Le futur ex-patron d’EDF regrette l’engagement insuffisant de l’État pour le financement de la relance du nucléaire

Évincé d'EDF, Luc Rémont défend son bilan et étale ses divergences avec l'État dans une interview lundi au "Figaro".

Article rédigé par Emmanuel Cugny
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le futur ex-patron d’EDF Luc Rémont, le 29 août 2023. (EMMANUEL DUNAND / AFP)
Le futur ex-patron d’EDF Luc Rémont, le 29 août 2023. (EMMANUEL DUNAND / AFP)

Le PDG du groupe public EDF, Luc Rémont, s’est vu signifier son prochain limogeage par le ministre de l’Économie pour divergences de vues stratégiques, Vendredi 21 mars 2025. Trois jours plus tard, lundi, il n’y va pas de main morte dans les colonnes du Figaro. Pour Luc Rémont, il y a,"une dégradation réelle dans la capacité de l’État à concevoir le changement dans l’économie d’entreprise, à prendre des décisions et à tenir sa parole". Une petite phrase au détour d’un long entretien qui ne laissera pas indifférent Emmanuel Macron à l’heure de la revue de presse du petit-déjeuner à l’Élysée.

Le patron bientôt renvoyé regrette l’engagement insuffisant de l’État pour le financement de la relance du nucléaire. Après son prédécesseur Jean-Bernard Lévy, Luc Rémont est la victime expiatoire d'errements politiques à répétition - depuis plus d'une décennie - et de la politique du "stop-and-go" sur le nucléaire décidé au plus haut niveau de l'État.

Tout s’est passé très vite. Le sort du PDG d’EDF a été scellé vendredi, quand le ministre de l’Économie lui a signifié sa non-reconduction à la tête de l’entreprise à l’été 2025. Luc Rémont s’est retrouvé remercié quelques jours après un conseil de politique nucléaire réuni autour du président de la République, point d’étape sur l’avancement du programme de construction de six réacteurs de nouvelle génération EPR2. Pas assez rapide, estime l’Élysée, ce à quoi s’est ajouté une fronde de patrons de grands groupes industriels face à la pression mise par EDF sur les prix à payer pour la fourniture d’énergie. La coupe était pleine, l’Élysée a appuyé sur le bouton du siège éjectable.

Les difficultés de la France en matière électrique

Luc Rémont est arrivé à la tête de l’entreprise au pire moment. C’était en 2022, au plus fort de la crise énergétique et alors qu’une grande partie du parc électronucléaire était à l’arrêt en raison de problèmes de corrosion des installations. Le PDG a réussi à rétablir la performance opérationnelle et financière de l’entreprise. Mais lors de sa prise de fonction, se dessinait également la fin (pour 2026) du système de définition des prix de l’électricité aux industriels qui était en vigueur depuis une quinzaine d’années.

Ce système a été critiqué et montré du doigt comme contraire aux intérêts du groupe EDF qui est aujourd’hui endetté à hauteur de 54 milliards d’euros. Pour l’économiste Patrice Geoffron – qui dirige Centre de Géopolitique de l’Énergie et des Matières Premières –, cette crise à la tête d’EDF révèle les difficultés de la France à affronter le mur d’investissements en matière électrique, de l’extension de la durée de vie du parc nucléaire actuel à l’entretien des réseaux de distribution en passant la gestion des énergies renouvelables. Une situation à la fois industrielle et politique très compliquée que devra gérer le successeur de Luc Rémont, Bernard Fontana, actuel patron de Framatome, autre grand spécialiste du nucléaire.

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