Avion de combat européen du futur : la France songe à faire cavalier seul

Le programme du système avion de combat européen (Scaf) est miné par des tensions industrielles et des désaccords sur le partage des technologies. Dassault refuse de céder ses secrets à Airbus, tandis que Berlin et Madrid pressent pour avancer avant fin 2025.

Article rédigé par Emmanuel Cugny
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un modèle d'un futur système aérien de combat (SCAF), un avion européen développé par Dassault Aviation, exposé dans la cour de l'Elysée, à Paris, le 22 janvier. 2023. (LUDOVIC MARIN / AFP)
Un modèle d'un futur système aérien de combat (SCAF), un avion européen développé par Dassault Aviation, exposé dans la cour de l'Elysée, à Paris, le 22 janvier. 2023. (LUDOVIC MARIN / AFP)

La France est prête à faire cavalier seul dans le programme de construction de l’avion de combat européen (Scaf). Ce système de combat aérien vise à remplacer, à l’horizon 2040, le Rafale français et l’Eurofighter allemand et espagnol. Le programme a été lancé en 2017 par la Chancelière allemande de l’époque, Angela Merkel, et le président français, Emmanuel Macron, comme étendard de la coopération de défense entre Paris et Berlin. France et Allemagne ont ensuite été rejoints dans le projet par l’Espagne, mais depuis, l’affaire traîne et reste dans les limbes.

Le coût du programme industriel est évalué à près de 100 milliards d’euros et de vives tensions sont apparues au fil des années entre les industriels des pays partenaires. Ces tensions atteignent un point critique alors que le projet doit entrer dans une nouvelle phase en 2026 : celle de la construction de ce que l’on appelle le ‘’démonstrateur’’, sorte de pré-prototype destiné à évaluer les technologies retenues, mais qui nécessite au bas mot cinq milliards d’euros d’investissements.

La transmission des fichiers technologiques

Le projet ne bute pas uniquement sur un problème financier. Le groupe Dassault, qui est tête de pont dans ce projet, refuse de livrer ses secrets technologiques à ses concurrents industriels. Le fabricant du célèbre Rafale réclame plus d’autonomie dans son rôle de maître d’œuvre du Scaf, rôle qui lui a été confié par les trois États engagés dans le projet. Hors de question de transmettre ses fichiers technologiques… cela serait livrer des secrets de fabrique à Airbus, qui représente les intérêts de l’Allemagne et de l’Espagne.

Face à Dassault qui campe sur ses positions, et trouvant le temps long, Berlin et Madrid menacent de tout faire pour essayer d’arriver ensemble à une solution d’ici la fin de cette année 2025. Comment ? On ne sait pas, car aucun détail n’a été donné par les deux capitales. De son côté, Dassault Aviation affirme qu’il peut concevoir seul le futur avion de combat européen. Il ne veut pas entendre parler d’une gouvernance paritaire à trois. Que décidera finalement la France ? A-t-elle suffisamment d’argent pour faire cavalier seul dans le contexte budgétaire dégradé ? Alors qu'une réunion entre ministres de la Défense français, allemand et espagnol est prévue en octobre pour tenter d’avancer, la France attend toujours son nouveau ministre des Armées pour remplacer Sébastien Lecornu promu Premier ministre.

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