bouche, mais c’est extrêmement prometteur.

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